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Conseil de district de Flacq

Rs 6 millions de dons indiens utilisés pour acheter des poubelles chinoises

20 mars 2024, 16:15

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Rs 6 millions de dons indiens utilisés pour acheter des poubelles chinoises

Poubelle Made in Mauritius et poubelle sino-mozambicaine, à droite, coûtant Rs 534,75 avec TVA…

Ces 15 000 poubelles au coût de Rs 537,75 TTC ont été privilégiées par le conseil de Flacq au détriment de celles fabriquées à Maurice, car elles répondaient à certaines spécifications encore floues. Ce qui est sûr, explique l’ancien Chief Executive, c’est que l’Inde a fourni l’argent pour cette commande au profit de la Chine.

Alors que la plupart des conseils régionaux ont opté pour les poubelles Made in Mauritius, le conseil de district de Flacq a commandé des poubelles auprès d’une entreprise chinoise basée au Mozambique, Weng Long Import & Export LDA, fin 2023. L’express en a fait état le 14 mars.

Nous revenons aujourd’hui sur la façon dont le conseil de district de Flacq a fait l’acquisition de ces poubelles importées. Comme chacun le sait, même s’il y a appel d’offres, il existe toujours la possibilité d’exclure un soumissionnaire ou d’en favoriser un. Il suffit d’imposer des critères qui correspondent au produit ou service offerts par le soumissionnaire que l’on veut favoriser. Ou a contrario, d’émettre des critères qui ne correspondent pas au produit ou service offert par le soumissionnaire que l’on veut exclure. C’est ce que l’on appelle des appels d’offres taillés sur mesure. Dans ce cas précis, des poubelles taillées sur mesure.

«Ti trou»

Nous avons contacté Kishore Kumar Jeewooth, l’ex-président du conseil de district de Flacq à ce propos. Surprise : il nous dit n’être au courant ni que les poubelles viennent du Mozambique ni qui en est l’importateur. «Je n’ai pas le droit d’intervenir dans ce processus.» Il insiste : «Ce sont les fonctionnaires, pas les conseillers, qui établissent les spécifications du produit et qui évaluent les offres.» Quelles ont été ces spécifications qui ont fait pencher ces fonctionnaires en faveur de la poubelle sino-mozambicaine ? Kishore Kumar Jeewooth maintient qu’il n’en a aucune idée pour ensuite reconnaître que cela concernait la dimension et le «trou» – il voulait sans doute dire l’ouverture – de la poubelle. Et le prix ? Jeewooth nous affirme que la poubelle sino-mozambicaine était moins chère, pour ensuite rectifier «il suffit que le prix tombe dans un certain rang et ne dépasse pas un montant maximum imposé par le ministère».

Rappelons que le conseil a payé Rs 6 millions pour 5 000 poubelles pour chacun des trois villages de Sebastopol, Trou-d’Eau-Douce et Camp-de-Masque-Pavé, le prix à l’unité exact étant Rs 534,75 avec TVA. L’ancien président se rappelle toutefois – la mémoire lui étant revenue pendant la conversation – qu’il y avait un deuxième appel d’offres, le premier ayant été annulé mais il ne sait plus pourquoi. Puisque Kishore Kumar Jeewooth nous dit n’être pas au courant de ces spécifications visiblement très spéciales, à qui devrions-nous nous adresser ? «Au Chief Executive», nous conseille-t-il.

Le Chief Executive Dheeraj Gopaul, qui était posté au conseil de district de Flacq lors de l’acquisition de ces poubelles, fin septembre, nous renvoie à un «officier» du département concerné car, dit-il, il n’est pas au courant de ces spécifications qui, ajoute-t-il cependant, ne sont pas spéciales. Pourtant, ce sont ces «specs», comme ils le disent, qui ont exclu la poubelle locale fabriquée par Plastic Industry Mauritius. Le fonctionnaire en question, Sandeep Ramgutty, n’a pas voulu nous parler, nous demandant d’adresser une demande au Chief Executive, «et s’il faut répondre, nous le ferons». Tout en ajoutant «je n’ai aucune obligation de vous répondre». Selon nos informations, en fait, la procédure n’a pas été suivie à la lettre et il y a bien eu des ingérences pour l’achat de ces poubelles.

Sollicité une seconde fois, Dheeraj Gopaul nous affirme que son transfert manifestement punitif au conseil de district de Grand-Port n’est pas lié au problème de poubelles. Il reconnaît toutefois que les Rs 6 millions consacrées à l’achat de poubelles sino-mozambicaines proviennent d’un don du gouvernement… indien. Voilà ! Ce sont les Indiens qui seront enchantés d’apprendre que l’on a utilisé leur argent pour acheter des produits chinois. Il n’est pas étonnant que certains veuillent garder le silence. Pour ne pas provoquer, entre autres, des problèmes diplomatiques ?

Made in…

On ne sait pas si Weng Long Import & Export LDA produit ces poubelles au Mozambique ou elle les importe de la Chine et les distribue à partir de ce pays. Si Weng Long Import & Export LDA n’est qu’une entreprise de distribution, il est donc possible que la Chine utilise le Mozambique comme tête de pont (au lieu de Maurice) pour vendre ses produits aux pays de la SADC, profitant de plus de l’accord de libre-échange entre les États faisant partie de la SADC. D’ailleurs, la poubelle ne mentionne pas «Made in Mozambique» ou «Made in China». Nous attendons un éclairage de l’ambassade de Chine. L’importateur Mohaumed Irshad Eadally nous assure, lui, que les poubelles sont bien fabriquées au Mozambique. Cependant, il n’a pas voulu nous montrer le certificat d’origine et le «Bill of Entry».