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Omesh Ramchurn, «hér-eau» d’un nouveau genre
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Omesh Ramchurn, «hér-eau» d’un nouveau genre
Il éprouvait des émotions mitigées lorsque nous l’avions rencontré: colère, détermination et désolation, mais aussi soulagement de pouvoir nous parler. Dans le village de Panchvati, près de Rivière-du-Rempart, les habitants luttent depuis plus de sept mois pour un approvisionnement minimum en eau. Ils ont poussé leurs cris du cœur, sous couvert de l’anonymat, lors de notre reportage publié le 10 décembre, car la plupart d’entre eux étaient conscients que «la liberté d’expression dans ce pays entraîne des représailles». Mais Omesh Ramchurn se disait «prêt à affronter tout obstacle s’il le faut pour que les autorités se réveillent». Il n’a pas changé d’avis depuis… D’ailleurs, le 30 novembre, une vidéo qu’il avait diffusée sur Facebook alors qu’il lavait son linge sale au bureau de la Central Water Authority (CWA) sis à Nicolière a été visionnée par des milliers de personnes…
Marié et père de deux garçons, dont un enfant de trois ans, ce mécanicien de 42 ans, qui travaille dans une entreprise privée, est «un simple citoyen qui n’a rien à voir avec la politique mais qui ne tolère pas n’importe quoi». Il consacre une partie de son temps libre à des travaux de métallerie pour gagner quelques sous et se dévoue pour sa famille. De grande taille, musclé, calme mais déterminé, l’homme n’en démord pas. «Même le mécanicien a besoin d’eau pour boire et se laver lorsqu’il rentre chez lui, épuisé, après avoir travaillé dur pour nourrir ses enfants. Il est inacceptable de mendier pour quelque chose d’aussi élémentaire», lâche-t-il. Pourtant, les régions avoisinantes du village de Panchvati et les usines, dont une récemment construite, ont de l’eau courante en permanence.
«(…) Parfois, nous avons droit à un filet d’eau entre 2 heures et 5 heures du matin. Des fois, rien du tout. Nous passons toute la nuit à attendre pour remplir des barils, des fûts, des bidons. Sinon, nous devons aller en chercher au temple voisin, qui est situé près d’une des usines, le long de la route principale. La voie n’est pas éclairée. Nous faisons des va-et-vient en voiture. D’autres marchent pendant 30 minutes le long de la route principale ou coupent à travers le champ de cannes dans l’obscurité …» confiait Omesh.
Le jeudi 30 novembre, c’était la goutte de trop. «Mon enfant est tombé malade, il a eu de sérieuses éruptions cutanées sur son postérieur parce que lorsqu’il a fait ses besoins, nous n’avons pu utiliser que des lingettes pour bébé pour l’essuyer. Nous n’avions pas d’eau pour lui donner un bain (...) pour faire la vaisselle, pour rester propres, pour laver les vêtements, pour cuisiner. Je l’ai conduit chez le médecin. À mon retour, j’ai décidé que j’en avais assez…»
Confiant qu’il en avait marre de l’inaction des autorités ainsi que des élus de la circonscription, Omesh Ramchurn avait alors décidé de prendre ses vêtements et s’est rendu avec sa femme et son bébé au bureau de la CWA à Nicolière, où il a utilisé l’eau des locaux pour laver ses vêtements… Tout en diffusant cela sur Facebook, pour dénoncer l’inaction des autorités. Son action a été saluée par de nombreux Mauriciens, qui n’ont pas hésité à ironiser : «Le gouvernement ne nous avait pas promis de l’eau 24/7 mais des robinets 24/sek.»
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