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Portrait

Nathalie Job : Incollable en statistiques et en leur décryptage

6 mai 2025, 16:30

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Nathalie Job : Incollable en statistiques et en leur décryptage

Nathalie Job, directrice associée d’Analysis Kantar et d’Analysis Management Institute. © Beekash Roopun

Cette année, le cabinet de conseil et de recherche de marché Analysis Kantar fête ses 30 ans. Une des personnes qui l’a rejoint à ses débuts, d’abord en tant que partenaire, puis en 1998 à plein temps, est Nathalie Job, l’actuelle directrice associée d’Analysis Kantar et de son centre de formation, l’Analysis Institute of Management. Nathalie Job est passionnée par les statistiques et leur décryptage. On peut même dire qu’elle est incollable sur ces questions. Son portrait en marge de cet anniversaire.

Nathalie Job est de nationalité française et mauricienne par naturalisation. Cette cadette d’une fratrie de trois enfants vient de l’Îlede-France, du grand Paris comme on le dit couramment. Ses parents, qui sont aujourd’hui à la retraite, exerçaient comme champignonnistes et cultivaient biologiquement et artisanalement des champignons de Paris dans des carrières.

Aimant étudier, Nathalie Job est détentrice de trois diplômes, une licence en techniques de commercialisation, obtenue auprès de l’université de Tours, et d’une double maîtrise, la première en science de gestion auprès de l’université de Montpellier où elle a d’ailleurs rencontré celui qu’elle a épousé, le Mauricien Alain Job, et la seconde en gestion des télécommunications et médias, obtenue auprès de l’université de Paris-Dauphine.

Elle a travaillé pendant un temps à Paris avant de venir rejoindre Alain Job à Maurice et de l’épouser. Vu le manque de débouchés dans sa spécialisation, elle a dû l’abandonner au profit d’un emploi au sein du département conseil de KPMG/Wilton, dirigé par feu Pierre Yin. Quand ce dernier a quitté la boîte, celle-ci a été rachetée par Price Waterhouse. Nathalie Job est restée, agissant en tant qu’analyste et manager de projets.

Elle s’est laissé débaucher par le groupe Roland Maurel et son rôle était alors d’examiner et d’évaluer la viabilité de certains projets, notamment hôteliers. Quand le cabinet Analysis est créé en 1995 par Brigitte Masson, le sociologue feu JeanClaude Lau Thi Ken, l’analyste Mohamed Mouratsing et Jérôme Boulle, elle les rejoints en 1998 en tant que chargée d’études. Là, elle s’est sentie complètement dans son élément. «J’ai toujours adoré les statistiques et le décryptage de l’information.» L’équipe a mené plusieurs études sociales, reprises par les médias. Plusieurs membres fondateurs d’Analysis sont partis et, en l’an 2000, Nathalie Job et Mohamed Mouratsing ont été les seuls à rester. Analysis n’avait pas encore trouvé sa vitesse de croisière.

🟦Market intelligence

C’est en 2005 que ce cabinet l’a trouvée, notamment à travers l’affiliation avec le précurseur de Kantar, soit Research International, le géant des études de marché et qui est très sélectif sur ses affiliés car il n’en a que quatre dont Analysis. Kantar a apporté au cabinet mauricien non seulement une reconnaissance internationale mais aussi des outils, des formations, des modèles d’analyses différents, du market intelligence, des échanges avec des bureaux à l’international. «La force de Kantar est qu’il développe ses propres analyses basées sur des recherches universitaires. Kantar est venu renforcer notre structure et nous a permis de mener des études sociétales, de consommation et médias plus poussées. Cette affiliation nous a aussi permis de faire des analyses sur les marques de consommation et d’obtenir des benchmarkings avec la région et l’international. Nous avons pu travailler avec La Réunion, Mayotte et des pays africains. Cette affiliation nous a donné une ouverture sur le monde et une plus grande dimension que nous essayons d’apporter à nos clients.»

Qui dit affiliation ne dit pas perte d’indépendance. «Nous avons fait des études sociales et des audits du genre et nous avons tout un département certifié du Bureau International du Travail.» Avec Business Mauritius, Analysis a aussi mené des études, notamment sur les inégalités du genre et la violence sur le lieu de travail. Comme temps forts durant ces 30 ans, Nathalie Job cite le développement de son centre de formation, l’Analysis Institute of Management (AIM), dont la Managing Director est Kaushal Ramlackhan. En partenariat avec l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris-Sorbonne et l’université de Paris-Dauphine, l’AIM a lancé, depuis 2006, à l’intention des cadres de Maurice et de la région, une formation menant à la maîtrise en administration des affaires (MBA), qui en est à sa 19e promotion, une autre en 2015 débouchant sur un master en marketing, et en 2017, une formation avec, à la clé, un master en finances. Les intervenants pour ces formations sont tous des étrangers. «À ce jour, l’AIM compte 600 Alumni.» Aujourd’hui, Analysis Kantar et AIM c’est 28 personnes et une quinzaine de téléenquêteurs et d’auditeurs opérant en freelance.

