Il était une fois, dans une cantine scolaire, une centaine d’élèves cogitait. La plupart voulait un changement, ayant marre de voir les mêmes légumes et condiments dans leur assiette chaque jour qui passe.

Pourtant le riz (basmati) frit au poulet congelé aux petits pois verts en conserve et carottes fraîches et hachées servi à midi n’était pas mauvais. À force de faire la même chose tous les jours, le chef cuisinier était même devenu excellent : le riz restait en grain mais n’était jamais cru, les carottes et les petits pois s’exhibaient fièrement sous quelques lamelles d’omelette et quelques queues d’oignons et de coriandre fraîchement arrachées du jardin. Pour varier le goût, on proposait tantôt du Mazavaroo rouge ou du piment écrasé (tantôt petits piments tantôt gros piments, dépendant du prix et de la saison).

Parmi la centaine d’étudiants, au moins 80 se plaignaient quasiment tous les jours qu’il fallait offrir des plats différents au lieu du riz frit maison. Par contre, les 20 autres étaient contents de manger leur riz frit en alternant la quantité de piments et de sauce à l’ail. Les 80 restants voulaient consommer autre chose que du riz frit.

Le responsable de la cantine, un démocrate pur et dur, a proposé un vote pour déterminer le menu ; le plat qui obtiendrait le plus de voix serait cuisiné ce jour-là et les jours suivants, en attendant le prochain vote.

20 étudiants qui aimaient leur riz frit ont voté sans hésiter pour leur plat favori – ce sont sans doute ceux qu’on appelle des ‘diehards’. Les 80 autres ont voté comme suit :

15 - omelette au fromage et du pain grillé

19 - Dal puri Zorro et curry saumon/ salade de concombre

16 - Farata feuilleté et poulet en curry plus salade de laitue

13 - Pain maison, beurre et fromage d’Australie et confitures de Rodrigues

2 - Mine Apollo, œuf miroir, chutney de pommes d’amour et bouillon crabes

15 - Riz blanc, margoze frit, pipengaille, chop suey de soya ou poulet haché et bouillon de cresson, chatini coco.

Ainsi, selon les résultats, le riz frit obtient le plus grand nombre de voix et demeure au menu de manière inamovible tous les jours.

Morale de l’histoire :

Tant que 80 % de la population reste égoïstement divisée et dispersée, 20 % resteront aux commandes dans la cuisine ! Les cyniques du pays vous diront : au moins personne ne crève de faim !

Mais la morale de cette histoire va plus loin que le simple besoin de vivoter. C’est une leçon sur l’importance de l’unité et de la coordination dans les prises de décision collective. Elle met en lumière comment une minorité peut prévaloir sur une majorité lorsque celle-ci est désorganisée et divisée. En contexte électoral, cela souligne l’importance pour les électeurs de réfléchir stratégiquement et de se rassembler autour de candidats ou de propositions communes pour éviter que leurs voix soient diluées et que des intérêts minoritaires ne dictent les résultats. La morale incite chacun à réfléchir sur son choix de vote pour s’assurer que ce dernier contribue efficacement à la représentation de ses préférences et intérêts principaux dans les décisions collectives. On ne peut, évidemment, pas tout avoir à la fois !

Pensez-y avant de voter... !

Cette histoire d’apparence anodine qui circule dans certains réseaux illustre, à bien des égards, ce qui se passe ou risque de se passer chez nous quand l’on se rendra, ou pas, aux urnes.