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On votera probablement contre – mais contre quoi exactement ?

12 octobre 2024, 07:40

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Les élections, une histoire de chiffres et de visages, de castes et de pressions autour d’un ticket-sésame. Commençons par les chiffres. Avec 1 002 857 électeurs inscrits pour ces législatives 2024, ce record retient notre attention. Pourtant, certains tentent de manipuler l’opinion publique en s’appuyant sur des rassemblements de meetings ou de réunions nocturnes qui, au final, ne séduisent guère plus que… 1 ou 2 % de notre corps électoral.

La courbe de notre électorat suit une pente régulière : 307 683 inscrits en 1967, 462 034 en 1982, 552 154 en 1995, 779 637 en l’an 2000 et 879 897 en 2010. Les partis, eux aussi, se multiplient : 74 hier, contre seulement huit en 1967 et 15 en 1983. Voilà le signe d’une démocratie qui bruisse de vie, même si (nous le savons tous) la bataille, à cause de notre système électoral inique, restera une affaire de duels bipolaires. Un affrontement bipolaire où s’opposent, d’un côté, ceux qui se parent de «changement», tout en étant en racinés dans les mêmes habitudes depuis des lustres, et de l’autre, ceux qui clament être avec «Lepep» depuis 2014.

Mais là où les chiffres restent figés, c’est sur le terrain de la représentation féminine, malgré les promesses maintes fois répétées de nos leaders politiques. Les deux blocs principaux peinent à atteindre les 12 % de candidates, trahissant un manque flagrant de volonté politique, voire un dédain des engagements pris envers la SADC et l’ONU. Pourtant, les femmes représentent plus de 50 % des électeurs. Ailleurs en Afrique, où sou vent nous prétendons être à la pointe, le contraste est saisissant : le Rwanda, le Mozambique, l’Afrique du Sud, l’Angola et l’Algérie ont déjà franchi la barre des 30 % et continuent leur marche vers une parité réelle dans les instances de pouvoir.

Et si les femmes peinent à gravir les échelons, les mêmes noms, eux, s’ancrent au sommet de la scène politique. En 1982, Anerood Jugnauth, alors fringant quinquagénaire, et Paul Bérenger, quadragénaire à la moustache noire, ferraillaient pour destituer l’octogénaire sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR), alors âgé de 82 ans. Aujourd’hui, Bérenger, à 79 ans, ambitionne toujours la vice primature, tandis que le fils de SSR, lui même septuagénaire, rêve de reconquérir les coffres du Trésor. Autour de ces deux immuables, de vieux et jeunes dinosaures et quelques jeunes et vieux papillons applaudissent cette longévité sans fin.

Avec de tels chefs de file, le renouvellement de la classe politique semble un mirage. La moyenne d’âge des candidats des deux alliances dominantes dépasse les 50 ans, alors qu’elle n’était que de 43 ans en 1991. Un fossé s’élargit ainsi entre nos leaders et une jeunesse apolitique ou indécise. Ces derniers jours, on a vu comment des candidats identifiés par des chefs avec des lunettes sectaires peinent à parler en public.

Tandis que les uns calculent leurs alliances pour s’accrocher au pouvoir, les autres se détournent de la politique. Un sondage LSL/DCDM, mené entre le 15 et le 31 octobre 2014, montrait que le plus grand bassin électoral – 39 % – était celui des indécis, bien au-delà des sympathisants du PTr (28,8 %), du MMM (11,8 %) et du MSM (7,7 %) à un mois des élections. Les indécis ou flottants sont encore plus nombreux et pourraient toiser la moitié du corps électoral si l’on ajoute ceux qui ne croient plus au système actuel qui disqualifie plus de 70 % de Mauriciens pour la plus haute fonction de l’État.

Les élections s’annoncent serrées, si l’on en croit nos journalistes qui sillonnent inlassablement les 21 circonscriptions. Le terrain parle beaucoup tant qu’on se donne le temps de l’écouter et de l’analyser. L’usure du pouvoir semble palpable, mais l’alternance n’offre guère de pers pectives de renouveau. Le 10 novembre, l’on votera probablement contre – mais contre quoi exactement ?