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Kronik KC Ranzé
On patauge, on patauge…
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Kronik KC Ranzé
On patauge, on patauge…

Contrairement à ce qui se faisait jusqu’au 10 novembre, quand, insistait-on, du moins à l’officiel, «tout va très bien», au pays «madame la marquise», il est clair que les ‘nouvelles’ qui émanent du nouveau gouvernement depuis la fin de l’année dernière illustrent au moins du contrasté.
Un point capital ici c’est que si l’on peut, localement et pour un temps, mettre carrément tout ce qui va mal sur le dos du gouvernement sortant et ses préposés, il est beaucoup plus difficile de le faire pour les interlocuteurs et les observateurs étrangers. En effet, si initialement les représentants du FMI, de l’OCDE, de la BM, de Moody’s ou des pays étrangers ayant une présence diplomatique à Maurice peuvent identifier les individus responsables du pays jusqu’en 2024, c’est le pays tout entier qui portera l’opprobre et qui devra gérer les péchés qui émergent maintenant ! Aucun rapport circonstancié du FMI ou de Moody’s ne fera trop la distinction de QUI, individuellement, est responsable et, selon le principe de la continuité de l’Etat, ils se contenteront très probablement de décrire la situation du PAYS. C’est inévitable. Il faut en être conscient.
Ainsi va le monde et ce sera à ces agences extérieures de regarder les nouveaux dirigeants du pays dans les yeux, de constater la sincérité de leur approche, ayant notamment publié un State of the Economy révélateur de tricheries et de cachotteries diverses, de jauger la pertinence et la bonne foi des réformes proposées et de décider en conséquence.
En attendant, notre image internationale est certainement ternie par le tripatouillage des statistiques nationales, par l’interpellation du dernier gouverneur de la Banque centrale, de celle, annoncée, du dernier ministre des Finances et d’autres nouvelles du même acabit, que certains caractérisent d’ailleurs de «chasse aux sorcières».
Parenthèse.
L’expression «chasse aux sorcières» dénote, à la base (on peut citer le cas notoire de Salem), une situation où l’on accuse quelqu’un(e) de sorcellerie, alors qu’il n’y a, en vérité, rien de la sorte (*). C’est une expression qui est, par contre, utilisée de plus en plus libéralement maintenant par des accusés pour passer le message d’une injustice délibérée, d’un harcèlement abusif et immérité dans des cas où… il y a bien, effectivement, eu un crime, voire de la sorcellerie !
Cette expression est ainsi devenue un code pour donner le change et brouiller les pistes ! C’est comme cela, par exemple, que Donald Trump a qualifié les divers procès qu’il a confrontés de «witch hunt», cependant qu’il a bien été condamné trois fois l’an dernier, la première dans l’affaire d’abus sexuel de E Jean Carroll (5m $ pour l’abus sexuel, 83 m $ pour la diffamation), la deuxième étant une affaire d’estimation frauduleuse de la valeur de ses actifs pour tromper ses financiers (355 m $ plus intérêt, en appel) et la troisième étant le cas de «hush money» pour payer Stormy Daniels (où il a été dûment condamné depuis mai 2024, alors que la sentence du 10 janvier 2025 lui a cependant évité la prison ou autres punitions).
Dans le cas des Rs 45 millions décaissés par la MIC, il est pour le moins sidérant que le conseil d’administration d’une filiale de la Banque centrale ait été convaincue, après un refus initial d’un dossier plus important, de sanctionner un «equity investment» de 1 million de dollars le 17 octobre 2024 dans Menlo Park Ltd, compagnie sœur de Pulse Analytics, alors que cet investissement était considéré de catégorie 5 sur leur propre échelle de risque ! La MIC imposait certes de nombreuses «conditions précédentes» au décaissement, mais celles-ci n’ont été que partiellement satisfaites, au moment du déboursement, les conditions non satisfaites étant, nous dit-on, soudain devenues des «conditions subséquentes» ! En parallèle, les analyses politiques qui sont publiées par Pulse Analytics se feront, contre-intuitivement à ce qui est alors enregistré sur le terrain, de plus en plus favorables à l’alliance Lepep. Cette coïncidence pourrait peut-être encore s’expliquer, aucun ‘sondage’ ne pouvant jamais prétendre pouvoir prédire l’avenir, mais sûrement pas sans détruire fondamentalement les prétentions de la méthode Pulse qui traque «l’effervescence» sur la Toile. Par ailleurs, la précipitation avec laquelle environ 10 des Rs 45 millions décaissés auraient apparemment été dépensés en hôtels de luxe à Dubaï, en shopping divers, et en billets d’avion de première classe, ne facilitera pas l’équation de Menlo non plus. «La vérité sortira très bientôt» avait déclaré Stephane Adam à la presse cette semaine et c’est en effet tout ce que demande la population. La vérité !
