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Projet d’élevage de singes à Le Val
Quand les documents contredisent les déclarations
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Projet d’élevage de singes à Le Val
Quand les documents contredisent les déclarations
Les documents soumis au ministère de l’Environnement faisaient bien état de l’accord qui prend fin en septembre 2023 et le dossier complet remis par Hammerhead en decembre 2023.
Alors que les débats autour du projet controversé de business de singes s’intensifient, l’allocation des permis et le respect des réglementations de l’Animal Welfare Act continuent de susciter des interrogations. Dans un communiqué émis le 20 février, le ministère de l’Environnement fait le point sur la demande de permis d’Environmental Impact Assessment (EIA) soumise par la société Hammerhead International Ltd pour son projet d’élevage de 12 000 singes à Le Val. Le ministère déclare ne pas être au courant du statut de l’accord entre la société et RoseBelle Sugar Estate (RBSE) pour la location des terres. Le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, a affirmé, quant à lui, avec conviction que le pré-accord de location n’existait plus. Cependant, cette déclaration du ministère de l’Environnement intrigue car les documents soumis pour la demande de permis démontrent clairement que l’accord était en vigueur pour la période du 1er octobre 2022 au 30 septembre 2023.
La société Hammerhead avait fourni une documentation complète pour étayer sa demande de permis EIA afin de mener son projet de fermes d’élevage de singes. Les documents soumis indiquent que l’élevage se déroulerait sur quatre sites différents, sur une superficie combinée de 100 hectares et 5 718 mètres carrés. Chaque site abriterait 3 000 primates, pour un total de 12 000 animaux à pleine capacité. «The non human primate (NHP) breeding farm will be carried out at for different locations over a combined plot of land of 100 HA. 5 718 sq.m. Each location will hold 3000 NHP and have a cumulative of 12000 animals at full capacity. The site belongs to Rose Belle Sugar Estate board company (as per title deed and Notary certificate in Appendix)», peut-on lire des documents soumis. Les documents en annexe se référent justement à l’accord entre Hammerhead et RBSE, précisant clairement qu’il était valable pour une durée d’un an.
Lorsque Hammerhead a soumis sa demande en décembre 2023, l’accord de location n’a pas été renouvelé, comme l’ont précisé le conseil d’administration de RBSE et l’ancien ministre de l’Agro-industrie Vikram Hurdoyal au Parlement, en répondant à une question de la député Joanna Bérenger. Cela démontre donc que le ministère de l’Environnement était en possession de documents prouvant l’absence d’accord au moment de la demande de permis. Malgré cela, le ministère a effectué une visite du site le 15 février et a continué à traiter la demande de permis. Ce n’est que lorsque l’affaire a été médiatisée que le ministère a admis être toujours dans le flou concernant cet accord et attendre une confirmation de RBSE. À ce jour, la confirmation de la version de RBSE reste en attente.
Cette situation soulève des questions sérieuses quant à la transparence et à l’intégrité du processus d’octroi des permis environnementaux. Il semble y avoir une responsabilité partagée entre la société Hammerhead et le ministère de l’Environnement dans cette affaire. D’autre part, le ministère de l’Environnement aurait dû minutieusement vérifier les documents soumis par Hammerhead avant de procéder à une évaluation du site. Une source au ministère souligne que lorsqu’une demande de permis EIA est soumise, tous les aspects sont normalement vérifiés et que si les documents sont incomplets, il est attendu que la société qui la soumette fournisse des informations supplémentaires pour appuyer sa demande. «Le ministère aurait dû vérifier auprès de Rose-Belle Sugar Estate pour confirmer le statut de l’accord de location des terres avant de procéder à une visite du site», indique notre interlocuteur.
Arvin Boolell : «le gouvernement doit arrêter de donner de nouveaux permis»
Les propos de l’ancien ministre de l’Agroindustrie, Arvin Boolell, mettent en lumière les préoccupations croissantes concernant le commerce des singes et l’élevage de primates à des fins commerciales. Arvin Boolell souligne que sous l’ancien gouvernement travailliste, seuls deux permis avaient été octroyés pour des fermes de singes en 2005 et 2014, sous des conditions strictes. Cependant, il exprime sa désapprobation quant à l’augmentation significative du commerce des singes entre 2014 et 2019, attribuant cela à une politique moins contraignante de délivrance de permis par le gouvernement précédent. Arvin Boolell plaide en faveur de l’introduction d’une législation sur la vivisection et la création d’un comité multidisciplinaire.
Pour Arvin Boolell, «il est grand temps de mettre fin à cette activité, surtout à la lumière des avancées dans la recherche biotechnologique et l’intelligence artificielle qui offrent des alternatives plus éthiques pour la recherche clinique». Le député rouge souligne également les implications économiques de cette industrie lucrative qui bénéficie à plusieurs parties prenantes, rendant difficile la prise de décisions visant à mettre fin à cette pratique.
