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Production d’électricité

L’énergie verte s’essouffle

17 juin 2024, 22:00

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L’énergie verte s’essouffle

Malgré les inaugurations de fermes solaires, comme à Arsenal en février, la production d’énergie photovoltaïque est en baisse.

La production d’électricité à partir de l’énergie renouvelable est en baisse. Statistics Mauritius a publié son rapport pour l’année 2023 durant la semaine écoulée. La production d’énergie verte est passée de 19,2% en 2022 à 17,6% en 2023. La situation inquiète les experts d’autant plus que le gouvernement s’est engagé à éliminer le charbon d’ici 2030 pour atteindre 60 % d’utilisation de renouvelable.

Ce rapport de Statistics Mauritius fait un autre constat. Certes, il y a une hausse de la production d’électricité à partir des énergies renouvelables entre 2014 et 2015, mais ensuite il y a eu déclin. Le principal facteur de cette baisse est la réduction de la production de la bagasse. D’ailleurs, environ 82 % d’énergie renouvelable proviennent de la bagasse. Les autres sources d’énergie verte sont en baisse. Un ancien ministre de l’Energie croit comprendre que les fermes solaires n’arrivent pas à fonctionner à plein régime et l’éolien n’est probablement pas la solution. Leur taux de production, note-t-il, est en déclin.

Le député du Parti travailliste Osman Mahomed, également ancien président de Maurice île Durable, explique que divers facteurs ont mené à cette baisse. Il reconnaît que la production de bagasse a décliné depuis plusieurs années. Cependant, il maintient qu’il n’y a pas eu de projets majeurs pour booster la production d’énergie verte, rappelant que le Republic of Mauritius long term strategy 2009- 2025, publié en octobre 2009, n’a pas été respecté depuis l’arrivée du nouveau gouvernement. «L’objectif du PTr était d’atteindre 35 % en 2025. Notre gouvernement est à l’origine de la ferme éolienne de Roches-Noires avec une capacité de plus de 9 mégawatts (MW). Nous avons également encouragé la ferme photovoltaïque de Sarako à La Ferme, fournissant 15 MW. Le gouvernement du Mouvement socialiste militant n’a pas suivi le plan stratégique que nous avions lancé. D’ailleurs, il n’a même pas su gérerle projet de Padgreen à Plaine-Sophie qui devait avoir une puissance de 29 MW. Il ne faut pas non plus oublier que le projet Landfill gas, la production de gaz à Mare-Chicose pour la production d’électricité a été fait sous le régime du PTr.»

Cependant, il faut aussi reconnaître que plusieurs fermes photovoltaïques ont été lancées après la venue du nouveau gouvernement. À titre d’exemple, il y a le projet SPV Petite-Rivière d’une capacité de 5 MW ou encore celui d’Akuo Energy (Mauritius) Ltd, à Henrietta, d’une puissance de 17 MW. Osman Mahomed maintient que la production de ces fermes photovoltaïques est insuffisante. Il faut d’autres projets d’envergure. «Il y a une cible mobile en face de nous. La production d’électricité de ces fermes photovoltaïques n’est pas suffisante pour compenser la demande en hausse constante. D’où ce faible pourcentage. Il fallait appliquer le plan stratégique que nous avions préparé.» D’après Statistics Mauritius, la plus grosse consommation d’électricité en 2014 était un pic de 446,2 MW alors qu’en 2023, ce chiffre est passé à 508,4 MW.

Revenons sur la baisse d’énergie renouvelable de 19,2 % en 2022 à 17,6 % en 2023. Pour montrer qu’il n’y a pas vraiment eu d’innovation dans ce secteur, l’ancien ministre des Finances, Rama Sithanen, intervenant à la radio vendredi, n’a pas manqué de préciser que de ces 17,6 %, il y a également la production des stations hydroélectriques, un système dont il a entendu parler alors qu’il était encore à l’école, a-t-il fait ressortir. Idem pour la bagasse.

Au ministère de l’Energie, on nous a référé au discours de Joe Lesjongard, qui est intervenu sur le Budget, vendredi au Parlement. Le ministre a rassuré ses collègues députés, tout en leur donnant la garantie que le seuil de 60 % sera atteint d’ici à 2030. «Malgré les lobbies et la démagogie venant de certains membres de l’opposition, l’objectif d’atteindre 60 % d’énergie renouvelable, l’élimination de l’utilisation du charbon et la réduction de nos émissions de carbone seront une réalité d’ici à 2030.» Il a rappelé que sous le régime travailliste en 2009, il n’y avait aucune production d’électricité utilisant l’énergie solaire. Pour expliquer cette baisse en énergie renouvelable, Joe Lesjongard a maintenu que la production de la canne à sucre est passée de 4,7 millions de tonnes à 2,2 millions de 2002 à 2022. «La production d’électricité à partir de la bagasse a connu une baisse de 40 % en 20 ans.»

