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Exclusion de Sotravic

L’État sanctionne l’accumulation des déchets à La Chaumière

27 juin 2025, 13:00

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L’État sanctionne l’accumulation des déchets à La Chaumière

Par une lettre officielle datée du 21 juin, le ministère de l’Environnement, de la gestion des déchets solides et du changement climatique a annoncé l’exclusion de Sotravic Ltée de toute participation aux exercices d’appels d’offres du ministère pendant une durée de six mois. En raison ? Un manquement grave à ses obligations contractuelles dans le cadre de l’exploitation et de l’entretien de la station de transfert de La Chaumière et du transport des déchets vers le centre d’enfouissement de Mare-Chicose.

Dans cette lettre signée par le secrétaire permanent Beerachee, le ministère rappelle avoir mis en demeure Sotravic dès le 21 mai pour qu’elle remédie, dans un délai de sept jours, à l’accumulation de déchets au centre de La Chaumière, conformément aux termes du contrat.

Faute d’action suffisante, le ministère de l’Environnement a décidé d’activer la Section 35A de la Public Procurement Act, qui prévoit l’exclusion temporaire d’un opérateur défaillant des procédures publiques. Le ministère déplore une «défaillance persistante et significative» dans l’exécution des tâches assignées, notamment l’enlèvement des déchets, ce qui aurait permis une accumulation dépassant les seuils autorisés dans le contrat.

Sollicité pour réagir à cette décision, le ministère de l’Environnement a confirmé que la mesure s’imposait, en soulignant que «l’administration a agi en conséquence comme indiqué dans la lettre» en raison du «non-respect du contrat».

Malgré plusieurs tentatives, Sotravic Ltée n’a pas donné suite à nos demandes de réaction. Cette décision intervient dans un contexte tendu autour de la gestion des déchets dans le pays.

Le site de La Chaumière avait été le théâtre d’un incendie significatif dans la nuit du 5 au 6 novembre 2024. L’incendie s’était déclaré dans une zone de stockage temporaire non recouverte, où s’accumulaient plusieurs tonnes de déchets ménagers non traités. Les pompiers, épaulés par des équipes municipales, avaient mis près de 10 heures pour circonscrire l’incendie.

Le sinistre avait coïncidé avec un incendie d’une tout autre ampleur au centre d’enfouissement de Mare-Chicose, aussi géré par Sotravic, épinglée par Luxconsult, qui avait commencé le 6 novembre 2024. Ce deuxième feu avait dévasté plus de 42 000 m² de terrain. Les épais panaches de fumée, portés par les vents du sud-est, avaient été visibles jusqu’à Curepipe, Rose-Hill, et même signalés dans certaines parties de Black-River. Le ministère de la Santé avait alors recensé plusieurs dizaines de plaintes pour des maux de tête, toux sèche, irritations des yeux et difficultés respiratoires liés à la fumée.

Depuis des années, La Chaumière et Mare-Chicose sont sous surveillance en raison de leur niveau de saturation chronique. Mare-Chicose, unique site d’enfouissement de l’île, reçoit quotidiennement environ 1 300 tonnes de déchets, selon les données du ministère de l’Environnement. Ce volume dépasse largement sa capacité initiale, entraînant des risques accrus d’incendie, de lixiviats toxiques et de pollution atmosphérique.

Combustion

Le site de La Chaumière fonctionne comme une station de transfert intermédiaire : les déchets y sont déposés temporairement avant d’être acheminés vers Mare-Chicose. Tout retard dans ce transfert – comme cela a été le cas avec Sotravic – peut provoquer une accumulation incontrôlée, créant des conditions favorables à la fermentation, à la montée en température et donc à la combustion spontanée.

L’incendie de novembre 2024 à Mare-Chicose avait aussi mis en lumière les lacunes du dispositif de réponse aux situations d’urgence. Malgré la mobilisation rapide des unités des casernes de Port-Louis, Coromandel et Rose-Belle, l’intervention s’était révélée insuffisante. Les camions-citernes s’étaient heurtés à des routes d’accès encombrées et à l’absence de réserves d’eau à proximité immédiate du site.

En réponse à cette crise, le gouvernement avait annoncé, le 7 mars 2025, un plan de renouvellement des équipements de lutte contre les incendies dans les installations de gestion de déchets. Ce plan incluait l’acquisition de cinq nouveaux camions-pompes, la mise en place de points d’eau supplémentaires dans les stations de transfert, ainsi que la formation spécialisée du personnel opérant sur les sites sensibles.

Toutefois, les associations écologistes ont jugé ces mesures tardives et insuffisantes, soulignant l’absence de vision à long terme.

Le cas de Sotravic s’inscrit ainsi comme un révélateur des limites structurelles d’un système de gestion des déchets déjà sous pression.

Par K.S.

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