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Hippisme

Retour éventuel du MTC: Les implications décortiquées

5 juin 2024, 19:00

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Retour éventuel du MTC: Les implications décortiquées

Le Champ-de-Mars à l’époque où le MTC organisait les courses.

Il fait, depuis quelques jours, le tour des radios privées pour se faire entendre. Jean-Michel Lee Shim (JMLS), patron de People’s Turf Plc, en a confirmé le départ du Champ-de-Mars en fin de saison. D’où le tintamarre autour d’un éventuel retour du Mauritius Turf Club. Reste que ce n’est pas si simple…

Entre la vente du centre Guy Desmarais et de terrains autour de Floréal qui se fait toujours attendre, la dette colossale du Mauritius Turf Club (MTC) de Rs 282 millions en 2022 et la perte de Rs 56 M en 2023, la problématique, certes moins contraignante, de la logistique et l’administration, réside surtout dans la viabilité financière du projet à court et long termes. Sans doute incapable de se relever seul, le MTC aura besoin d’aide. La politique va-t-elle s’en mêler ? Et si Renganaden Padayachy venait à la rescousse du MTC dans le Budget 2024-2025 ? Marquant ainsi des points inestimables dans l’imminente joute électorale et confirmant, au passage, toute une stratégie politique orchestrée dès le départ.

Soulignons d’emblée que le MTC souhaite peu communiquer, sur tout ce qui a trait à un éventuel retour. D’une part, par respect pour les négociations entamées – confirmées par le président du MTC, Gavin Glover, sur Radio Plus vendredi soir – avec le pouvoir en place ; et de l’autre, sans doute pour ne pas montrer de manière ostentatoire les dissensions d’opinion au sein même du club. «Le MTC a pour mission d’organiser les courses à Maurice. Nous l’avons dit à maintes reprises. Nous sommes intéressés par l’organisation des courses, mais comme nous l’avons déjà dit et redit, nous voulons le faire seul. (…) Le MTC a repris les pourparlers dans le but de reprendre l’organisation des courses. Les conditions doivent toutefois être discutées et agréées par la COIREC (NdlR, Côte-d’Or International Racecourse and Entertainment Complex Ltd) et la GRA (NdlR, Gambling Regulatory Authority). Nous pensions pouvoir reprendre l’organisation l’année prochaine. Nous avons l’expérience et le knowhow. (…) Si on veut bien de nous, quel que soit le gouvernement en place, nous répondrons présents», a ainsi déclaré le président du MTC.

Le reste de notre article n’engage pas le club, mais traite plutôt d’opinions de membres du MTC, ayant jadis occupé des postes à responsabilité au MTC et dans la défunte compagnie MTC Sports & Leisure Ltd (MTCSL). La nuance est faite ! Jean Michel Lee Shim, en tant que patron de People’s Turf Plc (PTP) et businessman du secteur des jeux, a aussi été sollicité pour les besoins de notre dossier.

Abordons d’abord le volet financier. Le MTC a fini l’année 2022 avec des dettes de Rs 282 M. Pour 2023, les pertes, faute de revenus, sont de Rs 56 M. La vente du centre Guy Desmarais et des terrains autour de Floréal auraient servi à éponger la dette auprès des banques, mais les choses sont toujours au point mort. Si l’assemblée générale extraordinaire (AGE) du MTC avait validé la vente d’une partie du centre pour Rs 80 M au Club hippique de Maurice (CHM) en 2023, ce dernier est finalement incapable d’honorer sa promesse d’achat. À l’heure actuelle, on ne sait pas si le MTC est en présence d’une offre de rachat sérieuse, même si des rumeurs font état d’un soumissionnaire. Reste à savoir si le montant proposé est à la hauteur des espérances du MTC.

Est-ce vraiment viable d’organiser les courses à Maurice ? Surtout dans la conjoncture actuelle ou les paris (betting) se sont réduits à une peau de chagrin. L’État a perçu Rs 282 M en taxes alors qu’on jonglait avec le double – Rs 506 M – pour 2020-2021. Jean-Michel Lee Shim affirme que PTP a fait une perte de Rs 3 M en 2023 et il se dit pessimiste sur la santé financière du MTC en cas de retour. «Si le MTC n’est qu’un coupeur de gazon, sans revenu autre qu’un pourcentage sur le betting, il lui sera difficile d’assumer les coûts d’opération longtemps.»

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La défunte MTC Sports & Leisure Ltd.

«La MIC aurait pu investir (…)»

Le premier obstacle est donc d’ordre financier. «Il faut d’abord assainir les comptes», réagit Denis Doger de Spéville, l’ancien chairman de l’ex-MTCSL. Pour lui, «l’apport d’un soutien financier de l’étranger est nécessaire pour démarrer». C’est d’ailleurs ce que le MTC a tenté de faire l’an dernier. Pour l’ancien président, «le gouvernement ne devrait pas s’ingérer dans les affaires du MTC». Il se dit assez pessimiste d’un retour d’ascenseur de l’État puisque «ce dernier n’a jamais aidé l’industrie dans le passé malgré les milliards obtenus».

