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Achats durant le Covid
Un document contredit la déclaration du PM
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Achats durant le Covid
Un document contredit la déclaration du PM
Un devis venant de la compagnie Bo Digital vient de sortir de l’ombre. Il est instructif à plus d’un titre. Daté du 31 mars 2020, il est adressé au secrétaire permanent (PS) du ministère du Commerce, porte-feuille occupé à l’époque par Yogida Sawmynaden. Le devis propose dix caméras thermiques à Rs 600 000 la pièce. Ce sont ces équipements que l’on utilisait durant le Covid-19 et qui étaient censés déceler la température corporelle d’une personne et ainsi déterminer si elle avait de la fièvre et était possiblement contaminée au Covid-19.
Quel est le prix d’une telle caméra thermique sur le marché? Nous n'avons pu l’obtenir. Cependant, le plus important dans ce devis, c’est que l’on peut y voir une approbation griffonnée par une haute fonctionnaire. Que dit ce griffonnage ? «Approved on instructions from the National Task Force chaired by P.M. for installation in ten hospi-tals/Flu Clinics.» Et c’est paraphé et daté du 2 avril, en l’an 2020 sans doute. Le coût total s’élève à Rs 6,9 millions.
Nous avons interrogé plusieurs personnes, dont certaines à la State Trading Corporation (STC), et on nous a expliqué la procédure. Tout d’abord, il faut savoir, comme l’a rappelé Shakeel Mohamed à l’Assemblée nationale (AN) mardi, que c’est la directive 44 intitulée Emergency Procurement to combat COVID-19, émise le 19 mars 2020, qui était en vigueur. C’est le ministère de la Santé qui recherche les produits requis et établit les spécifications, informations qui sont ensuite transmises au ministère du Commerce. Celui-ci, après une procédure d’appel d’offres restreint ou pas d’appel d’offres du tout, choisit ou recommande le fournisseur et comme la haute fonctionnaire l’a fait sur la cotation de Bo Digital, inscrit ses remarques en spécifiant qui a approuvé le document.
Chaired by PM
Dans ce cas précis de Bo Digital, la fonctionnaire affirme que c’est la National Task Force qui l’a approuvé. En fait, c’est le même High-Level Committee dont a parlé Shakeel Mohamed, mardi, à l’AN. La note ajoute que cette National Task Force est présidée par le Premier ministre lui-même. Ce qui contredit la déclaration du Premier ministre, mardi au Parlement, à l’effet que c’est le Conseil des ministres qui a approuvé. Nos interlocuteurs nous expliquent que c’est ce document provenant du ministère du commerce et signé par le secrétaire permanent (PS) (ou quelqu’un d’autre) qui sert d’approbation. «C’est tout. Aucune autorisation venant du Conseil des ministres ou d’ailleurs n’est nécessaire.» Bien sûr, les employés de la STC vont vérifier par téléphone si la personne du ministère du Commerce a bien signé le devis, le montant et d’autres détails.
Une fois ces vérifications faites par le personnel de la STC, un board paper est préparé et soumis au conseil d'administration pour que le paiement soit approuvé. Le compte de la STC est alors débité et le fournisseur payé. Le montant sera remboursé par le ministère de la Santé après. Ce qui a effectivement été fait, nous dit-on, pour un total de Rs 1,2 milliard, juste avant la fin de l’année financière 2020 et les justificatifs présentés en bonne et due forme, nous assure-t-on. Il y en a eu beaucoup de ces achats d’urgence et Bo Digital avait à elle seule bénéficié de Rs 309 millions pour de tels contrats. Et selon nos informations, ces Rs 1,2 milliard ne représenteraient qu’un tiers des achats ainsi effectués.
Kas kontour
Mais pourquoi passer par la STC ? On a tenté de nous faire croire que les ministères n’avaient pas les ressources humaines disponibles durant le Covid-19 et que la STC, elle, les avait. En réalité, nous dit une source, «ce n’était qu’un stratagème pour contourner une dizaine de fonctionnaires au ministère de la Santé. De plus, si on est passé par le ministère du Commerce, c’est pour pouvoir mieux et aisément utiliser l’argent de la STC qui tombe sous ce ministère».
Le plus marrant dans l’histoire : on apprend que c’est un très haut personnage du gouvernement qui a trouvé ces caméras thermiques intéressantes et a ordonné d’en acheter une dizaine pour les hôpitaux et que ce n’est donc pas le ministère de la Santé qui est à l’origine de cette commande. Tous ces documents sont entre les mains de l’Independent Commission against Corruption depuis octobre 2020 et maintenant dans celles de la Financial Crimes Commission. Cela fera bientôt quatre ans.
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