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Rs 7,7 milliards perdues de Silver Bank
Les prêts liés au scandale Trafigura
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Rs 7,7 milliards perdues de Silver Bank
Les prêts liés au scandale Trafigura
Le «Relationship Manager», Rajiv Ramcharitar, est aussi celui qui collabore avec le «conservator» Arvind Gokhool.
Prateek Gupta aurait escroqué Rs 7,7 milliards de Silver Bank. Il a pu le faire sous forme de prêts tout simplement parce qu’il contrôlait toujours la banque de l’étranger via des complices à l’intérieur…
Ces prêts, tout comme ceux de la State Bank aux Mehta, Pabari et autres B. R. Shetty, ont été effectués en majeure partie en dollars et sans garantie. Ils sont maintenant probablement perdus pour Silver Bank, pour les contribuables et pour le pays. Cela, alors que le pays manque cruellement de devises étrangères… Les bénéficiaires: des sociétés étrangères fictives ou réelles, on ne le sait. Il semble bien que Prateek Gupta ait utilisé la même combine que celle utilisée avec plusieurs banques à travers le monde.
Ces prêts, totalisant Rs 7,7 milliards au final, déboursés à des sociétés liées à Prateek Gupta entre janvier 2022 et janvier 2023, n’ont jamais été remboursés, même en partie. Cependant, Silver Bank a continué à en donner d’autres même quand les précédents prêts devenaient des non-performing accounts (NPA). Qui plus est, lorsqu’un prêt devient un NPA, la banque doit normalement débuter les procédures de saisie. Ce qu’elle n’a jamais fait, ni tenté de faire. Et pour cause! Ces «garanties» consistaient dans la majorité des cas en des marchandises, des métaux, en particulier du nickel, qui allaient être livrés à Trafigura, métaux qui se sont révélés n’être que du vent.
Pour rappel, Prateek Gupta était accusé en février 2023 non seulement d’avoir filouté Trafigura de $ 577 millions (Rs 26 milliards!) mais d’avoir en parallèle déplumé dix différentes banques. Comment a-t-il fait ? Un expert financier, Jonas Rey, explique : «Une seule cargaison de marchandises est achetée et vendue entre dix sociétés complices. Dix financements sont recherchés pour une seule expédition de marchandises!» Vous diriez que ce n’est pas possible puisqu’une banque ne devrait accepter que le connaissement original. Une enquête internationale est en cours. Chez Siver Bank, l’expert-comptable de Grant Thornton, Arvindsingh Gokhool, devrait découvrir assez facilement si le même stratagème a été mis en œuvre.
Charge fixe, charge flottante et charge… flottant sur mer
Normalement, une ligne de crédit ou un prêt est accordé contre une garantie fixe ou flottante. La première est normalement un bien immobilier sur lequel est inscrite la charge au casier hypothécaire de l’emprunteur. Bref, c’est du solide. La charge flottante, elle, est inscrite contre des biens meubles, normalement un stock de marchandises, mais elle est loin d’être aussi sécurisée qu’une charge fixe. C’est ce type de garantie qu’a choisie Silver Bank pour prêter de l’argent à des sociétés contrôlées par Prateek Gupta. Si ce genre de garantie à haut risque est courant, on ne l’utilise que pour des clients qu’une banque connaît bien, qui se trouvent dans le pays et qui n’ont pas d’antécédents de défaut de paiement. Or, avec les sociétés de Prateek Gupta, les charges flottantes étaient mises sur des marchandises fictives voguant entre différents ports étrangers. «Comment, se demande un banquier, peut-on prendre en garantie des marchandises qui ne se trouvent premièrement pas à Maurice et deuxièmement, si ce sont des cargaisons, qui ne tiennent pas en place ?»
Gupta a donc toujours dirigé Silver Bank avant et a continué à le faire après l’éclatement du scandale Trafigura de l’étranger via des complices à l’intérieur de la banque. Comment alors expliquer le communiqué de la Banque de Maurice (BoM) du 13 février 2023 et celui de Silver Bank le lendemain dans le sillage de l’affaire Trafigura ? Pour rappel, la BoMreconnaissait que la partie citée (NdlR : TMT Metals) comme le fraudeur dans le communiqué de Trafigura «is linked to one of the ultimate beneficial owners of Silver Bank Limited…»
Or, dans son communiqué du 14 février 2023, le board de Silver Bank ne dit pas, lui, que Prateek Gupta est lié directement ou indirectement à une des propriétaires de la banque, à savoir Ginni Gupta, qui n’est autre que l’épouse de Prateek. Un mensonge ou une omission de la part de Silver Bank par rapport au communiqué de la BoM ? Le board de Silver Bank affirmait aussi, texto, «Mr Gupta, his related parties, linked individuals and partiesdo not have any direct or indirect exposure to Silver Bank Limited». Bien que l’anglais laisse à désirer, ou alors c’était fait exprès, on croit comprendre que Silver Bank n’a accordé aucun prêt à Gupta ou à ses sociétés. Alors qu’elle venait de le faire,depuis janvier 2022 !
