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Questions à…
Sherry Singh: «Un système d’interception de masse que seul l’État peut avoir»
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Questions à…
Sherry Singh: «Un système d’interception de masse que seul l’État peut avoir»
Des cadres de Mauritius Telecom sont partis pour négocier avec Pertsol, en Inde. Dans le sillage de «Missie Moustass», après sa énième arrestation, Sherry Singh explique le fonctionnement de ce système d’interception.
Il ne manquait plus qu’une accusation de terrorisme à votre palmarès. Vous vous y attendiez ?
Franchement, je m’attendais à tout mais pas à cela. S’il y avait une loi encore plus sévère que le terrorisme, je crois que le gouvernement l’aurait utilisée contre moi.
On vous accusait en fait d’avoir piraté le téléphone du Prime Minister’s Office (PMO). Est-ce du terrorisme ?
Je ne sais pas comment une telle accusation tombe sous la Prevention of Terrorism Act (PoTA). En tout cas, le magistrat Prashant Bissoon a décidé de la rayer avant même que la défense ait déposé une motion en ce sens. C’est du jamais vu, cette claque ! Heureusement, le Directeur des poursuites publiques et des magistrats fonctionnent toujours en toute indépendance.
Il reste une accusation contre vous et vos collaborateurs…
Oui, de computer misuse, même s’il n’y en a aucune preuve, et basée sur l’unique témoignage de Rakesh Gooljaury, celui qui prépare des boulettes au chouchou pour le PM et sa famille. Gooljaury se serait soudain souvenu, en pleine nuit, poussé sans doute par un élan de patriotisme, que je lui avais dit, alors qu’il m’avait supposément rendu visite en juillet 2024 que j’avais des enregistrements de conversations téléphoniques. La Special Striking Team s’est rendue chez lui pour prendre s’est rendue chez lui pour prendre sa déclaration à une heure du matin. La SST a défoncé mon bureau à 2 heures du matin.
Avez-vous rencontré Gooljaury ?
Bien sûr que non ! Croyez-vous que je me serais confié à quelqu’un qui a vendu tous ceux qu’il a servis ? Vous avez entendu dans les bandes sonores de Missie Moustass comment il rapporte tout ce qu’on lui dit…
On entend souvent le PM prêter une oreille attentive à Rakesh Gooljaury. En quelle qualité celui-ci rassemble des informations et les fournit à Pravind Jugnauth ? Fait-il le travail du National Security Service (NSS), entre autres ?
Je préfère ne pas employer un mot grossier pour qualifier cette qualité…
Le Premier ministre passe en tout cas beaucoup de temps à écouter les rapports de Paul, Pierre et Jacques. Il s’occupe aussi de la cuisine et des menus à Angus Road. A-t-il le temps de gérer les affaires du pays ?
La seule explication est qu’il y en a d’autres qui gèrent le pays.
Parlez-nous du témoignage de Yasin Bhuglow contre vous…
Les accusations étaient basées sur sa simple déclaration, sans preuve, que moi et les quatre autres personnes auraient préparé des clips. Il a fait sa déposition contre moi à 3 heures du matin ! Sûrement, lui aussi, dans un élan de patriotisme qui l’empêchait de dormir ! Selon mes renseignements, il a déjà quitté le pays.
Pour être ambassadeur ?
(Rires) non, pas encore. Lorsque je lui avais dit que je ne comptais pas être candidat aux prochaines législatives, et que je comptais aider l’opposition, Yasin Bhuglow était déçu mais il m’a demandé de parler à Navin Ramgoolam pour qu’il soit ambassadeur !
Êtes-vous «Missie Moustass» ?
Non ! Laissez-moi vous expliquer. Tous les appels téléphoniques passent par des relais et un «Main Exchange» pour chaque opérateur. Sous la loi, pour le Law Information System, la Counter Terrorism Unit (CTU) peut avoir accès à ces appels sur ce serveur et ce, pour chacun des trois opérateurs, qui y sont tenus. C’était le cas lorsque j’étais en poste. On parle là de 10, 15 personnes, pour des enquêtes policières de terrorisme, de trafic de drogue. Le logiciel utilisé était Verint, et ne pouvait intercepter que les appels normaux et les SMS. Les entreprises comme Verint sont spécialisées dans le domaine et traitent directement avec les autorités. Ce n’est pas grâce au sniffing, qui n’était d’ailleurs qu’un test, qu’on nous écoute maintenant.
Auriez-vous pu financer ce système d’écoute ?
Je n’ai pas des millions de dollars pour la licence, ni les équipements. Cela ne se fait pas avec un laptop. Il faut une pièce entière pour contenir ces serveurs et banques de données. Chez Mauritius Telecom (MT), on n’a pas les moyens d’intercepter les conversations. D’ailleurs, MT et Emtel ont émis des communiqués dans ce sens. L’écoute n’est possible que par l’Etat et ses nombreux officiers. Et c’est la police qui peut avoir tous les numéros de téléphone.
