Les résidents de l’île principale de la République de Maurice et la diaspora éparpillée dans le monde n’auront pas manqué de partager la joie des Rodriguais quand ils ont accueilli leur nouvel évêque en la personne de Michel Moura. Ce dernier a été nommé vicaire apostolique de Rodrigues par le pape François le 20 décembre 2023.

L’ordination épiscopale du nouvel évêque qui a eu lieu le 19 mars à la mythique cathédrale St Gabriel a vu la participation du Premier ministre du pays de même que de son épouse, Kobita Jugnauth. C’est pour dire que la République de Maurice n’a jamais été aussi unie par des liens historiques. Que de chemin parcouru depuis les élections générales de 1967 avant l’accession du pays à l’Indépendance. Les deux candidats du PMSD à Rodrigues en 1967 avaient recueilli 96,89 % et 96,34 % des voix. Sur les 7 061 votants à Rodrigues, le seul candidat officiel travailliste avait obtenu 83 voix, soit 1,17 % du suffrage. Et de dire qu’après les élections de 1976, les deux élus du PMSD à Rodrigues permirent à sir Seewoosagur Ramgoolam, soutenu par Gaëtan Duval, de rester au pouvoir avec une majorité de… deux voix face au MMM.

Sur le plan politique, Rodrigues donna lieu à bien d’appréhensions à Port-Louis. À un certain moment de l’histoire, on avait exprimé des craintes qu’après avoir ‘perdu’ les Seychelles et les Chagos, Maurice allait aussi assister au départ de Rodrigues devenue un département d’une puissance étrangère ou tout simplement une entité indépendante.

L’élévation de Rodrigues au statut d’entité autonome a finalement aidé dans une grande mesure à rapprocher les deux principales îles de la République. Cette période a aussi vu un fort accroissement des échanges entre les deux îles.

L’histoire retiendra la contribution déterminante de Serge Clair, le leader historique de l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR), de Paul Bérenger, d’Antoinette Prudence et de Robert Ahnee dans l’édification de Rodrigues autonome. Grand amoureux de Rodrigues, sir Anerood Jugnauth qui visitait l’île régulièrement en compagnie de son épouse Sarojni avait des appréhensions, au début, quant aux conséquences éventuellement désastreuses de l’autonomie. Mais sir Anerood finit par soutenir cette élévation dans le statut de Rodrigues, au grand plaisir de Serge Clair. On se souviendra du mauvais tour joué à Serge Clair après les élections de 1983 quand le gouvernement MSM-PTr-PMSD nomma France Félicité ministre de Rodrigues et non pas le leader historique de l’OPR qui avait occupé ce poste après le 60-0 de 1982.

Tout comme son prédécesseur, Navin Ramgoolam se garda lui aussi de s’immiscer dans les querelles politiques internes de Rodrigues. Navin Ramgoolam pouvait par exemple réaliser l’exploit de se rendre en la résidence de Serge Clair à Mont Lubin pour prendre une tasse de thé. Et par la suite, accueillir à son hôtel, dans un cadre débordant de bonhomie, tous les dirigeants des partis opposés à Serge Clair, ce dernier ayant été informé de cette rencontre par le PM mauricien. D’ailleurs, comme pour partager l’immense fierté qu’éprouvent les Rodriguais pour la cathédrale St Gabriel, Navin Ramgoolam, lors de son dernier déplacement officiel à Rodrigues, avait tenu à visiter cet édifice remarquable unique en son genre dans l’océan Indien. Une cathédrale bâtie après que des Rodriguais eurent transporté sur leurs épaules, en parcourant de longues distances dans la broussaille, les pierres utilisées pour son édification.

Sur la base des données actuelles, il existerait un fort potentiel pour une augmentation exponentielle dans les échanges entre l’île principale et Rodrigues. Toutefois avec un service maritime problématique et Air Mauritius gérée par des amateurs, il faudrait attendre longtemps avant que ‘Mauriciens’ et Rodriguais voyagent entre les deux îles sans contrainte de moyens physiques. Il faudrait surtout donner aux Rodriguais des moyens sûrs et abordables pour qu’ils puissent expédier vers l’île principale leurs différentes catégories de piments, des légumes variés, des fruits dont des limons, du poisson frais et surtout de l’‘ourit sek’.