Une bombe pour la BoM
Le plus surprenant : dans le même communiqué du 13 février 2023, la BoM affirme que «the management of Silver Bank Limited has confirmed that the bank has no exposure to “any of the alleged companies or to any other linked entities or individuals” (whether as principal or as direct or indirect guarantor)». La BoM, prudente, citait le «management of Silver Bank». Mais avait-elle confirmé ce que le management lui avait dit ? Et lors de sa prise en charge de la Silver Bank à partir de février 2023, a-t-elle pu découvrir si Gupta avait emprunté ou non de Silver Bank, même à travers des sociétés écrans ? Arvindsingh Gokhools’y penchera-t-il ? Il faut noter que c’est la BoM qui l’a choisi comme conservateur et sans appel d’offres…
Prateek Gupta savait que l’argent emprunté de Silver Bank ne serait pas remboursé. S’est-il volé lui-même ou a-t-il volé sa femme Ginni qui détenait 75 % des actions de la banque? Non. Il vient de voler nos sous. Car entre autres, au moins un milliard de dépôts des municipalités de Curepipe et de Port-Louis, de la National Insurance Company (NIC) et du Covid Projects Development Fund sont toujours bloqués chez Silver Bank. Pour aider celle-ci à prêter à pure perte à Prateek Gupta ? À savoir que la NIC y aurait Rs 250 millions et non Rs 125 millions comme écrit précédemment.
Rajiv Ramcharitar toujours en poste
Le Relationship Manager (RM) de ces clients louches est Rajiv Ramcharitar. Pourtant, il n’a même pas été suspendu. En revanche, c’est l’auditeur interne Yanish Sadasing qui l’a été. Le monde à l’envers ? Non, c’est Silver Bank. De plus, tout le monde savait que Ramcharitar parlait presque quotidiennement à Prateek Gupta au téléphone et il s’en vantait parfois. C’est pour cette raison peut-être qu’il venait d’être nommé directeur par intérim de la banque après la suspension du directeur titulaire, le Géorgien Vasil Revishvili. Cerise sur le gâteau : c’est Ramcharitar qui collabore actuellement avec Arvindsingh Gokhool, l’auditeur partenaire de Sattar Hajee Abdoula. Enfin, c’est Rajiv Ramcharitar qui s’est rendu au poste de police d’Ébène, le lundi 12 février, pour déposer une main courante (pre-measure) pour diffusion de fake news.
Repreneur
On nous a fait savoir que Silver Bank a déjà eu un repreneur, mais l’on ne sait pas si celui-ci prendra à sa charge tous ces milliards de pertes. On saura bientôt qui ce sera et si les réels propriétaires ne se cacheront pas derrière des sociétés écrans comme ce fut le cas avec le couple Gupta. D’ailleurs, il paraît qu’il y avait en fait d’autres personnalités derrière ou avec les Gupta…
Victime consentante
C’est un Indien, un certain Ritesh Chainani, qui préparait les documents de demande de prêts des sociétés de Prateek Gupta. Après le scandale Trafigura, il a pris tout son temps avant de disparaître en Inde. Le dossier était ensuite transmis au RM Rajiv Ramcharitar qui le remettait ensuite à un Credit Manager du nom de Yespal Pahladi. Celui-ci déposait la demande au Credit Committee présidé par le Géorgien Vasil Revishvili et composé de Tanuja Nair et deux autres Indiens, Sriram Jambhedkar et Mayur Somani. Ritesh Chainani et Yespal Pahladi siégeaient aussi sur le Credit Committee. Contactés au téléphone, les trois Indiens ne veulent pas commenter, Chainani nous confirmant cependant qu’il a quitté Silver Bank et le pays; Somani nous disant qu’il n’a jamais siégé sur le board de la banque ; et Jambhedkar qui se trouve lui aussi en Inde nous a juste dit «bonne journée» avant de raccrocher. Prateek Gupta et Vasil Revishvili n’ont pas répondu à nos appels et messages. Yespal Pahladi ne veut pas commenter, Rajiv Ramcharitar non plus. Tanuja Nair est en voyage et a promis de revenir vers nous.
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