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Plainte constitutionnelle contre le DPP
Mᵉ Sanjay Bhuckory: «Les pouvoirs du CP sont dans la ‘Police Act’, pas dans la Constitution»
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Plainte constitutionnelle contre le DPP
Mᵉ Sanjay Bhuckory: «Les pouvoirs du CP sont dans la ‘Police Act’, pas dans la Constitution»
L’équipe juridique du DPP menée par le «Senior Counsel», Me Sanjay Bhuckory.
● Mᵉ Paul Ozin KC, avocat du CP, réfute : «Les charges provisoires concernent l’étape de l’enquête sur l’arrestation et la détention. C’est la province du CP».
La plainte constitutionnelle du commissaire de police contre le Directeur des poursuites publiques (DPP) a été débattue le mardi 19 mars devant le «full bench» de la Cour suprême, composé de la cheffe juge, Bibi Rehana Mungly-Gulbul, de la «Senior Puisne Judge» Nirmala Devat et de la juge Sulakshana Beekarry-Sunassee.
Les débats dans le conflit qui oppose le commissaire de police (CP), Anil Kumar Dip, au Directeur des poursuites publiques (DPP), Mᵉ Rashid Ahmine, ont porté hier sur des points de droit préliminaires soulevés par le DPP. Me Sanjay Bhuckory, Senior Counsel, dans sa plaidoirie, a maintenu qu’il n’y a aucun cas discutable sous l’article 71 de la Constitution qui confère des pouvoirs au CP. «Nous sommes dans un état démocratique et non dans un État policier où le CP veut importer la Police Act dans la Constitution.» Pour sa part, Mᵉ Paul Ozin King’s Counsel (KC), représentant le CP, Anil Kumar Dip, a demandé à la cour de trancher une fois pour toutes sur cette question afin que les pouvoirs de son client ne soient pas outrepassés.
À la fin des débats, qui ont duré toute la journée de mardi, le bench a mis en délibéré son jugement. Le CP Dip était présent durant toute l’audience, alors que le DPP Ahmine n’y était pas. L’audience s’est déroulée dans une salle bondée d’avocats, de pupils et même de supporteurs de Dip. Dès le départ, Mᵉ Bhuckory a fait remarquer que c’était la première fois qu’un CP demandait à la cour de déclarer que ses pouvoirs consistent aussi à loger ou annuler des charges provisoires et qu’il est «le seul maître à bord». Le Senior Counsel a qualifié cette situation de dangereux précédent. «Nous vivons dans un état démocratique et non dans un état policier.»
Le DPP avait demandé à la Cour suprême de rejeter la plainte du CP, soulevant trois points de droit pour appuyer sa requête. Notamment que la plainte a «manqué d’établir un fondement constitutionnel solide». Le CP, soutient le DPP, ne serait pas habilité à invoquer un recours constitutionnel sous l’article 83 de la Constitution pour deux raisons principales. D’une part, le CP aurait «omis d’épuiser les recours judiciaires alternatifs» ; et d’autre part, le CP a déjà opté pour des recours alternatifs. Mais ces recours sont toujours en cours et constituent, selon le DPP, «un abus de procédure». Selon le DPP, la requête du CP a été présentée tardivement, soit trois mois après «le présumé droit d’action».
(De g. à dr.) Me Ravi Yerrigadoo, Paul Ozin, King’s Counsel britannique, Anil Kumar Dip, et l’avouée Shamila Sonah-Ori.
Dans sa plainte, le CP demande à la Cour suprême de déclarer que le DPP «a usurpé ses pouvoirs». Cela concerne surtout les décisions de libérer sous caution Akil Bissessur, Bruneau Laurette, le couple Sherry Singh ainsi que Chavan Dabeedin. Or, dans ses arguments, Mᵉ Bhuckory a soutenu que les demandes du CP sont purement académiques car peu importe la décision de la Cour suprême, le jugement n’aura aucune incidence sur ces quatre cas. L’avocat a souligné que le CP a déjà saisi la justice pour ces affaires et qu’elles sont toujours à l’étude. Mᵉ Bhuckory a fait ressortir que le CP évoque ces quatre cas comme des illustrations et exemples pour démontrer que le DPP a entravé ses pouvoirs mais sans dire comment dans chaque cas précis.
