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Priorités : après l’inflation, le changement climatique !

17 janvier 2024, 10:00

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La donne a changé en ce début d’année dite électorale. Le gouvernement pensait pouvoir mater, sur le court terme, l’inflation grâce aux aides sociales savamment distillées à différents segments de l’électorat, dans sa volonté affichée de contrer l’inflation et augmenter le pouvoir d’achat. Le cinquième et dernier Budget de cette législature de Renganaden Padayachy focalisait, jusqu’ici, sur cette stratégie politicoéconomique. Mais le passage désastreux de Belal, enfant terrible du changement climatique et d’un urbanisme sauvage, vient bousculer les priorités gouvernementales, voire nationales. D’autres dépenses prioritaires s’imposent alors que la rue crie sa colère.

Images d’apocalypse. Les scènes de désolation dans les rues et les environs de la capitale, avec des voitures et un cadavre qui flottent dans une eau boueuse, sont révélatrices de nos sérieuses lacunes tant sur le plan infrastructurel, c.-a.d. en termes de drains et autres canalisations nécessaires pour évacuer les eaux de pluie, qu’en termes de prise de décisions, de gouvernance et de gestion des risques liés aux catastrophes naturelles que ce soit en amont ou en aval.

L’express qui fait de son mieux pour sensibiliser l’opinion, depuis au moins une quinzaine d’années, sur la question des catastrophes naturelles et des mesures pour réduire les risques humains et financiers de celles-ci, retient, au-delà de la colère généralisée de ceux qui ont été pris au piège de la montée des eaux et des embouteillages monstres, surtout ces points suivants afin que l’on évite de patauger dans la mare des complaintes diverses.

1) Gouverner, c’est prévoir. Cela fait onze ans que nous avons connu les «Flash Floods» qui avaient fait, fin mars 2013, pas moins de 11 victimes. Certes il y a eu une prise de conscience de manière brutale et des drains ont été nettoyés et d’autres construits. Manifestement, la capitale est toujours à risques et s’inonde facilement. Pourquoi donc avoir pris la décision s’ouvrir les bureaux ce lundi alors que Belal tournait dans les parages ? Les deux confinements ne nous ont-ils pas appris les bienfaits du «Work from Home» ?

2) Ingérence politicienne à la météo. À la veille de la catastrophe, le ministre Anwar Husnoo a voulu jouer au directeur de la météo. Il a laissé entendre que Belal n’était pas un danger et que les classes allaient être enlevées alors que le directeur de la météo disait qu’on pourrait passer à l’alerte 2. La parole du ministre qui préside le NEOC a eu le dessus. Mais quand il faut sanctionner le fautif, c’est le fonctionnaire qui saute et le ministre reste en place.

3) Bonne gouvernance et transparence. Nombre de fonctionnaires ont suivi ce qui s’est passé à la station de Vacoas et nous ont crié leur indignation. Avant, nous confient-ils, les techniciens donnaient leur opinion et les politiciens agissaient en fonction de ces avis. Or, maintenant les techniciens font partie d’un comité présidé par un ministre ou le Premier ministre, qui n’a souvent aucune expertise du sujet en question, mais qui aime se faire voir par la MBC. «Le technicien ou fonctionnaire écoute le politique et son avis doit se conformer au discours du politicien. Il n’y a aucun procès-verbal, donc pas de trace de désaccord, s’il y en a.»

4) Vivre avec le changement climatique. Nous subissons depuis une dizaine d’années les conséquences du réchauffement climatique. La catastrophe Idai qui avait traversé, il y a quatre ans, le Mozambique et le Zimbabwe était due à la conjonction de trois facteurs: 1) le phénomène naturel lui-même, c’est-à-dire le cyclone ; 2) la vulnérabilité «physique», c’est-à-dire les lieux traversés par le cyclone ; 3) l’état de résistance, la très faible résilience («susceptible vulnerability») de ces lieux vulnérables : le port de Beira, les infrastructures, par exemple. Fait notable : les pays touchés par Idai avaient déjà été visités par d’autres cyclones – qu’on appelle dépressions tropicales quand elles pénètrent à l’intérieur des terres. Mais, cette fois-ci, la trajectoire du cyclone, la pluviométrie exceptionnelle, les vagues de plus de trois mètres de haut et la constance de la force (pourtant relativement faible) du vent sur des structures physiques peu résistantes et sur des terres (généralement plus habituées à la sécheresse) avaient résulté en un bilan humain et matériel très lourd. Alors que le cyclone est un phénomène naturel, et que l’on sait comment il se forme au sein des océans, en revanche, la main de l’Homme y est aussi pour quelque chose.

5) Notre responsabilité en tant qu’humains sur Terre. Outre les émissions de CO2, contribuant à l’augmentation de la température des océans, ce qui provoque l’apparition de cyclones d’une plus grande intensité, nous avons tendance à développer des structures d’urbanisation et des bâtiments très vulnérables ou à faciliter l’installation de peuplements dans des zones reconnues à risque. L’Homme a de surcroît le pouvoir non pas d’arrêter un phénomène naturel, mais d’agir pour réduire le risque de dégâts importants que celui-ci pourrait causer.

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Face aux catastrophes naturelles et aux dégâts financiers et économiques qui y sont associés, Maurice, sans une stratégie qui dépasse le mandat de cinq ans de nos politiciens, reste livrée à elle-même et aux aléas naturels. Mais notre pays s’immobilise – et son économie se contracte – à chaque passage d’un cyclone, à chaque sécheresse, à chaque inondation. En raison du changement climatique, ces aléas tendent à s’intensifier, rendant donc notre pays encore plus vulnérable.

Toutefois, la fatalité de ce sentiment d’impuissance humaine face aux forces de la nature peut être conjurée à bien des égards, surtout quand nos ressources financières sont faibles. En raison des incertitudes entourant l’impact des catastrophes naturelles, il nous faut nous assurer contre les risques existants et non pas contre les catastrophes qui peuvent ou non survenir. Cette approche implique que les pertes économiques dues à la concrétisation d’un risque prévu ou imprévu doivent être «assurées», afin de ne pas affecter indûment les ressources de l’État et du secteur productif et, partant, ne pas freiner la stratégie de développement en cours… ou de reconquête du pouvoir !