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POURQUOI voter versus POUR QUI voter

10 novembre 2024, 08:00

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Voter, c’est une affaire de croyance, de foi, comme un serment muet que chaque électeur ou plutôt votant porte en soi en franchissant le seuil de l’isoloir. Une journée où le pouvoir bascule des mains des politiciens vers celles des citoyens, ces âmes silencieuses, comptables d’une démocratie qui, tant bien que mal, persiste à vibrer. Voter est vital. Et il faut s’en réjouir : chez nous, malgré la montée de l’abstention, plus de trois électeurs sur quatre perçoivent encore l’importance de ce geste. Car si nous n’occupons pas l’espace politique, c’est lui qui nous occupera.

Ce scrutin n’est pas anodin. Il déterminera le pays que nous aurons demain, dans cinq ans, peut-être même au-delà. Cette bataille électorale, qui nous est présentée comme cruciale, sur fond d’une courte et intense campagne, tendue par moments, que vise-t-elle au fond ? L’éradication des inégalités, l’aspiration à plus d’équité, plus de transparence, une vraie culture de Freedom of Information, une roupie qui reprend de l’altitude, la prospérité durable, sensible aux défis du changement climatique et du vieillissement démographique… peuton vraiment espérer tant de choses en un seul coup de bulletin ?

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En 2014, il y a dix ans, alors que les blocs rouges et mauves cherchaient un fragile équilibre, un ensemble de petits partis, regroupés autour du MSM, faisait figure d’outsider. À la manière de David défiant Goliath, le MSM prouvait qu’un groupe audacieux, en phase avec les préoccupations des gens, pouvait renverser les géants. Mais au pouvoir le tandem Anerood Jugnauth-Vishnu Lutchmeenaraidoo n’a pas tenu sa promesse de réaliser le «second miracle économique».

Les élections restent un exercice de chiffres et de visages. En 2024, 891 candidats sollicitent les suffrages de 1 002 857 électeurs, un électorat en croissance impressionnante depuis les 307 683 votants de 1967. La démocratie respire, dit-on, et pourtant… notre système électoral binaire contraint le jeu politique, à nouveau polarisé entre deux alliances : celle du «changement» face à celle de «Lepep».

Un point, cependant, demeure stagnant : la faible représentation féminine. Les grandes promesses de nos leaders à cet égard se heurtent à une réalité inchangée, hélas.

Sur la scène politique, les patronymes, eux, demeurent les mêmes, inlassables. En 1982, un Anerood Jugnauth dans la force de l’âge et un Paul Bérenger jeune et fougueux renversaient l’octogénaire sir Seewoosagur Ramgoolam. En 2024, Bérenger, 79 ans, et Navin Ramgoolam, 77 ans, aspirent toujours à gouverner, mais sans cette fois proposer de refonte constitutionnelle pour instaurer une IIe République.

L’arithmétique du pouvoir, base de toutes alliances, ne suffit plus. Selon le sondage LSL/ DCDM d’octobre 2014, 39 % des Mauriciens se déclaraient indécis – un réservoir qui déjà dépassait les bases électorales des grands partis. Ce chiffre qui aurait dépassé les 50 % (selon Pravind Jugnauth sur le plateau de Décryptage vendredi soir) traduit un malaise, un désenchantement vis-à-vis des appareils politiques, qui semblent peiner à inspirer confiance.

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Au-delà de l’élection, notre souhait est clair : que le prochain gouvernement comprenne enfin la nécessité de respecter les opinions divergentes. Car ce sont ces différences qui cimentent la démocratie moderne. Nous devons aussi intensifier notre lutte contre les discours sectaires qui ne visent qu’à semer la division.

Nous sommes à une étape cruciale pour le pays. Le «nettoyage» du système ne doit pas se réduire à une vengeance, focalisée sur les proches de tel ou tel leader ; il doit viser les réseaux mafieux qui gangrènent notre société et capturent notre démocratie et infiltrent nos institutions.

Notre modèle «consociatif» a mené les élites à conclure des pactes occultes, nourrissant l’illusion d’une compétition pour mieux servir leurs intérêts communs. Il est temps de réformer notre Constitution, d’en extraire le poison ethnique, et de bâtir une véritable République, où chaque citoyen est partie prenante et où la méritocratie est la règle. Ce serait un pas décisif pour nous délester du fardeau postcolonial, de ce système «diviser pour régner» hérité de l’époque britannique.

Nous sommes en 2024, plus en 1967 ni en 1976. L’usure du pouvoir change de visage. C’est un cycle, que nous connaissons tous.

Autrefois, on votait «pour» ; aujourd’hui, on vote plutôt «contre»