Publicité
Pour réflexion
Le monde ne va pas bien.
Prenez la situation de notre grand voisin d’à côté, l’Afrique du Sud. Longtemps handicapé par l’apartheid et ses horreurs très particulières, ce pays se libère en 1994 après des négociations salutaires entre Nelson Mandela, longtemps prisonnier à Robben Island, et F. W de Klerk ; et les premières élections vraiment nationales qui donnent les rênes du pouvoir à l’ANC.
La joie est immense et les espoirs sont alors grands, d’autant plus que Mandela réussit l’incroyable en mobilisant toute la nation dans son devenir, alors que la revanche et la violence, style Julius Malema, ou Eugene Terre’Blanche, menaçaient ! L’ANC au pouvoir essaie alors de défaire les décennies d’injustice sociale de l’apartheid. Les écoles se démocratisent, les compagnies se doivent d’employer plus de Noirs aux postes de responsabilité, on construit des logements sociaux et même le rugby s’ouvre aux autres ! Cependant, on néglige, par ailleurs, des investissements clés, comme dans la qualité de l’éducation nationale ou à Eskom et, en parallèle, la corruption s’installe pour ceux au pouvoir et mine de plus en plus la nation. Résultat ? L’inégalité est aujourd’hui pire que sous l’apartheid, nous disait la Banque mondiale, en 2021.
Le pic absolu du dévergondage et de la corruption est atteint avec Jacob Zuma, au pouvoir entre 2009 et 2018 et au terme duquel il est forcé de démissionner face à des accusations précises de corruption. Même l’ANC le lâche. Durant cette période, il est estimé par son successeur, Ramaphosa, qu’environ 34 milliards de dollars «disparaissent». C’est aussi durant son mandat que l’on évoque le state capture des frères Gupta, aujourd’hui en fuite à Dubaï où ils ont été «arrêtés» en juin 2022, mais duquel pays l’extradition a été refusée en avril 2023 ! Zuma, qui refusait de se présenter en cour dans l’affaire Thales a été mis en prison en juillet 2021, ce qui déclenchait alors des désordres au Kwa Zulu Natal et à Gauteng, causant 680 millions de dollars de dégâts et de pillages…
Le pays ne s’en sort pas. Le taux de chômage est toujours à 33 %. Chez les 15-24 ans, il est à 61 % ! Le coefficient de GINI est à 0,67 en 2023. La pauvreté affecte plus de 50 % de la population. Eskom, largement corrompue et faute d’investissements au moment voulu, assène des black-outs régulièrement, pour jusqu’à neuf heures par jour. Transnet, la compagnie parapublique qui s’occupe des ports et du rail, souffrant des mêmes maux, est de moins en moins efficace, perd de la clientèle, fait des pertes aussi et vient de bénéficier d’une injection de 47 milliards de rands pour subvenir à ses «besoins immédiats». Transnet avait réclamé deux fois plus ! Treize compagnies paraétatiques ne sont plus viables selon l’Auditeur général. Le monopole de Transnet et d’Eskom a depuis peu, été remis en question et des licences ont été accordées à des intérêts privés pour essayer de mobiliser de nouvelles ressources compétitives et efficaces. Les résultats ne seront malheureusement pas pour l’immédiat.
L’Afrique du Sud est devenu un colosse aux pieds d’argile, entre autres, parce qu’il a favorisé, à des postes clés, la nomination de loyaux petits copains plutôt que des hommes compétents et intègres ; il a fermé les yeux sur la corruption généralisée et peu respecté les investissements prioritaires du pays, y compris l’éducation nationale et les infrastructures vitales. Ce sont, pour sûr, des leçons à retenir.
******
Ça va bouger ? C’est à travers l’Agence française de développement (AFD) que l’Hexagone va aider le pays dans le secteur de l’eau. On ne parle plus de la Lyonnaise des Eaux ou de privatisation de la CWA, qui avait tant fait frissonner les âmes sensibles qu’elles ont préféré, à la place, voir augmenter le niveau de perdition d’eau traitée dans les tuyaux au taux insolent de 60 %, malgré les milliards dépensés.
Non !
Le pari de l’AFD sur les quatre ans à venir, à travers un prêt de 200 millions d’euros (Rs 10 milliards) est de diviser par deux le taux de fuites d’eau sur le réseau, de multiplier par deux le taux de traitement des eaux usées, d’assurer la fourniture de réservoirs individuels à encore 10 000 ménages et, avec l’intervention du bureau de recherche géologique et minières (BRGM), de localiser de nouvelles sources d’eau à Rodrigues, afin de mieux alimenter les Rodriguais.
