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Dysfonctionnement allégué à la PSC en 2021

L’enseignant Fowdur alerte sur un système biaisé

26 juin 2025, 07:00

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L’enseignant Fowdur alerte sur un système biaisé

Un enseignant monte au créneau pour dénoncer ce qu’il considère comme l’un des pires cas de dérive institutionnelle dans la fonction publique mauricienne. Selon Sudhir Fowdur, la Public Service Commission (PSC) aurait validé en 2021 des recrutements entachés d’irrégularités graves au poste de Deputy Rector, écartant des candidats qualifiés au profit de profils non conformes. Si le Public Bodies Appeal Tribunal (PBAT) a reconnu certaines anomalies, les décisions restent partielles. Sudhir Fowdur parle de «déni de justice» et d’un système où règne l’arbitraire, entre passe-droits, critères flous et silence institutionnel. Il appelle à une refondation urgente de la PSC pour restaurer la méritocratie et la confiance citoyenne.

En 2021, la PSC publie un appel à candidatures pour le poste de Deputy Rector dans les établissements secondaires. À l’issue du processus, 45 personnes sont nommées temporairement. Très vite, Sudhir Fowdur dénonce de graves irrégularités. Il constate que des personnes convoquées et sélectionnées ne possédaient pas les qualifications officiellement requises par le scheme of service. «On a accepté des diplômes qui ne figuraient nulle part dans les critères. D’autres, mieux qualifiés et expérimentés, ont été écartés. C’est une injustice flagrante», déplore-t-il.

620 x 330 (5).png ■ Capture d’écran du «scheme of service».

L’une de ses critiques majeures porte sur l’abus du pouvoir d’appréciation de la PSC concernant l’«équivalence» des qualifications alors que «le wording du scheme of service est on ne peut plus claire» (voir la capture d’écran). Ainsi, des maîtrises en leadership éducatif ont été acceptées en lieu et place du Postgraduate Certificate in Education (PGCE), pourtant explicitement exigé. «Aujourd’hui, on dit qu’un master académique équivaut à un diplôme professionnel en pédagogie. Et demain, ce sera quoi ?», interroge Sudhir Fowdur. Pour lui, «c’est cette dérive qui compromet la qualité et l’équité du service public».

• Une décision partielle, un jugement controversé

En mars 2024, le PBAT annule la nomination de quatre candidats après examen. Mais pour Sudhir Fowdur, cela ne suffit pas : «Le tribunal a reconnu qu’il y avait un problème, mais il n’est pas allé au bout de sa logique. Pourquoi annuler quatre nominations et maintenir les autres alors qu’elles relèvent des mêmes irrégularités ? Cela n’a aucun sens.» Il critique également la rédaction du jugement, faite par un ancien secrétaire de la fonction publique, qu’il soupçonne de conflit d’intérêts. Ce dernier aurait justifié les agissements de la PSC en affirmant que les candidats étaient «pleinement informés» des critères alternatifs – une version que Sudhir Fowdur rejette catégoriquement. «Le tribunal n’a pas seulement manqué de rigueur. Il a cautionné l’illégalité. Et dans le même souffle, il affirme qu’il n’y avait aucune preuve d’irrégularité. C’est absurde. S’il n’y avait rien d’irrégulier, pourquoi annuler des nominations ?»

Il souligne par ailleurs que des preuves essentielles ont été ignorées : l’absence de prise en compte des diplômes additionnels, une évaluation incohérente des compétences et la non-application de certains règlements internes, comme le règlement 14 qui impose un haut niveau d’équité dans les processus de sélection.

• Une incohérence qui mine la PSC

Pour Sudhir Fowdur, un autre scandale réside dans l’absence d’uniformité des critères d’évaluation selon les postes. «Un critère pour les recteurs, un autre pour les Deputy Rectors, encore un autre pour les enseignants… C’est de l’incohérence flagrante !», dénonce-t-il. «Cela mine la crédibilité de la PSC. Est-ce une procédure juste et équitable ? Histoire de permettre aux gens de savoir ce qu’ils doivent faire comme études pour être promus. La PSC a fauté en 2021 !»

Il accuse l’institution de ne pas avoir respecté les standards d’efficacité exigés de sa mission : «La PSC a appliqué un critère inapproprié pour évaluer la suitability, ce qui a compromis la planification à long terme de la relève. En temps normal, les candidats obtiennent le PGCE pendant leur carrière d’enseignant. Or, sur les 48 nommés, 18 ont choisi de ne pas l’obtenir après 18 ans de service. Cela les rend inéligibles pour de futures promotions au poste de Rector. Pourtant, certains d’entre eux ont été jugés plus aptes à la promotion, ce qui révèle un échec profond dans la planification des ressources humaines.»

• Une stratégie du silence ?

Autre point troublant : après la décision du PBAT, la PSC saisit la Cour suprême – scr 125673 –, qui accorde un sursis. Mais huit mois plus tard, aucun document n’a été soumis pour faire avancer l’affaire. «C’est une manœuvre pour gagner du temps, faire traîner les choses et maintenir en poste ceux qui n’auraient jamais dû être nommés. On prive les plaignants d’un procès équitable», accuse-t-il.

Les dénonciations de Sudhir Fowdur ont été envoyées à plusieurs institutions, y compris au Premier ministre, au président de la République et au ministre de la Fonction publique. Malgré le changement de régime, aucun engagement n’a été communiqué à ce jour. Pour Sudhir Fowdur, cette affaire dépasse les cas individuels. Elle pose une question fondamentale de justice administrative et d’égalité des chances dans le service public. «Ce scandale, s’il ne trouve pas de réponse forte, pourrait laisser un message dangereux : que des institutions censées être garantes de l’équité et de la compétence peuvent agir dans l’impunité. Et que la démocratie, sans justice administrative, n’est qu’un mot creux.»

Il conclut : «Je me bats, oui, pour que justice me soit rendue. Mais surtout pour que le citoyen mauricien retrouve confiance en ses institutions. Car aujourd’hui, cette confiance est gravement entamée.» Il pose la question redoutée : «Cette affaire sera-t-elle résolue dans l’intérêt de l’équité et du service public ? Ou sombrera-t-elle dans les silences feutrés de la machine administrative ?»

Sinon, un autre dossier est actuellement en cours, directement lié à toute cette affaire. Contrairement au judicial review de la PSC contre la PBAT – évoqué plus haut et resté en suspens vu la «delaying tactic» que dénonce l’enseignant Sudhir Fowdur –, ce cas-ci est toujours devant la justice : il oppose les quatre Deputy Rectors demoted par la PBAT.

Il est à noter que la nouvelle directrice de la PSC, Iona Melanie Oree, a été nommée en 2025, soit après l’affaire. Sollicitée pour réagir à cette affaire, la PSC a décliné tout commentaire, invoquant la «confidentialité» du dossier. Un courriel avait pourtant été adressé à l’institution dans l’espoir de savoir si, sous la nouvelle direction, la PSC envisageait de faire évoluer la situation. Aucune réponse n’a été obtenue à ce jour.

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