Publicité

Kronik KC Ranzé

Le père Noël est au plus mal !

22 décembre 2024, 07:24

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Le père Noël est au plus mal !

Pendant ces cinq dernières années, le gouvernement sortant ne cessait de nous chanter, comme Ray Ventura, que «Tout va très bien, madame la marquise !». Cette adorable chanson datant de 1935 (Écoutez la ! Vous devriez aimer… (*) est depuis devenue, selon Wikipédia, «une expression populaire, voire proverbiale, pour illustrer une attitude d’aveuglement totale face à une situation désespérée et une tentative maladroite d’en cacher la vérité».

Le gouvernement sortant a beaucoup ramé depuis 2019 pour tenter de nous créer un feel-good factor quasi permanent. On se souviendra (et le ton était alors donné…) de la tentative de départ de nous vendre un budget «en équilibre» pour l’année financière 2020-21. On avait fait la promotion de l’idée qu’il n’y aurait pas de déficit budgétaire donc, malgré les graves séquelles tangibles du Covid-19 ! C’était le message que l’on voulait faire passer ! Seulement voilà, pour asseoir ce résultat comptable apparemment satisfaisant, on alimentait le trésor public de Rs 60 milliards dans une opération financée par la Banque centrale (BoM) et certifiée «one-off … Dans un mouvement «en pince», la BoM injectait Rs 80 milliards de plus dans la MIC, en passant par la planche à billets. Cerise sur le gâteau cette année-là : la CSG qui allait, promesse électorale oblige, une fois encore, soi-disant permettre de financer des pensions de Rs 4 500 de plus (Rs 13 500 en tout !), alors qu’il fallait apparemment payer des primes inférieures à celles précédemment dues à la NPF, tant que le salaire était moins de Rs 50 000. Payez moins, obtenez plus, quoi…

Le message transmis était dangereux et l’on en voit les séquelles jusqu’à aujourd’hui : le public se disait alors que si c’était tellement facile pour le gouvernement, il n’y avait qu’à attendre et en demander encore plus ! Or, les promesses démagogiques se paient toutes «cash» éventuellement ! Cash !

Je soulignais ainsi, en juillet 2020, (**), que «si les Rs 500 d’augmentation de la pension promis lors du dernier budget de Pravind Jugnauth ont pu se transformer, le temps d’une élection, six mois plus tard en… Rs 3 200 de plus, sans casse apparente aucune ; si c’est aussi facile de bénéficier de dons de la Banque centrale… ; si l’on peut faire des dépôts avec des rendements mirifiques et invraisemblables à la BAI et être remboursé quand le château de cartes s’écroule ; si l’on peut investir dans des projets qui coûtent des milliards, sans se soucier des pertes engendrées (Safe City, Métro, Côte-d’Or) ; si l’on peut «surgir du néant» pour vendre au ministère des masques Covid valant Rs 90, à plus de 12 fois ce prix ; si l’on peut payer Rs 476 millions d’avance à une compagnie espagnole qui n’a jamais publié de comptes depuis 2013 (Pack n Blister) ; si le déficit budgétaire peut disparaitre ‘’comme ça’» grâce à Rs 60 milliards de la BoM et que ça ne coûte rien à personne, comment trouver drôle, ensuite, que ‘’la rue’’ ne réclame… la lune !». Et qu’il croit cela tout à fait possible !

Quelque temps plus tard, on nous évoquait le pain béni des Rs 40 milliards de compensation que l’on allait recevoir des assureurs du Wakashio… Dans le budget suivant de 2021-22, on vendait au pays entier un «miracle» de budget populiste, avec une sacrée liste de dépenses et peu de nouvelles taxes visibles pour seulement 5 % de déficit… Mais on ne mettait pas en avant que la charge fiscale supportée par la population allait augmenter de 34 % en une année et que les dépenses opérationnelles du gouvernement allaient baisser de 0,8 % seulement. J’en passe des années intermédiaires, mais en 2024, pour encore nous chloroformer, je suppose, l’on a évoqué, en amont des élections, les dizaines de milliards de Diego, qui allaient financer les promesses électorales les plus folles. C’est ainsi que le gouvernement sortant promettait pour Rs 78 milliards de cadeaux de toutes sortes et l’opposition, pour ne pas perdre pied électoralement, tout en étant plus «raisonnable» s’arrêtait à Rs 48 milliards… Entretemps, on avait commencé a serieusement tripatouiller les statistiques nationales sans doute, une fois encore, pour rassurer les marquises que nous sommes largement devenues !

