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Rapport Lam Shang Leen

Me Coomara Pyaneandee obtient gain de cause au Privy Council

14 août 2024, 17:00

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Me Coomara Pyaneandee obtient gain de cause au Privy Council

Six ans après sa publication, le rapport de la commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ex-juge Paul Lam Shang Leen continue d’être contesté. Les Law Lords du Privy Council, dans un jugement de 30 pages rendu hier, ont tranché en faveur de Me Coomara Pyaneandee, qui demandait une révision judiciaire des passages le concernant. L’avocat, dont le nom figure parmi d’autres confrères cités dans le rapport, conteste les conclusions à son encontre, les qualifiant de «déraisonnables et irrationnelles».

Les Law Lords ont sévèrement critiqué la commission d’enquête pour son manque de transparence et d’équité dans le traitement du cas de Me Pyaneandee. Ils ont conclu que les allégations graves portées contre lui, de tentative de perversion de la justice et de protection de trafiquants de drogue, étaient basées sur des preuves insuffisantes et n’auraient pas dû figurer dans le rapport. Le Conseil privé a ordonné que ces passages, jugés préjudiciables et contraires aux principes de la justice naturelle, soient supprimés du rapport public.

Me Pyaneandee avait été convoqué par la commission, le 4 août 2017, pour s’expliquer sur des visites non sollicitées à des trafiquants de drogue en prison. À la publication du rapport, l’avocat a saisi la Cour suprême, sollicitant une révision judiciaire pour que les extraits le mentionnant soient retirés, arguant qu’il n’avait pas bénéficié d’un traitement juste. Les juges David Chan Kan Cheong et Karuna Devi Gunesh-Balaghee avaient rejeté sa demande, estimant que la commission n’avait émis que des observations sur ses agissements et non des conclusions. Celle-ci avait respecté les paramètres requis et n’avait pas traité l’avocat de manière injuste. Ils ont rappelé que seules des conclusions, et non des observations, peuvent faire l’objet d’une révision judiciaire.

Les Law Lords ont trouvé que les défendeurs, agissant au nom de la commission, avaient un devoir de transparence envers le Conseil privé. Ils étaient donc soumis à une «obligation très élevée de fournir au conseil des explications complètes et précises sur tous les faits pertinents pour la question à trancher». Cependant, malgré ces devoirs, le conseil s’est retrouvé à essayer de comprendre ce qui s’était exactement passé lors de l’audience devant la commission sur la base d’éléments de preuve insatisfaisants.

Par exemple, le Conseil privé ne savait pas (et n’a pas été informé malgré des demandes répétées) si la commission avait le dossier de l’interrogatoire de la MCIT de Me Pyaneandee en 2004 ou par la suite. Il s’agissait de faits simples qui auraient pu être facilement éclaircis par la commission. L’incapacité de Me Choo-Choy KC, représentant la commission, à répondre aux questions factuelles du Conseil l’a ainsi placé dans une position difficile.

Pas de simples commentaires

Ces allégations, qui ne sont pas de simples commentaires, ont fait ressortir les Law Lords, forment la base de la conclusion du rapport recommandant une enquête approfondie sur la conduite de l’avocat. «Il est identifié dans le rapport comme l’un des avocats suspectés d’avoir participé à des activités potentiellement illégales ou contraires à l’éthique. Le rapport suggère qu’il aurait tenté de pervertir le cours de la justice et de protéger des trafiquants de drogue. Bien que ces allégations ne soient pas présentées comme des conclusions, elles sont formulées de manière défavorable et sont susceptibles de déclencher une enquête policière approfondie», soulignent-ils.

De plus, poursuivent-ils, un préjudice considérable à la réputation professionnelle et au caractère d’une personne peut découler non seulement des conclusions d’une commission d’enquête, mais aussi des allégations ou commentaires défavorables contenus dans un rapport. Cela justifie que le rapport contesté puisse faire l’objet d’une révision judiciaire. Dans ce cas, indiquent les Law Lords, il ne fait aucun doute qu’un lecteur impartial considérerait les passages en question, lus dans leur ensemble, comme préjudiciables à la réputation et au caractère de Me Pyaneandee. «Les allégations sont présentées de ma-nière unilatérale, avec une référence brève ou incomplète à ses réponses, comme des accusations de conduite contraire à l’éthique et/ou criminelle, de nature sérieuse et prima facie. Pour cette raison supplémentaire, ces passages peuvent faire l’objet une révision judiciaire.»

Manque d’équité

L’équité dans cette affaire, insistent les Law Lords, exigeait que les preuves, allégations et opinions de la commission ne figurent pas dans le rapport sans que l’avocat ait d’abord reçu des copies du registre des visites juridiques, des déclarations de témoins et d’autres documents y relatifs. «Compte tenu des problèmes de vision de Me Pyaneandee, cette démarche était d’autant plus essentielle. Le comité reconnaît qu’une déclaration clairement formulée, communiquée à l’appelant à l’avance, exposant l’essentiel de chaque allégation, aurait pu suffire si le rapport avait été exprimé de manière plus équilibrée. De même, les déclarations de témoins, les documents ou un résumé des allégations fournis à l’audience auraient pu suffire si l’appelant pouvait les lire et les comprendre avant d’être interrogé. Le fait de ne pas lui avoir offert ces opportunités l’a désavantagé lors de son témoignage et constitué une violation des normes d’équité et de justice naturelle.»

Absence de preuves

Le Privy Council s’est aussi attardé sur le fait qu’il n’a pas reçu les preuves sur lesquelles la commission s’est appuyée pour accuser Me Pyaneandee de tentative de pervertir le cours de la justice ou d’avoir protégé des trafiquants de drogue. En l’absence de preuves probantes, ces allégations n’auraient pas dû apparaître dans le rapport. La Cour suprême avait conclu que l’avocat avait été correctement informé des questions le concernant et avait été confronté aux allégations des détenus concernés. Il avait eu l’opportunité de fournir des preuves orales.

Cependant, le conseil rejette ces conclusions et conclut que l’avocat n’a pas été informé de l’essentiel des accusations auxquelles il devait répondre ni n’a eu accès aux documents pertinents à ces allégations. «La commission n’a pas offert à l’appelant une véritable opportunité de fournir des preuves et de faire valoir ses arguments de défense. Pour toutes ces raisons, le Conseil accepte la position de l’appelant que les passages contestés du rapport peuvent faire l’objet d’une révision judiciaire. En outre, la procédure adoptée par la Commission n’était pas conforme aux principes d’équité et de justice naturelle.»

Le Privy Council a donc déclaré que les passages contestés, contenant des commentaires dans certains cas et des conclusions dans d’autres, mais tous conduisant à la recommandation d’une enquête approfondie sur Me Pyaneandee, publiés aux pages 232 à 233 du rapport de la commission d’enquête sur le trafic de la drogue, sont en violation des principes d’équité et de justice naturelle. Le Conseil privé ordonne donc que ces passages soient ignorés et qu’un lien vers ce jugement soit inséré à la page 232 du rapport tel qu’il est publié sur internet.