Loi Importée
Le Senior Counsel a mis en avant le fait que la demande du CP sous l’article 83 de la Constitution pour demander un recours constitutionnel est infondée car ses pouvoirs sous l’article 71 de la Constitution sont intacts. Mᵉ Bhuckory a aussi souligné que le CP demande un recours constitutionnel sans même préciser comment la justice peut lui apporter réparation. Il a argumenté que les pouvoirs que le CP souhaite avoir se trouvent dans la Police Act et non dans la Constitution. «La Police Act a été créée en 1974 après l’indépendance et il n’y a pas eu d’amendement constitutionnel. Il s’agit d’une prétention autoproclamée dans la Constitution par le CP qui peut conduire à une situation dangereuse où les libertés ne seraient pas protégées par le DPP.»
L’avocat a également mis l’accent sur le fait que la Constitution donne au DPP des pouvoirs et non des droits, et que le CP ne peut venir contester ces pouvoirs exercés par tous ses prédécesseurs simplement parce qu’il n’est pas d’accord avec des décisions du DPP. Mᵉ Bhuckory a fait remarquer que le législateur a ses raisons de ne pas avoir donné ces pouvoirs au CP, mais uniquement au DPP.
Par ailleurs, il a attiré l’attention des juges sur le fait que cet aspect de la loi n’a pas été abordé dans la plainte et que c’est une tentative des défendeurs d’apporter de nouveaux éléments à l’affaire. Mᵉ Ahmine est représenté par les Senior Counsels, Sanjay Bhuckory et Narghis Bhundun ainsi que Mᵉˢ Sanjana Bhuckory, Vimalen Reddi, et Amira Peeroo.
«Un schéma répété»
L’équipe légale du CP est composée de Mᵉˢ Ravi Yerrigadoo, Sharmila Sonah-Ori, avouée, et du Britannique Paul Ozin, KC. Ce dernier a été catégorique dans sa plaidoirie que le DPP a fait une entorse aux pouvoirs du CP et estime que c’est une démarche délibérée du DPP d’usurper ses pouvoirs. «Le DPP a délibérément contredit à la position du CP dans des affaires en cours sur des cas de drogue sérieux et complexes. Il a libéré sous caution des suspects où le CP a objecté pour des motifs d’interférence avec les témoins.» Pour l’avocat britannique, les quatre cas mentionnés par le CP démontrent un «schéma répété» de la démarche du DPP pour outrepasser les pouvoirs du CP. Il estime que la cour doit une fois pour toutes trancher pour définir les pouvoirs de chacun. «Les charges provisoires concernent l’étape de l’enquête sur l’arrestation et la détention. C’est la province du CP. Si le DPP interfère dans cette province, les résultats ne seront pas les mêmes», a-t-il ajouté.
L’ICAC et le bureau de l’AG en faveur de DIP
L’ICAC et le bureau de l’Attorney General (AG) sont en faveur du CP. C’est également un «King’s Counsel», Me Mark Rainsford, qui a plaidé pour l’ICAC. Dès le départ, l’avocat a fait comprendre que, tel que suggéré par le titre de DPP, ses pouvoirs concernent les poursuites pénales. Il estime que les pouvoirs de ce dernier concernent uniquement les charges formelles et qu’avant ce stade, le DPP ne peut exercer ses pouvoirs. Mᵉ Dinay Reetoo, qui représente le bureau de l’AG, a abondé dans le même sens en faisant ressortir que la cour doit trancher car il y aura d’autres affaires similaires à celle de Bruneau Laurette ou d’Akil Bissessur qui seront portées devant la justice.
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