Or, comme démontré par le State of the Economy, le Père Noël est très malade, et même l’argent «facile» de l’assurance du Wakashio se fait encore désirer, jusqu’ici. Quant à Diego, on essaierait, apparemment, d’insister avec notre locataire éventuel qu’il n’a pas le droit d’y stocker du nucléaire… Ce qui est admirable sur le plan moral et pour le respect du traité de Pelindaba, mais probablement indigeste pour les Américains, Trump et compagnie. Imaginez que vous soyez locataire d’une maison et que votre landlord vous interdise d’y stocker de l’alcool… Toutes proportions respectées…

La recherche ponctuelle d’argent «facile» indique-t-elle que l’on ne veut rien changer de fondamental dans nos pratiques, si c’est trop inconfortable ? Toujours 25 ministres ? Dix juniors ? Mêmes salaires/ voitures/pensions/per diem ? On ne va fermer aucune Authority ? Juste changer de personnel, de chairperson, de CEO ? On ne va pas réduire le train de vie de l’État ? On ne va pas travailler plus dur ? Améliorer la productivité ? (Gassen Dorsamy à la CHC est un bon début, semble-t-il (**) Va-t-on, enfin et en priorité, trouver de nouvelles manières de générer des devises ? Assurer la rentabilité/ fiabilité du CEB ? des Casinos ? de la CWA ? du Métro ? d’Air Mauritius ? de la STC ? Éliminons-nous la CSG pour la remplacer par une NPF, dont les taux contributifs devront forcément augmenter ? Allons-nous prolonger l’âge de la retraite à 65 ans, vu que l’on vit plus longtemps ? Réformer le financement électoral ? Aucune opération vitale pour le pays ne sera privatisée ? On ne va vendre aucun actif ?

Comprenons-nous bien : Sans CHANGEMENTS profonds, les maux du passé vont perdurer !

Il faut du temps ? Sans aucun doute ! Le point capital, c’est que le Père Noël va mal et qu’il faut lui assurer un nouveau traitement de choc, l’ancien ayant, c’est maintenant confirmé, aggravé son état de santé… Par ailleurs, il faudra faire le plus vite possible car s’il meurt, il nous entraînera tous avec lui…

C’est dans ce contexte que l’on discutait cette semaine du paiement de folie d’un 14ᵉ mois et que Roshi Bhadain proposait le 14ᵉ mois… saucissonné par quinzaine !

Le 14ᵉ mois, c’est d’abord l’idée de XLD, mais il ne regardait que les profits des gros conglomérats pour le dire possible. Quand Pravin Jugnauth retire l’idée de son chapeau opportuniste lors du meeting de Vacoas, à seulement sept jours des élections, paniqué, ça devient la 20e des… 15 mesures de son programme électoral et ça refait surface parce qu’il sent que le terrain glisse fortement. Il a le toupet de présenter cette mesure comme un incentive à plus de productivité ! C’est, de fait, un piège tendu à la population et au vainqueur éventuel de l’élection. Il n’y a aucune logique à cette mesure, sinon électorale ! Dans le sillage, en conférence de presse, le Dr Ramgoolam prend la précaution de dire «Nu pu bizin get la sitiasion finansier» avant d’ajouter, rappelant 1995, «Li pa pou la li, Nu ki pu pey sa !». Heureusement qu’il y a le «Nou», car tous les employeurs ne peuvent pas payer ! Cependant, comme dit Moody’s, plus «Nou depense, plus l’assainissement va durer ….

On dit, au vu des 60-0, que l’opposition aurait dû résister à la tentation de répondre au 14ᵉ mois de Jugnauth. C’est merveilleux cette sagesse qui surgit, comme ça, après l’évènement… qui n’a même pas eu lieu ! Car je vous le demande : SANS répliquer au 14ᵉ mois de Jugnauth, l’opposition aurait-elle gagné ou perdu ?

Le targeting est rendu nécessaire par l’état miteux des caisses du père Noël, mais la formule retenue est moins qu’heureuse : nombreux sont ceux qui se retrouvent avec des salaires entre Rs 50 000 et 100 000, qui ne feront que… doubler en décembre, alors que ceux juste en-dessous de Rs 50 000 vont…. tripler leur mois de décembre. Un mois plein jusqu’à Rs 30 000 réduit d’une semaine par tranche de Rs 25 000 aurait été un meilleur canevas de travail…

Quant à l’idée de Roshi Badhain de payer à la quinzaine pour «générer» un 14ᵉ mois, ce n’est tout simplement pas possible que les employés aient un 14ᵉ mois en poche ET, qu’en même temps, cela «n’affecte aucune entreprise»… C’est mathématiquement impossible ! Crédit = Débit ! De plus, le paiement à la quinzaine réduira certes un peu les intérêts payés par l’employé sur ses emprunts, mais, en contrepartie, l’employeur, quant à lui, paiera… plus d’intérêts sur son découvert. Ainsi va le monde ! Quant aux employeurs, ce qui compte dans leur budget, c’est la masse salariale annuelle, intérêts induits compris et leurs contrats avec salaires mensuels actuels seraient sûrement rapidement remplacés par des contrats à salaires annuels, payables en 26 quinzaines, ou en 52 semaines, si on veut… avec ajustement d’intérêt.

Ça vaudra le coup ?

(*) YouTube l Tout va très bien, Madame la Marquise

(**) L'express.mu l Gassen Dorsamy: «On a mis des chatwas partout»

Publicité