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Saisie de drogue factice
Rahim aurait roulé la police et les sœurs Oozeerally dans la farine
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Saisie de drogue factice
Rahim aurait roulé la police et les sœurs Oozeerally dans la farine
Les sœurs Shazia et Adiilah Oozeerally ont recouvré la liberté conditionnelle vendredi.
Coup de théâtre. Les sœurs Shazia et Adiilah Oozeerally ont recouvré la liberté conditionnelle vendredi, après que le Forensic Science Laboratory (FSL) a confirmé que la substance saisie n’était ni de la cocaïne ni aucune autre drogue... Le même jour, les deux sœurs, filles du défunt ASP Oozeerally, arrêtées douze jours plus tôt, ont comparu en cour de Flacq et de Vieux-Grand-Port, où elles ont dû fournir une caution de Rs 50 000 chacune. L’express les a rencontrées à leur domicile familial à Plaine-Verte hier, où elles se sont livrées à cœur ouvert sur leur arrestation. Ces deux mères de famille remercient de tout cœur leur mère de 72 ans, les sœurs de cette dernière qui les ont soutenues ainsi que leur homme de loi.
Cette improbable affaire éclate le lundi 11 septembre lorsque Husein Abdool Rahim, un habitant de la capitale âgé de 38 ans – connu, très connu même des services de police – se présente aux Casernes centrales et demande à parler à un enquêteur concernant un réseau de trafic de drogue. Il affirme détenir des informations à ce propos tout en alléguant qu’il s’était fait rouler dans la farine par ses «partenaires en affaires»… Rahim dénonce alors Haider Ruttun et les sœurs Oozeerally, désignant ces dernières comme les «cerveaux» de cette opération… Il négocie alors afin d’obtenir le statut de témoin clé. Il soutient également que Shazia et Adiilah ont refusé de lui remettre son argent après qu’il a accompli son ‘travail’, qui consistait à dissimuler la drogue, notamment de la cocaïne. Plus tard dans la journée, il conduit les hommes de l’ASP Hemant Dass Ghoorah, de la Major Crime Investigation Team (MCIT) à Poste-Lafayette, puis à Ferney, notamment, où des sacs de «cocaïne» ont été dissimulés. Soit un total de 7,8 kilos d’une valeur de plus Rs 100 millions.
Oui mais voilà. C’était de la poudre aux yeux. Le FSL a confirmé en fin de semaine qu’il ne s’agit pas de drogue. Il s’agirait, selon nos informations de… farine. Qu’est-ce qui se cache derrière toute cette incroyable histoire alors ? Les deux sœurs se confient… Selon elles, lundi matin – l’une d’elles avait d’ailleurs envoyé un message à la rédaction de l’express – elles ont tenté de le contacter afin de lui mettre la pression pour qu’il rembourse l’argent qu’il avait escroqué à Shazia... «J’avais rencontré Rahim en 2019 alors que nous fréquentions la même salle de gym. On s’est lié d’amitié, et un jour, il a emprunté ma voiture pour conduire son père à l’hôpital. Il ne me l’a pas rendue, mais il s’est rendu à Cap-Malheureux. Plus tard, il m’a appelée pour me dire qu’il avait des problèmes avec la police car il avait plusieurs devises en sa possession et m’a demandé si je pouvais l’aider financièrement. Je l’ai aidé sans savoir à quel genre de personne j’avais affaire, et cela à plusieurs reprises», assure Shazia, 33 ans.
Cette dernière dit avoir par la suite été victime de harcèlement. Plusieurs photos truquées d’elle avaient été publiées sur Telegram, sur des sites pornographiques et sur Facebook. «Des personnes m’envoyaient des messages indécents, et Rahim était intervenu pour mettre fin à cela. Il avait gagné ma confiance. À chaque fois que j’allais à la salle de gym, il me demandait de passer le prendre. Il était un bon ami à mes yeux et nous n’avions aucune idée de ce qu’il tramait», ajoutet-elle. Elle devait par la suite apprendre qu’Husein Abdool Rahim était en fait derrière les montages photo. Récemment, cette habitante de Plaine-Verte, mère de deux enfants, est tombée sur des articles de l’express faisant état des nombreuses frasques de Rahim. «J’ai tout de suite compris que je suis aussi une de ses victimes. J’ai commencé à lui réclamer mon argent. Ma sœur, Adiilah, elle, a commencé à lui mettre la pression», confie la trentenaire. Elle explique qu’Adiilah avait également mis quelques enquêteurs au parfum.
Mais dans la nuit de lundi, vers 23 h 30, Shazia a été réveillée en sursaut et a constaté la présence d’une vingtaine d’hommes dans sa chambre. Il s’agissait des policiers de la MCIT. Ils lui ont informé que sa sœur se trouvait déjà au bureau de la MCIT et qu’ils procéderaient à une perquisition. «Ils ont commencé à fouiller la maison. Ils sont allés chez ma mère qui habite au rez-de-chaussée, ils ont saisi tout l’argent qu’ils ont trouvé, ils ont dit que l’argent provenait de la vente de drogue, ils ont également pris la pension en espèces de ma mère.» Shazia a ensuite été embarquée dans une fourgonnette en direction du bureau de la MCIT. Sur place, elle a appris qu’elle était soupçonnée d’être une trafiquante de drogue tout comme sa sœur et que c’était Husein Abdool Rahim qui les avait dénoncées. «Ils nous ont qualifiées de revendeuses de drogue et ont prétendu que j’étais allée déposer de la drogue à Ferney sur la montagne et que ma sœur était allée planquer un sac près de la mer à Poste-Lafayette.» Les deux sœurs n’ont cessé d’affirmer qu’elles étaient innocentes et qu’elles n’avaient rien à voir avec cette histoire. Elles ont comparu en cour le même jour et ont été conduites en cellule où elles ont toutefois reçu le soutien des policiers. «Ils nous ont dit de garder confiance en Dieu et de prier…» Elles attendaient que la justice suive son cours. «Nous avons vu nos vies basculer. L’enquête n’a fait que prendre pour cible les trafiquants de drogue, en laissant de côté le fait que nous sommes innocentes. Nous avons versé beaucoup de larmes. Les personnes qui étaient proches de nous nous ont tourné le dos et nous ont maltraitées», confie à son tour Adiilah, âgée de 42 ans.
Cette dernière, une habitante de Pailles, confie que lors de son arrestation, les officiers de la MCIT ont fouillé sa maison de fond en comble. «Ils n’ont pas épargné mes plats qui étaient dans le réfrigérateur…» Ils ont saisi une somme de plus de Rs 800 000 qu’elle avait chez elle, somme qui concernait un business de vente de voitures selon elle. «Ils disent que c’est de l’argent provenant de la vente de drogue. Ils ont saisi ma voiture, se sont intéressés à mes comptes en banque, pour que finalement le FSL vienne dire que la poudre, c’est de la farine», lâche cette mère de trois enfants.
Elles ont appris plus tard qu’Husein Abdool Rahim avait monté ce plan afin de se sortir d’affaire par rapport à ses magouilles. «Il avait une affaire en cour lundi, et le mois de septembre était un mois critique pour lui. Il devait montrer à la police qu’il était de leur côté pour pouvoir se faire bien voir. Et en même temps, s’il nous piégeait, il n’aurait rien à nous rembourser», confie Shazia. Les deux sœurs expliquent qu’après cette arrestation, elles en sortent plus fortes et comptent bientôt affronter la vie, la tête haute.
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