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S’incliner devant la Constitution
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S’incliner devant la Constitution
Dans la marmite politique en pleine ébullition, l’initiative de Rezistans ek Alternativ d’organiser, le samedi 30 mars, un atelier de travail sur les amendements constitutionnels à apporter après 56 ans d’indépendance, n’apparaît pas comme un cheveu sur la soupe collective. Si l’opposition parlementaire et extraparlementaire arrive à formuler des recommandations communes, ce serait un pas dans la bonne direction, car remettre Maurice sur les rails de la démocratie nécessite la mise en commun la plus large possible.
C’est donc un appel urgent à repenser les fondations mêmes de notre démocratie, qui n’en est plus une, selon V-Dem et plus d’une centaine de chercheurs en sciences politiques. Cette initiative survient dans un contexte marqué par les manœuvres du régime, accusé d’instaurer un modèle de gouvernance autocratique. Les attaques répétées contre le pouvoir judiciaire, le chassé-croisé entre le bureau du Directeur des poursuites publiques et le commissaire de police, la presse libre et indépendante et les parlementaires de l’opposition s’inscrivent en faux contre les principes fondamentaux inscrits dans la Constitution. Plus troublant encore est le constat que la Constitution permet, en son état actuel, de tels écarts, signalant ainsi son obsolescence.
Face à ce constat, 2024 se profile comme une année charnière, offrant aux partis politiques et aux citoyens une occasion sans précédent de se positionner du côté juste de l’histoire. L’indépendance de Maurice fut certes un tournant historique mais le chemin parcouru depuis a révélé des failles profondes. Il n’est plus temps de se contenter de solutions éphémères ; des mesures audacieuses et décisives s’imposent. Une révision en profondeur de la Constitution est envisagée comme un levier pour revitaliser notre culture démocratique et orienter la société vers un progrès juste et durable.
Cette conférence constitutionnelle ne se veut pas seulement un forum de discussion ; elle se positionne comme une étape cruciale vers une réforme constitutionnelle nécessaire.
Cependant, cette démarche ne se limite pas à la critique du présent. Elle s’inscrit dans une réflexion plus large sur la nature même de la Constitution mauricienne, héritée d’un passé colonial et jusqu’alors peu questionnée dans sa capacité à répondre aux enjeux contemporains de justice sociale, d’égalité et de respect des droits fondamentaux. Les travaux de chercheurs comme Jacques Colom et Stéphanie Rohlfing-Dijoux, qui ont souvent partagé leurs perspectives sur le sujet avec l’express, soulignent l’urgence d’une mise à jour constitutionnelle, qui embrasse pleinement les droits humains de la deuxième et de la troisième génération, tout en finissant de construire une nation inclusive et diversifiée.
Le droit constitutionnel ne doit plus être perçu simplement comme un droit, mais plutôt comme un devoir envers l’humanité. Cette perspective élargit la responsabilité de la réforme constitutionnelle au-delà des cercles juridiques et politiques, engageant chaque citoyen dans la réflexion sur l’état de droit et son alignement avec les ordres internationaux.
On devrait non seulement critiquer l’existant mais aussi et surtout proposer des solutions concrètes. Il s’agira de réfléchir à une nouvelle Constitution qui, loin d’être une simple annexe d’un texte réglementaire colonial, deviendrait le socle véritable d’une République mauricienne rénovée, plus juste, plus inclusive et résolument tournée vers l’avenir et l’écologie. Cette démarche, ambitieuse mais nécessaire, pourrait bien définir le cours de la démocratie mauricienne pour les décennies à venir, si les partis politiques arrivent à mettre leurs petits problèmes d’ego de côté pour se focaliser sur le bien commun.
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