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Public Service Day au SVICC hier
Le PM mobilise les fonctionnaires, une stratégie calculée
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Public Service Day au SVICC hier
Le PM mobilise les fonctionnaires, une stratégie calculée
Pravind Jugnauth au SVICC, hier. Il est ici entouré de fonctionnaires.
Malgré le temps maussade d’hier, la salle du Swami Vivekananda International Convention Centre (SVICC) était remplie. Le discours de Pravind Jugnauth était très attendu des fonctionnaires qui espéraient une annonce de réajustement salarial, soit une augmentation après celle du salaire minimum, tout comme les retraités attendaient une augmentation de la pension en novembre 2019. D’autant plus qu’une forte mobilisation avait été mise en place, y compris des notes internes émises dans les ministères et qui ressemblaient plus à des ordres qu’à des invitations.
Cependant, il semble que le jugement du Privy Council, même s’il a donné raison aux trois élus du Mouvement socialiste militant, ait eu son effet et qu’elle ait freiné l’ardeur du Premier ministre (PM). Son annonce a été faite d’une façon tellement prudente qu’il est plus que probable que le message n’ait pas été reçu par tous. Jugez-en vous-mêmes. Venant au thème du réajustement salarial qui, «selon certains», tarde à se matérialiser, Pravind Jugnauth a lancé : «Mais le Budget n’est pas encore voté. Ce sera fait mardi.» Dans le dernier Budget, le salaire minimum et le revenu minimum garanti ont été augmentés, et il reste le vote du Budget en troisième lecture. Le PM a-t-il voulu dire que le réajustement salarial sera connu lors du vote du Budget ? Cela concernera-t-il la fonction publique et le secteur privé ?
Poursuivant sur le sujet, le PM a fait savoir que le travail a déjà commencé et que le Pay Research Bureau (PRB) est sur le dossier. Il s’est empressé de clarifier : «Le PRB viendra avec ses recommandations… Le secrétaire du cabinet et le secrétaire financier y accorderont une attention spéciale. Le gouvernement mettra en vigueur ces recommandations le plus vite possible.» Toutefois, Pravind Jugnauth a tenu à faire savoir d’une façon subtile que c’est lui qui donnera cette augmentation. Comment faire tout en n’égratignant pas l’indépendance du PRB ? «Quand moi, je donne ma parole, je la respecte.» Applaudissements. Le message a été passé !
L’art du détournement
C’est donc pour cela que les fonctionnaires avaient été formellement conseillés d’être présents hier au SVICC ? Peut-être et cela, même s’il s’agissait de faire très attention aux mots employés pour ne pas être accusé d’avoir violé la loi électorale. Les fonctionnaires n’ont pas seulement reçu le message d’augmentation imminente de leur salaire. Ils ont été «défendus» dans leur travail contre les attaques, intimidations et agressions venant d’agitateurs et de provocateurs, notamment sur les réseaux sociaux. Pravind Jugnauth a sûrement voulu dévier les attaques contre les ministres vers les fonctionnaires. «Je vais sévir.» Tout en ajoutant : «Certains médias dénigrent la fonction publique.» Et de prendre l’exemple de l’Electoral Supervisory Commission qui a été «vilipendée», de notre «fully-democratic country de Maurice grâce à vous les fonctionnaires». Il a tenu aussi à remercier les syndicats de la fonction publique.
Un sac de goodies a été distribué à ceux présents hier au SVICC. Il contenait un croissant, une bouteille d’eau minérale de la marque Vital, une pomme, une orange, un jus et une autre pâtisserie ressemblant à du massepain, plus un cadeau «surprise» dont on n’a pu connaître la nature. Cependant, une question reste posée. Qui a financé ce déplacement massif de fonctionnaires vers SVICC et les autres dépenses de logistiques pour ce rassemblement qui ressemblait fort à celui de novembre 2019, mais avec moins d’enthousiasme ?
Pleure pas, tu la reverras la mer
Des autobus ont été vus hier matin à Floréal, sur la route principale, embarquant des fonctionnaires qui allaient assister au discours du Premier ministre au SVICC. Certaines personnes ont emporté leur chaise pliable car on leur a dit qu’il y avait le risque d’en manquer. Cependant, sur une route latérale, loin des regards indiscrets, un autre autobus individuel s’est garé dans un recoin pour embarquer des personnes du troisième âge. «Vous allez au SVICC ?», avonsnous demandé. «Non, à la plage», nous a répondu le receveur. Par un temps pareil ? «Il fait beau au bord de la mer.» Un autre senior rencontré plus loin, qui se dirigeait vers le bus sous la pluie battante, nous a dit la vérité. «Nous allons à la plage, mais avant nous passerons au SVICC.» Qui paie ? «Je pense que c’est le gouvernement.» Mais qu’allez-vous faire parmi les fonctionnaires ? «On nous a dit d’y aller. Alors, j’y vais. On ira à la mer après.» On a appris que, le 15 juin, un groupe de personnes âgées d’un village du Nord a été invité à visiter le jardin de Pamplemousses, qui est, soit dit en passant, dans tous ses états. Le transport serait gratuit et il y aurait aussi du briani. Ils ont pris le bus avec d’autres seniors et certains ont apporté leur nappe pour s’installer sur le gazon. Arrivés devant le portail, le receveur (il s’agissait d’un autobus individuel) leur a montré le jardin en leur disant : «Vous avez vu le jardin ? Ok, on part.» Surpris, ils l’étaient, les pauvres seniors ! Et lorsqu’ils ont voulu savoir si on les emmenait au bord de la mer, le receveur a dit oui. Et quelle ne fut pas leur deuxième surprise lorsque le bus les a déposés au Port-Louis Waterfront. Pour quoi faire, ont-ils voulu savoir. Pour assister au dévoilement de la statue de sir Anerood Jugnauth, ou ce qui était censé l’être. «Voilà comment on traite nos personnes âgées», a résumé notre interlocuteur, fils d’un des seniors embarqués pour une destination inconnue. «Inn servi zot pou vinn fer boukou.»
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