Si cela se concrétise, nous aurons enfin fait reculer la honte du 24/7 que nous pourchassons depuis des décennies, sans succès aucun, sinon la redéfinition du… concept même du 24/7 ! Il s’agira alors de se poser la question : pourquoi avoir attendu fin 2023 pour signer un tel prêt et mobiliser ces nouvelles compétences ?
Reste que de la coupe aux lèvres, il y aura encore quatre ans et une executing agency qui sera… ? La CWA, vous croyez ?
******
À une question du député rouge Mahend Gungapersad qui voulait connaître le percentage pass rate dans chaque matière étudiée pour le National Certificate of Education permettant d’accéder au Grade 10, la ministre de l’Éducation nationale aurait répondu qu’il «n’est pas approprié de divulguer ces informations afin de ne pas stigmatiser les élèves» !
Puisqu’il est solidement invraisemblable que l’on puisse stigmatiser des élèves en leur révélant que leur pass mark est trop… élevé, on est, dans un exercice de logique pure, mené à conclure que le pass mark qui pourrait choquer et donc stigmatiser quiconque est, par contre, trop… bas ! J’ai mon pass sur cette question ?
******
Un panneau à la rue Vandermeersch à Rose-Hill nous apprend qu’il y a des embellishment works, qui auront lieu sur le réseau occupé par le Metro Express.
C’est une excellente idée ! D’autant que le pays entier en aurait bien besoin aussi et qu’il faut bien commencer quelque part. Au fait, ces travaux, dont je n’ai malheureusement pas connaissance de l’envergure, semblent avoir déjà débuté et démarrent bien. Les plantations sont, jusqu’ici, correctement pensées et judicieusement réalisées et j’ai une admiration particulière pour les tableaux peints (graffitis artistiques) que j’ai vus sur les piliers soutenant les parties surélevées, à la rue Vandermeersch et en allant vers La Butte, entre autres.
Un peu de beau et de propre ne peut que faire du bien ! À prévoir cependant un budget de maintien : arrosage et taille pour les plantes ; nettoyage et peinture fraîche éventuels pour les graffitis artistiques. Et de la cohérence aussi : le bas-côté du métro entre Rose-Hill et Réduit, à l’Ébène Recreational Park, devient rapidement une poubelle… Ça fait partie du programme ?
******
La COP28 s’est soldée par des compromis qui ne font le bonheur ni des militants de l’écologie, ni des négationnistes du changement climatique et du lobby charbon/pétrole/gaz. Cependant si l’on est réaliste, c’est le propre du compromis, puisqu’il fallait l’assentiment de 200 pays disparates ! Mieux encore ! Nous avions tous, plus ou moins, poussé le cynisme jusqu’à dire qu’aux Émirats arabes unis, sous la présidence d’un dirigeant de compagnie pétrolière, il ne fallait pas s’attendre à de grands progrès.
Sur cette toile de fond plutôt pessimiste, le résultat peut maintenant ressembler à un triomphe : Le fonds Loss n Damages va démarrer avec 800 millions de dollars ; on accepte, pour la première fois, qu’il faut «transitionner» et s’éloigner des hydrocarbures pour atteindre le «net zéro» avant 2050 ; on s’engage pour le triplement des sources d’énergie renouvelable avant 2030, le doublement de l’efficience énergétique sur la même période. Par contre, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud ont torpillé toute idée d’engagements précis contre le charbon ; le combat contre le méthane, 80 fois plus polluant que le CO2, a été bloqué, principalement par l’Inde et les engagements restent flous et imprécis, donc susceptibles d’être esquivés… Ce qui est certain, c’est que si l’on n’arrête pas de brûler les hydrocarbures, on va définitivement rater l’objectif de 1,5 degrés et pas plus.
Vous êtes pessimiste ou optimiste ?
Ceci pour vous aider : le fonds Loss n Damages est de 800 millions de dollars. L’investissement d’Adnoc, la compagnie pétrolière dont s’occupe le président Al Jaber de la COP 28 sera, de 2023 à 2027, de 150 milliards de dollars (*)… Adnoc produira donc plus de pétrole et de gaz.
******
Le DPP, vertement critiqué au Parlement par le PM, qui lui reprochait de ne pas avoir poursuivi Eshan Juman pour «entrée illégale au port», a indiqué que ledit Juman avait bien une autorisation en bonne et due forme pour y entrer !
Le PM va-t-il… remercier celui qui l’aura fait glisser sur une telle crotte ?
(*) Al-Arabiya news l UAE’s ADNOC plans global energy push with $150 billion spend
Publicité
Les plus récents