L’ancien ministre rappelle également une déclaration antérieure de l’ancien Premier ministre Navin Ramgoolam, en 2009, dans laquelle il avait affirmé qu’aucun nouveau permis ne serait délivré pour l’élevage de singes à des fins d’exportation. Arvin Boolell plaide en faveur de l’introduction d’une loi sur la vivisection et la création d’un comité multidisciplinaire comprenant des experts scientifiques, des politiciens, des représentants religieux et des organisations non gouvernementales pour examiner et réformer cette question de manière approfondie. «Il faudra examiner la question dispassionately.» Il exprime sa déception quant au manque d’une véritable volonté politique pour mettre fin à cette pratique, soulignant la nécessité d’arrêter la délivrance de nouveaux permis si le gouvernement est sérieux au sujet du phase out de cette activité. Il appelle à une approche objective et courageuse pour aborder cette question sensible, mettant en évidence l’urgence d’une action décisive pour protéger le bien-être des animaux et pour promouvoir des pratiques de recherche plus éthiques. «Dans toute cette affaire, c’est une question de profit ; certaines personnes se servent des compagnies pour leur propre profit.»
Shafeeck Jhummun : «l’accord entre RBSE et Hammerhead n’a pas été annulé en 2023»
Sollicité, le directeur de Hammerhead International Ltd, Shafeeck Jhummun, maintient qu’au moment où il avait soumis sa demande pour un permis EIA en décembre 2023, l’accord entre sa compagnie et Rose-Belle Sugar Estate (RBSE) n’avait pas été annulé encore.
«Ils n’avaient pas annulé en 2023. Selon les clauses du contrat de prélocation, le contrat de location final aurait dû être signé dans l’année suivant la signature du contrat de prélocation. Mais le plan de site n’a été obtenu auprès du land surveyor de RBSE qu’à la fin de 2023, soit plus de neuf mois plus tard. Cela a retardé la soumission de la demande d’EIA et peut-être la signature du contrat de location final. Ensuite, il y a eu la Private Notice Question de Joanna Bérenger à l’ancien ministre Vikram Hurdoyal. Par la suite, j’ai reçu une lettre de l’avocat de RBSE, datée du 5 février 2024, m’informant que ce dernier ne procéderait pas au contrat de location final.» Dans la lettre de l’avoué Me Didier Pursun, dont les services ont été retenus par le board de RBSE, ce dernier fait savoir que RBSE prévoit de reprendre possession de ses terres le 6 mars 2024 et demande à Hammerhead Internationale d’enlever toutes ses structures existantes. Shafeeck Jhummun a écrit au conseiller juridique de RBSE pour faire appel de cette décision, arguant qu’il est victime d’un complot de la part de ses concurrents qui veulent ternir son image.«Il n’y a aucune raison avancée pour refuser de renouveler le contrat, sauf des articles de presse», dit-il.
Communiqué de Cyno Breeders Association*
La Cyno Breeders Association (CBA) de Maurice, dans un communiqué de presse émis hier, tient à clarifier sa position et ses pratiques après les récents articles de presse autour du «monkey business». La CBA indique qu’elle regroupe les acteurs locaux de l’industrie cynophile qui exporte vers des laboratoires de recherche médicale renommés en Europe et en Amérique du Nord. Cette industrie emploie directement et indirectement plus de 6 300 Mauriciens. La transparence, dit-elle, est au cœur des opérations de la CBA qui coopère pleinement avec les autorités locales, notamment avec le National Parks and Conservation Service et la Livestock and Veterinary Division. «Ces institutions effectuent régulièrement des inspections sur les différents sites des membres de la CBA afin de veiller au strict respect des dispositions de la Native Terrestrial Biodiversity and National Parks Act, ainsi que de l’Animal Welfare Act. Ces lois régissent la protection de la faune locale à toutes les étapes», dit la CBA.
Les primates, ajoute la CBA, jouent un rôle crucial dans la recherche médicale, contribuant au développement de traitements pour diverses maladies telles que le diabète, les maladies cardiovasculaires, le cancer et, plus récemment, le Covid-19 et le chikungunya. Des recherches prometteuses sont également en cours pour traiter VIH, Parkinson et Alzheimer. La CBA, tout en promouvant l’avancement éthique de la recherche médicale, s’engage à garantir le bien-être des animaux. «Tout en respectant les lois locales, la CBA s’astreint aussi à suivre les standards rigoureux de l’Association for Assessment and Accreditation of Laboratory Animal Care International», dit-elle.
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