Et après votre départ ?
Selon mes informations, des cadres de MT sont partis pour négocier avec Pertsol en Inde après mon départ. La question qu’il faut poser : ce nouveau système d’écoute peut-il intercepter tout ce qui est digital, comme les messageries WhatsApp ?
Il est clair que nous sommes en présence d’un système d’interception de masse extrêmement sophistiqué que seul un Etat peut acheter et opérer. Le problème, c’est qu’il y a trop d’équipes et trop de personnes qui interceptent, écoutent et enregistrent ces conversations. Il suffit qu’une seule personne dans ces équipes (National Security Service, PMO et CTU) détourne certaines conversations pour les utiliser quand et où il faut.
Ces écoutes sont-elles légales ?
Bien sûr que non. Il n’y a eu aucun Judge’s Order pour des écoutes, de l’aveu même du Premier ministre au Parlement et les «écouteurs» ne gardent pas un rapport sur qui et quand ils ont fait des écoutes.
Votre libération conditionnelle précédente, après celle de dente, Bruneau Laurette et des Bissessur, avait valu une poursuite du commissaire de police contre le DPP. Avez-vous l’impression de faire l’objet d’un harcèlement judiciaire ?
Je n’ai pas l’impression mais je suis sûr de faire l’objet d’un harcèlement non judiciaire mais venant de la police. Ce n’est pas fini. La police me recherche aujourd’hui (NdlR, mardi) parce que j’aurais commis un «breach of bail». Lorsque j’ai répondu que j’ai déjà signé à la station de police d’Ébène, savez-vous ce qu’on m’a répondu ? Que c’est un poste de police et non une station de police.
Les révélations de «Missie Moustass» ont-elles créé une panique au gouvernement ?
Visiblement oui. Mais l’on aurait déjà dû avoir commencé à investiguer sur ces personnes qui organisent des cover-up comme le commissaire de police qui aurait déjà dû step down. Comment un tel CP, qui s’est ouvertement dit MSM, peut-il demeurer en poste pour les législatives ?
La preuve de cette panique, la «cyberattaque» et la suspension de Facebook, YouTube et TikTok…
La première défense du PM était l’intelligence artificielle (IA). Puis il a reconnu sa voix mais pas les propos. Maintenant, il parle d’une cyberattaque, sur des lignes de PABX ! Si c’est sa ligne qui a été attaquée, pourquoi avoir suspendu les réseaux sociaux au détriment de toute la population ? Comment savait-il que le problème allait être résolu exactement le 11 novembre, le jour du dépouillement ? D’ailleurs, certains protagonistes proches du pouvoir changent maintenant de défense : ils ne nient plus avoir eu une conversation avec leur interlocuteur mais disent que la conversation a été modifiée. Ils réalisent maintenant qu’un échange, surtout sur ligne terrestre avec tel interlocuteur, à telle heure et telle date précises pourrait être prouvé en consultant leur facture détaillée.
Tout ce qui vous était reproché a été prouvé comme des complots et tout ce que vous disiez s’est avéré.
Me concernant, oui. Les bandes sonores prouvent que j’ai toujours dit la vérité car il y a une seule vérité. Seuls ceux qui mentent auront toujours différentes versions.
Lors de votre interview accordée à Informus, vous affirmiez que Xavier- Luc Duval (XLD) refilait le contenu de certaines PNQ au gouvernement d’avance à travers Rakesh Gooljaury. Le maintenez-vous ?
Oui, je le maintiens…
XLD nie, arguant que s’il avait fait cela, il aurait mis sa crédibilité en jeu.
La question qu’il faut lui poser : a-t-il rencontré Gooljaury lorsqu’il était leader de l’opposition ? Il y a plusieurs témoins…
Autre révélation que vous aviez faite: la toute-puissance de Kobita Jugnauth…
C’est elle qui dirige le PM qui supposément dirige le pays.
Pensez-vous que certains s’intéressent trop à celui ou celle qui est derrière «Missie Moustass» plutôt qu’au contenu de ce qui a été révélé ?
Le gouvernement et sa police ont toujours été plus intéressés par l’identité des lanceurs d’alertes que par les alertes elles- mêmes. On l’a vu dans plusieurs autres cas. Malheureusement, certains journalistes font de même. Je me demande ce qu’ils penseront si l’on enquêtait sur leurs sources au lieu de se concentrer sur les allégations.
Pravind Jugnauth clame que vous avez des comptes à l’étranger…
Je l’ai déjà dit : ma femme avait un compte à Dubaï d’où elle gérait un business qui a fermé depuis. Pourquoi les institutions comme la Financial Intelligence Unit n’ont-elles pas encore découvert ces comptes ? Par contre, Pravind Jugnauth ne m’a pas répondu : lui et sa famille ont-ils des comptes en Angleterre ? Y avait-il un prête-nom ? Si oui, était-ce un certain Alan Govinden ?
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