Même constat de JMLS, qui estime que ce «sera difficile de faire avaler à la population toute décision d’injecter des millions dans ce secteur alors que certains Mauriciens arrivent à peine à joindre les deux bouts». Il questionne aussi la capacité du MTC à trouver un investisseur étranger. Le milliardaire prend pour exemple le cas d’Hollywoodbets en Afrique du Sud : «La part d’activité du betting liée aux courses de chevaux à Hollywoodbets était auparavant de 90 %. Savez à combien ce chiffre a baissé avec le betting sur le football et les casinos en ligne ? À 1,4 % ! Hollywoodbets fait les courses par altruisme en Afrique du Sud.» Pour lui, Hollywoodbets, annoncé comme un potentiel partenaire l’année dernière par le MTC, ou tout autre investisseur étranger, «ne sera pas facile à convaincre avec les projections financières actuelles». À la place, JMLS parle d’un modèle d’organisation étatique. Nous y reviendrons en détail prochainement…

Par contre, Jérôme Ferrat, membre du MTC, et ancien handler, plaide pour une intervention financière de l’État : «La MIC (NdlR, Mauritius Investment Corporation) aurait pu investir dans la compagnie affiliée au MTC et ainsi permettre au club de payer une partie de ses dettes.» Il estime que l’État est la seule planche de salut qui pourrait sortir l’industrie de l’ornière. Une reprise d’activité avec le seul soutien des membres du MTC est «utopiste», estime-t-on parmi des observateurs. Cela, même si Gavin Glover a jugé bon de saluer la fidélité des membres du MTC : «La situation précaire, elle existe bien évidemment puisque nous n’avons plus de revenus depuis deux ans. Laissez-moi vous dire que sur 550 membres, 325 membres ont payé leur souscription pour 2024. (…).»

Certains, du moins les plus optimistes, croient justement en une intervention immédiate du ministre des Finances dans son discours budgétaire de vendredi. «L’industrie hippique est un thème de campagne. Renganaden Padayachy et le Premier ministre le savent !», déclare un membre du MTC. Cette intervention éventuelle de l’État dans le Budget se veut encore plus «possible vu le va-et-vient de Lee Shim dans la presse pour confirmer l’arrêt des activités de PTP en 2025». Comprenez donc que le pouvoir en place pourrait choisir «le cheval MTC en 2025, en lui donnant l’aide nécessaire dans le Budget». Une aide qui se matérialiserait en 2025, après les élections, permettant à PTP de finir sa saison 2024. «La stratégie de se poser en sauveur du MTC demeure séduisante à plus d’un titre», avoue un observateur.

Abordons maintenant le volet logistique et administratif. Denis Doger de Spéville rappelle que «l’industrie hippique à Singapour est finie». Selon lui, «des gens bien intègres, professionnels et très capables peuvent y être débauchés pour 2025 (…) Ce serait un pool humain fort intéressant pour Maurice». Jérôme Ferrat dit ne pas s’inquiéter des soucis d’ordre logistique et administratif. Il dira, en priorité, que «les palefreniers sont désormais à la charge des écuries». Les anciens employés administratifs de l’ex- MTCSL pourraient être rappelés. En ce qui concerne les handlers, Jérôme Ferrat souligne qu’une équipe serait prête à travailler avec le concours de Roman Halbwachs et autres Denis Grégoire. «Des gens rompus à cet exercice», souligne-t-il.

Qu’en est-il de la piste ? Surtout au lendemain des déclarations de JMLS selon lesquelles il voudrait enlever du Champ-de-Mars ses infrastructures, dont le système d’irrigation innovant. Ferrat et de Spéville avancent que les contours des négociations sur l’entretien de la piste doivent bien «se faire entre le MTC et la COIREC». Interrogé sur le sérieux de ses déclarations, du moins sur le système d’irrigation qui a coûté Rs 6 M, JMLS aurait déclaré qu’il serait prêt à tout laisser sur place, dépendant des négociations et dialogues avec le MTC.

Parlant du cas JMLS, plusieurs membres ont exprimé le souhait «de se passer de son aide». D’autres réclament même un refus d’association en tout genre avec le milliardaire et magnat des jeux. «Qu’il vende ses chevaux !» Ce dernier a toutefois déclaré, à maintes reprises, qu’il serait prêt à aider le MTC en cas de retour. Les 250 chevaux de Global Equestrian Ltd courront sur la carte du MTC, si besoin. Idem pour le centre privé de Petit-Gamin où les facilités d’entraînement et de bien-être du cheval surpasseraient celles du Champ-de-Mars.


Réaction de Xavier-Luc Duval, leader du PMSD:

«Je suis pour une aide de l’État, notamment un prêt au MTC. Histoire de redonner son éclat au Champ-de-Mars. Toutefois, je pense que ce n’est pas à l’État de gérer le business des courses. Le MTC doit pouvoir opérer de manière optimale. Par contre, le régulateur doit forcément être une institution de l’État. Je ne vais pas donner des détails, mais je dis juste que cela devrait être une instance dans la même veine que la HRD, mais pas la HRD actuelle. Une HRD où il y a risque de conflit d’intérêts ne peut être d’actualité.»