Publicité

Tourisme hors contrôle

Les baleines prises en otage par la quête du sensationnel

13 juillet 2025, 12:30

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Alors que la saison des baleines bat son plein à Maurice, des vidéos inquiétantes circulent sur les réseaux sociaux, révélant une réalité préoccupante. Malgré les efforts de sensibilisation, la surveillance des autorités et les contraventions émises par la National Coast Guard (NCG), des opérateurs touristiques continuent d’organiser des sorties illégales pour permettre aux touristes de nager avec des cachalots. Ces pratiques, en totale infraction avec les normes de protection marine, menacent directement la sécurité de ces mammifères marins et l’image internationale de l’île. Certaines séquences partagées en ligne montrent plus de dix embarcations encerclant un groupe de cachalots, tandis que des guides touristiques encouragent leurs clients à se jeter à l’eau.

Une vidéo particulièrement choquante montre plus de 20 personnes entourant un cachalot dans l’eau, une intrusion massive susceptible de provoquer un stress aigu chez l’animal. Ces images traduisent un comportement irresponsable, motivé par la quête de sensations fortes et de contenu viral au détriment du bien-être animal et des réglementations environnementales. Mais une image en particulier a profondément choqué la communauté scientifique et environnementale : on y voit un jeune cachalot portant des marques d’hélice visibles sur le visage, preuve accablante de la proximité dangereuse et des collisions avec les embarcations.

#Savetheblu tire la sonnette d’alarme

Face à cette situation, l’association #Savetheblu a lancé un appel urgent aux autorités et à la population pour défendre ce phénomène écologique unique, qui se déroule chaque année dans les eaux mauriciennes entre juillet et novembre. Cette période correspond à la migration des baleines à bosse (Megaptera novaeangliae), venues des eaux glacées de l’Antarctique pour mettre bas, allaiter leurs petits et interagir dans un environnement paisible.

16hrs embed.jpgImage choquante d’un cachalot portant une blessure au visage, causée par l’hélice d’un bateau.

«Ces eaux ne sont pas une simple escale. Elles sont un sanctuaire», rappelle l’association, qui souligne que certaines familles de baleines reviennent année après année, signe de fidélité aux eaux mauriciennes. Ce lien précieux risque aujourd’hui d’être rompu par la montée d’un tourisme non encadré, avec son lot de moteurs assourdissants, de courses aux cétacés et d’influenceurs avides de contenu spectaculaire. Dans une correspondance officielle adressée au ministère de l’Économie bleue, #Savetheblu propose une stratégie en quatre volets pour répondre à l’urgence :

⚫ Renforcement de la surveillance en mer, avec des patrouilles régulières et l’identification des zones sensibles, notamment le long des routes migratoires.

⚫ Création d’une unité nationale de réponse pour les mammifères marins, composée de vétérinaires, biologistes, plongeurs et spécialistes du sauvetage.

⚫ Mise en place d’une ligne d’urgence marine, disponible 24/7 pour signaler tout incident ou activité illégale.

⚫ Déploiement stratégique de cette unité à des points critiques, tels que Le Morne, Rivière-Noire, Coin-de-Mire ou l’îlot Gabriel, régulièrement fréquentés par les cétacés.

#Savetheblu plaide également pour des sanctions à l’encontre des opérateurs délinquants et des influenceurs, qui encouragent ces pratiques via leurs plateformes sociales.

Responsabilités écologiques

Au-delà de la répression, l’initiative propose aussi une démarche culturelle ambitieuse : faire des baleines un symbole vivant de résilience et de fierté nationale. Une célébration annuelle en leur honneur, sous l’égide du ministère des Arts et de la Culture, pourrait être organisée entre juillet et septembre. Elle rassemblerait artistes, musiciens, écrivains, écoles, communautés côtières et ONG autour de spectacles, ateliers, expositions, installations artistiques et défilés marins.

Ce projet viserait à inscrire les baleines dans la conscience collective, à renforcer le sentiment d’appartenance à l’océan Indien et à générer des retombées économiques dans les secteurs culturel et écotouristique, tout en intégrant la protection des cétacés dans les politiques publiques.

Alors que le monde observe de plus en plus les politiques environnementales mises en œuvre par les petits États insulaires, Maurice est à la croisée des chemins. L’île peut choisir d’être un simple décor touristique ou un véritable gardien de la vie marine. Comme le résume #Savetheblu : «Ce n’est pas qu’une question de biodiversité, c’est une question d’identité, de fierté et d’héritage national.»

Le moment est venu pour les autorités, les opérateurs touristiques, les citoyens et les artistes de se mobiliser pour faire de Maurice non seulement un refuge pour les baleines, mais un modèle de respect et de responsabilité environnementale dans la région.

Publicité