Toujours dans son discours, le ministre de l’Energie a déclaré que d’ici la fin de l’année, le Central Electricity Board prévoit une production d’électricité de 178 MW additionnels sur les réseaux grâce aux panneaux solaires. Joe Lesjongard a annoncé une série de projets dont l’installation de panneaux photovoltaïques de 40 usines qui fourniront de l’électricité ayant une puissance de 106 MW au CEB. Il maintient que d’ici 2025, 37 % d’électricité seront produits à partir des énergies renouvelables.

Toutefois, si l’objectif de 60 % n’est pas atteint en 2030, prévient Osman Mahomed, Maurice perdra 6,5 millions de dollars de la communauté internationale pour atténuer les effets du changement climatique. Pravind Jugnauth, dit-il, avait pris cet engagement lors du sommet COP26 tenu en octobre 2021 afin d’obtenir un soutien financier.

Franck Rivas : «L’agri-voltaïque permet d’améliorer la productivité des exploitations»

Le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, a annoncé la mise en place de l’Agrivoltaic Scheme, pour les planteurs et fermiers avec un tarif de Rs 5 par kWh. Nous avons sollicité Franc Rivas, dont la compagnie a réalisé des fermes agrivoltaïques.

Expliquez-nous ce qu’est l’agri-voltaïque ?

Le terme agri-voltaïque est une contraction des mots «agriculture» et «photovoltaïque». C’est une approche innovante qui consiste à combiner l’agriculture avec la production d’électricité à partir de l’énergie solaire. On retrouve ainsi, sur la même emprise, une activité de production agricole et une autre de production d’électricité à partir d’énergie solaire.

Quels en sont les avantages ?

Les projets agri-voltaïques permettent de concilier les enjeux de transition agricole avec ceux de l’écologique. Les agriculteurs subissent déjà les impacts du changement climatique avec fortes chaleurs, pénurie d’eau et autres intempéries. Le couplage d’une installation photovoltaïque à leur activité permet de réduire les conséquences de ces impacts. Premièrement, en apportant une protection immédiate aux cultures ou à l’élevage et deuxièmement en produisant, sur le long terme, une énergie décarbonée pour lutter contre le réchauffement.

Et les désavantages ?

Un projet agri-voltaïque doit être dimensionné et réalisé pour garantir une synergie totale entre l’activité agricole et l’activité photovoltaïque. Chaque partie doit pouvoir exercer son activité avec le moins de contraintes possibles. Il convient donc de mener un important travail de concertation au préalable. Selon les géographies, ces projets encore «innovants» peuvent également souffrir d’un cadre réglementaire inadapté. Aujourd’hui, ce type de projet peut engendrer des délais et des coûts de développement plus importants.

Les agriculteurs pourront-ils toujours planter des légumes ?

Oui, bien entendu. Il y a, certes, différentes typologies de projets agri-voltaïques mais l’objectif reste la préservation de l’activité agricole en place. Les structures agri-voltaïques étant plus élevées que les structures conventionnelles, garantissent l’accès aux cultures. En fonction des exploitations en place, il est également possible de dimensionner un projet pour que la circulation d’engins agricoles soit toujours possible. Sur la partie photovoltaïque, l’occupation des sols est négligeable et se résume à l’emprise des poteaux, quelques mètres linéaires de tranchées et un local technique en bordure de propriété.

Est-ce que ce concept peut réduire la production en privant les champs du soleil ?

Non, car premièrement, il ne s’agit pas de recouvrir l’ensemble des cultures de panneaux solaires. Les structures agri-voltaïques sont généralement alignées en rangées avec des espaces libres entre chaque rangée. Et puis, les modules solaires ne sont pas opaques. Ils laissent passer une partie des rayons du soleil. À l’inverse, je dirais plutôt que l’agrivoltaïque permet d’améliorer la productivité des exploitations en apportant un confort climatique aux cultures.

Les planteurs auront-ils accès à leurs champs ?

Oui, toutes les dispositions constructives sont prises dès la conception du projet pour intégrer les besoins et contraintes de l’exploitant agricole.

Est-ce que cela peut également engager des éleveurs ou des fermiers ?

Oui, il existe plusieurs types d’installations agri-voltaïques selon l’activité agricole en place. Une installation agri-voltaïque peut effectivement être couplée à une activité d’élevage ovin ou bovin par exemple. Selon la saison, certaines zones de pâtures peuvent s’assécher, provoquant une réduction de la ressource alimentaire. La présence d’une installation agri-voltaïque permet de préserver cette ressource et d’apporter du confort aux animaux, en les protégeant des fortes chaleurs et autres intempéries.

Dans quels pays avezvous ces fermes ?

Nous avons plusieurs projets en cours de développement sur la zone océan Indien dont La Réunion et Mayotte. La capacité de production de ces installations varie entre 500KWc et 5MWc. Nous avons favorisé, pour ces projets, la technologie d’ombrières, aussi connue comme les abris de culture, et des serres photovoltaïques. Ces types d’installations permettent aux agriculteurs d’exploiter la culture de la vanille voire un mix vanille et melon, de l’horticulture et aussi l’élevage porcin. En France, nous avons également des projets sur des exploitations ovines ou bovines.