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Sans nuances Sans état intermédiaire
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Sans nuances Sans état intermédiaire
La question revient immanquablement au détour de chaque conversation, de chaque rue. Surtout depuis la fin des débats budgétaires et des allusions du PM par rapport aux Rs 585 millions allouées à l’item «Élections» dans le Budget 2024-25. Derrière un sourire narquois, Pravind Jugnauth a laissé entendre qu’on en saura plus en temps et lieu...
Cette question récurrente est la suivante : Pravind Jugnauth pourra-t-il conserver le pouvoir ou est-ce que Navin Ramgoolam saura le lui arracher ?
Pravind Jugnauth en tant que PM et leader of the House conserve un avantage sur son rival. Le leader du MSM est le maître du temps, le gardien des horloges, même si la révocation précipitée et inexpliquée du ministre Vikram Hurdoyal est venue compliquer la donne pour Pravind Jugnauth.
À la place du ministre Hurdoyal, soupçonné de vouloir quitter le navire MSM pour rejoindre le PTr, Pravind Jugnauth a choisi de mettre en avant Naveena Ramyad, et de miser sur deux fidèles du parti : Mahen Seeruttun qui retrouve l’important ministère de l’Agro-industrie (arraché à Maneesh Gobin pour être confié à Hurdoyal) et Sunil Bholah qui est muté aux Services financiers – et annoncé au numéro 5 pour contrer Navin Ramgoolam s’il revient à Triolet/Pamplemousses, circonscription parmi celles qui viennent d’être redessinées.
Dans l’opposition, quelques autres acteurs politiques sont en échauffement, mais les Mauriciens, dans une large mesure, ne sentent pas encore leur poids pour l’instant puisque les listes des candidats ne sont pas encore finalisées.
Comme rapport des forces, le dernier sondage Synthèses/l’express, publié le 27 octobre 2023, demeure une référence même si les choses évoluent sur le terrain et au sein des blocs politiques. Selon cette étude, le MSM demeurait le parti politique préféré des sondés malgré les scandales et quelques décisions impopulaires, même si son score était passé, en sept ans, de 24,4 % à 19,7 %. Le MSM devançait le PTr, le MMM, le PMSD et les autres partis ou regroupements politiques. Et même si 68 % des Mauriciens ont soif d’un nouveau leader, Pravind Jugnauth demeure en ballottage favorable et devance, avec 23,3 %, SSR (23,0 %), Navin Ramgoolam (21,5 %) et sir Anerood (15,8 %), comme PM préféré, en dépit des controverses et de l’inflation.
Toutefois, le sondage indiquait que l’alliance gouvernementale convainc de moins en moins – elle est créditée de 24,8 % (contre 36,0 % en faveur de l’entente de l’opposition jadis composée du trio Ramgoolam-Bérenger-Duval) – grandement parce que les partis-satellites qui s’accrochent au MSM et à son trésor de guerre n’ont pas su ou n’ont pas pu étendre leurs assises sur le terrain. La donne a changé. Le départ du PMSD a fragilisé le regroupement de l’opposition parlementaire et pourrait permettre, en cas de rapprochement avec le MSM, une nouvelle dynamique.
Face à un Duval rompu aux arrangements électoraux avec tantôt le clan Jugnauth, tantôt le clan Ramgoolam, le MSM pourrait être tenté de lâcher ses partenaires actuels pour refaire sa vitrine.
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Les mesures sociales du dernier budget, le lancement de la Financial Crimes Commission, le contrôle des institutions, la servitude amplifiée de la MBC, la mise sous bol des conseils de district et l’abus de l’appareil d’État, presque tout porte à croire que nous sommes en pleine guerre ouverte, et non pas dans une simple bataille électorale. Une guerre, avec encore plus de moyens qu’en 2019, qui sera sans pitié, non pas entre deux adversaires, mais entre deux ennemis personnels, deux fils des deux dynasties qui ont régné, et qui voudraient, coûte que coûte, protéger leurs acquis.
Si Pravind Jugnauth a laissé entendre qu’il est prêt à digérer une défaite électorale, en son for intérieur, il sait fort bien que ce worst-case scenario signifierait une chute brutale pour sa famille politique et lui.
Entre-temps, comme cela a été le cas pour le Budget 2024-25, les principes absolus du bien et du mal nous sont servis à la sauce orange ou rouge. Sans nuances, et sans état intermédiaire. Ayant réalisé, sans doute par manque d’audace, ou par pure complaisance exotique, que Maurice n’est pas encore prêt, en 2024 ou en 2025, à se débarrasser à la fois d’un Jugnauth et d’un Ramgoolam, afin d’écrire un nouveau chapitre, les influenceurs de la chose politique vont se ranger derrière l’un ou l’autre camp.
À se demander si nous serons, un jour, enfin prêts à dire non aux alliances stratégiques de convenance, contractées sur l’autel du communalisme (ou communautarisme), pour parachever notre ultime émancipation politique ?
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