Autre moment important pour l’AIM et par conséquent pour le cabinet a été le lancement, en 2021, du Campus Créatif, soit une formation développée de concert avec Rubika, école française, classée dans les dix premières mondiales, assurant une formation en art, gaming, design et cinéma d’animation pour les jeunes qui ont du talent. Formation débouchant sur une licence. Ces cours, coordonnées par l’artiste Laëtitia Lor, sont animés par des intervenants locaux et s’étalent à Maurice sur deux ans. La dernière année s’effectue, au choix, à Rubika Canada, Rubika Valenciennes en France ou à La Réunion.

🟦De la rhétorique à l’action

Analysis Kantar a récemment réalisé une étude sur un échantillonnage de 800 employés des secteurs public et privé pour connaître leurs attentes au niveau professionnel. L’idée derrière, explique Nathalie Job, est de voir si les employeurs vont au-delà de la rhétorique et font vraiment tout ce qu’il faut pour retenir leurs employés. «On s’est dit qu’on allait creuser l’état mental des employés et le partager avec nos partenaires pour savoir où ils se situent et aider les entreprises à réfléchir sur des stratégies internes et externes. Cette étude nous a permis de nous nourrir en même temps.» L’étude, destinée aux dirigeants d’entreprise, aux collaborateurs et à ceux travaillant dans les départements des Ressources humaines des entreprises, sera présentée le 8 mai chez Analysis Kantar, à Ébène, et sera suivie d’une table ronde (voir encadré et en p.12).

Sans en dévoiler les grandes lignes, cette maman de trois enfants aujourd’hui adultes – Noémie, 32 ans, consultante en droits humains et durabilité, Timothée, 27 ans, démographe, et Ophélie, 20 ans, designer, qui complète ses études aux Beaux-Arts – déclare qu’aujourd’hui, on ne peut plus considérer les employés comme des ressources humaines et qu’il faut les envisager comme des collaborateurs. «Une personne ne peut pas être considérée que sur son côté utilitaire. Une personne est un être humain. Il faut la considérer comme tel. On veut essayer de mettre l’humain au cœur des décisions internes et externes.» Elle ajoute que l’autre côté, les responsables d’entreprises ont de grosses lacunes «À l’école, on ne nous apprend pas à écouter l’autre, à le gérer, à gérer les conflits. Il y a aussi des replis. Il y a tellement à faire dans le domaine de l’humain.»

Nathalie Job précise qu’elle est bien entourée. En sus de Mohamed Mouratsing, qui est directeur associé et de Kaushal Ramlackhan, elle a comme directeurs associés : Virginie Villeneuve, spécialiste des stratégies de communication et de développement pour les entreprises, Katouskia Sawmy, experte en méthodologies d’études et responsable des ventes, Soraya Foondun, ILO Certified Gender Auditor et directrice associée d’études, et Soondaram Lutchmanen, directeur associé en études. «C’est une équipe assez incroyable, ma dream team et je suis très fière d’elle.»

🟦Respecter les règles

Analysis Kantar reçoit des demandes de sondages politiques mais ce cabinet les refuse. D’abord parce que Kantar en Grande-Bretagne a des structures distinctes pour cela et ensuite, «pour que ce soit fiable, il faudrait un échantillonnage représentatif dans chaque district. Ce qui ferait un énorme échantillonnage et occasionnerait des coûts élevés.»

Avant de quitter Nathalie Job, nous lui demandons de commenter, eu égard à l’actualité récente, comment une entreprise d’analyse qui aurait recueilli des données sur les réseaux sociaux, a pu se planter et être totalement à côté de la plaque par rapport à la réalité politique. Nathalie Job réplique qu’aujourd’hui, le data sur les médias sociaux est plutôt utilisé pour faire de l’influence. «Pour obtenir un résultat fiable et précis, il faut suivre et respecter les règles de la statistique. C’est sûr qu’il y a des impondérables et des variations dans le temps mais il faut savoir qui interroge, quand, comment et ensuite comment se fait l’analyse. Il faut respecter les règles de toutes ces étapes…»

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