Quant au degré de responsabilité des divers intervenants dans la prise de décision à la MIC : l’homme politique Padayachy, le gouverneur Seegoolam, les directeurs du conseil d’administration, le Credit Committee, le CEO Bissessur, chacun devra assumer sa part de responsabilité. On ne peut que noter, une fois encore, combien il est important de ne pas obéir aveuglément à un ordre venu «depi lao», si, en toute conscience, on n’est pas d’accord avec ou si cet ordre ne respecte pas les normes usuelles ou établies. Il y a toujours des alternatives et des recours pour contourner des ordres insensés. Surtout s’ils ne sont pas formalisés par écrit… et même là….
Comment est-ce que ceux qui ont donné l’ordre/favorisé d’approuver, puis de décaisser ce petit million de dollars ont-ils pu croire que leurs directives allaient être sans conséquence ? Croyaient-ils, à ce point, que la victoire électorale serait de leur côté et qu’ils pouvaient donc espérer contrôler le dossier, comptant sur le silence de tous ceux qui s’étaient jusque-là compromis ?
L’affidavit annoncé des Adam va ajouter à l’équation politico-financière. C’est leur part de vérité. La saga n’est, de toute évidence, pas terminée !
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Soyons clair et net.
Les réserves brutes de devises ne sont qu’UN indicateur parmi de nombreux autres de la santé économique du pays. Sinon, on n’aurait pas besoin de 45 pages pour RESUMER The State of the Economy du pays. Sinon, le Country Report No 2024/139 du FMI n’aurait pas besoin de s’étaler sur 74 pages pour évaluer notre économie. Sinon, le site web de la Banque centrale serait bien moins fastidieux à lire. Se référer à ce seul critère, comme le fait le MSM, pour prétendre à la conclusion que «l’économie est en bonne santé» est pour le moins, téméraire ! Certains hurluberlus vont alors même jusqu’à citer les 402 milliards de ‘réserves’ comme permettant le 14e mois pour tous ! Et bien plus !
Les ‘réserves’ brutes de devises du pays comprennent les dépôts de devises exigés par la BoM des banques commerciales locales, (des montants dont le pays ne peut donc évidemment pas disposer librement) ainsi que les devises découlant d’emprunts divers contractés auprès de banques internationales. Les réserves nettes de devises du pays seraient, ainsi, bien plus réalistes (environ 1,5 milliards de $ en moins ?), mais elles ne se publieraient apparemment jamais à l’officiel, nulle part au monde. Ce qui est certain, c’est que ces réserves ne peuvent qu’augmenter artificiellement (emprunts, dépôts, dévaluation), puisque nous dépensons bien plus de devises à l’étranger (importations, investissement, remboursements) chaque mois, que nous n’en gagnons (exportations, tourisme, FDI, transferts de la diaspora…). C’est ça le point crucial ! Les ‘réserves’ VONT fondre si rien ne change…
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Ai-je bien lu ?
Selon leur syndicat, les employés des Casinos de Maurice, «déjà fragilisés par des années d’endettement… font face à une nouvelle crise» ! Il y aurait de moins en moins de clients… ! N’est-ce pas aux casinos qu’une convention collective a intronisé le paiement d’un bonus sous forme de 14e mois depuis… 2019 ? Qui aura finalement coûté Rs 68 millions à la SIC vers la fin de l’année dernière ? De quels endettements peut-il s’agir ? Qui est en mesure de redresser ces temples du jeu aujourd’hui concurrencés fortement par l’internet ?
Les casinos, cela n’aurait jamais dû être l’affaire du gouvernement ! C’est une activité pour spécialistes. Même pas Trump ! Il fallait vendre il y a longtemps.
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Ce n’est peut-être pas encore Sodome et Gomorrhe, mais la petite actualité locale fait peur : un père qui aurait tué sa petite fille à coups de pied sans le réaliser, ayant fumé du synthé ; des trafiquants de drogue partout ; les occupants d’une voiture à la sortie de Flic-en-Flac agressés au sabre, ‘par erreur’ ; des violences domestiques à la claque, au couteau ou au tournevis ; le viol d’une septuagénaire ; une enfant de 7 ans abreuvée de pornographie par une ‘ma tante’ ; des employés qui ne reprennent pas le travail, qu’ils aient touché un 14e mois ou pas ; un contrôleur de bus agressant une handicapée ; les dossiers jaunis et racornis de la sécurité sociale à Rose Hill ; ça en fait vraiment un peu trop pour ma semaine…
Où trouve-t-on du baume ?
(*) Le terme «witch hunt» lui-même, avec cette signification particulière, ne date que de 1853. Les procès de Salem datent de 1692/93. 19 accusés furent pendus à tort. Des dizaines de milliers de fausses sorcières périrent sur environ 300 ans, jusqu’au 18e siècle.
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