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Plumes engagées

Mai 1975 : L’éveil d’une conscience

19 mai 2025, 10:30

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Mai 1975 : L’éveil d’une conscience

Ramalingum Ersapah.

À l’heure du tout à l’image et du buzz sans suite,«l’express» souhaite faire découvrir la plume de poètes, de chanteurs, d’écrivains et de tous ceux qui jettent leur âme sur le papier, et qui mettent en mots des réflexions profondes.

En mai 1975, j’étais un adolescent de Form 3, assis sur les bancs du collège St Andrews à Rose-Hill. À cet âge, on est censé penser à ses examens, à ses amis, peut-être aux matchs de foot dans la cour de récré. Mais moi, j’avais déjà le militantisme dans le sang et dans l’âme. Quelque chose de plus fort m’appelait. C’était une époque troublée, mais vibrante, où les jeunes de Maurice commençaient à faire entendre leur voix avec une intensité nouvelle.


Ce mois-là, l’île Maurice a été secouée par une grande révolte estudiantine. Une jeunesse en éveil, qui ne se contentait plus d’accepter les règles imposées sans discussion. Le mouvement partait du cœur même des établissements scolaires et universitaires. Les revendications étaient claires : plus de justice, plus de droits, plus de respect pour les étudiants. Ce n’était pas seulement une crise de l’école, c’était le cri d’une génération qui voulait exister pleinement, dans une société encore marquée par des héritages coloniaux et des inégalités sociales criantes.


Je me souviens de cette marche comme si c’était hier. Des centaines de jeunes, venus de différents collèges, ont convergé à RoseHill. L’ambiance était à la fois électrique et solidaire. Malgré mon jeune âge, je savais que ce que nous faisions ce jour-là allait compter. Ce n’était pas une simple marche, c’était un acte de résistance, une affirmation de notre dignité.


Nous avons pris la route à pied, en direction de Grande Rivière. C’était un long trajet, ponctué de chants, de slogans, de discussions passionnées. Nous étions portés par une énergie collective, un sentiment de fraternité rare. Mais en arrivant au pont de Grande-Rivière, notre élan a été brutalement interrompu. Les forces de l’ordre nous attendaient. Leur présence était massive, dissuasive. Ils ont dressé une barrière humaine devant nous, sans dialogue, sans explication. L’ordre était clair : rebrousser chemin et briser notre plan!


Ce moment m’a marqué à jamais. Il y avait de la peur, bien sûr. Mais aussi une immense frustration. On nous faisait taire, on nous empêchait d’aller jusqu’au bout. Pourtant, quelque chose s’était réveillé en nous. Même si nous avons dû reculer ce jour-là, l’étincelle du combat ne s’est jamais éteinte.


Ce jour de mai 75 m’a appris que la jeunesse, même lorsqu’elle est ignorée ou réprimée, reste une force puissante. Ce fut mon premier vrai contact avec l’engagement citoyen, avec l’injustice, mais aussi avec l’espoir. Une graine avait été plantée en moi. Depuis, elle n’a cessé de grandir.

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Bio

Ramalingum Ersapah

Formateur, enseignant, stratège et animateur, il est un professionnel dynamique avec plus de 15 ans d’expérience dans le marketing, la vente, la formation et les médias. Pédagogue passionné, il a enseigné à la Middlesex University et maintenant à Vatel Maurice, où il se spécialise en management stratégique et en négociation interculturelle. En tant que directeur de Media et de Publications à la Global Rainbow Foundation, il œuvre bénévolement pour l’éducation inclusive et l’autonomisation des personnes en situation de handicap. Également animateurradio et leader communautaire reconnu pour ses interventions motivantes et son engagement civique, il a reçu quelques distinctions internationales pour son excellence en management, formation et ventes. Il aime pousser la chansonnette pendant ses moments libres et adore le karaoké.

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