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Projets hôteliers

Un pavé dans le plan directeur de Palmar

25 novembre 2023, 18:00

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Un pavé dans le plan directeur de Palmar

Extrait du plan directeur montrant le site où il est prévu que le projet hôtelier sorte de terre.

Le député Osman Mahomed, qui s’occupe du dossier du logement et de l’aménagement du territoire au Parti travailliste, s’interroge sur le «master plan» d’un projet hôtelier à Palmar. Plusieurs wetlands sont concernés.

Après Roches-Noires et Anse-la-Raie, c’est au tour de Palmar d’être soumis à de grands projets fonciers. La date limite de l’appel d’offres pour les investisseurs potentiels à l’Economic Development Board (EDB) pour un projet hôtelier à Palmar a été clôturée hier. Celui-ci sera érigé sur une superficie énorme de 238 arpents et 10 perches de terrain pied dans l’eau, comprenant plusieurs wetlands ainsi que l’ancien site de la station d’élevage, identifié par le ministère du Logement, de l’Aménagement du territoire et du Tourisme pour ce développement.

Les spécificités des projets sont notamment : trois sites hôteliers d’une superficie totale de 80 arpents, avec un accès direct à la route côtière en face de la plage publique; sept sites pour des projets touristiques ; un site pour un projet d’éco-tourisme à proximité de plusieurs zones humides, ainsi que deux complexes commerciaux (magasins, boîte de nuit, pubs, casinos et cinéma). La construction d’une maison de retraite, d’un restaurant, d’un marché artisanal, d’espaces verts et d’une station de dessalement commune est également envisagée. Alors que tout développement dans le pays est accueilli favorablement comme un moyen de générer des revenus, sa conceptualisation et son mode de réalisation sont une fois de plus à déplorer, affirme Osman Mahomed, soulevant des inquiétudes quant à l’impact environnemental et social du projet de Palmar, ainsi qu’au choix du promoteur à qui il sera attribué.

Plusieurs inquiétudes

Selon le plan directeur (master plan), la construction est censée être effectuée à partir d’une zone tampon de 30 mètres des zones humides, distance minimale prévue par la loi. «Insuffisante, car une distance de 30 mètres ne représente rien du tout», estime Osman Mahomed, de plus soulignant que Maurice a adhéré à la Convention Ramsar pour la protection des zones humides, ses efforts et son engagement devant être orientés vers le développement durable et la protection de l’environnement.

Le député avance également que des stations du ministère de l’Agro-industrie dans l’Est seront rasées pour faire de la place à de tels projets hôteliers et immobiliers. «Ayant eu des échanges à propos de ce projet avec Arvin Boolell (NdlR : qui a occupé le poste de ministre de l’Agriculture de 2005 à 2008), nous constatons que la plupart des terres de l’État à bail qui étaient auparavant allouées à des fins agricoles sont maintenant en train d’être changées à des fins touristiques. Je le redis, nous ne sommes pas contre le développement, mais on ne peut pas faire n’importe quoi au nom du développement.»

Des interrogations sur les réunions de consultation avec les parties prenantes et si les habitants de Palmar et les élus locaux ont été consultés sont également évoquées, d’autant plus que pour Anse-laRaie, cela n’a pas été le cas, et les habitants n’ont appris que par des questions parlementaires et des articles de presse que leur plage ne leur appartiendrait plus. Contactée, une source au niveau du conseil de district de Flacq confie que jusqu’à présent, «il n’y a pas eu de demande formelle au Conseil de district pour une quelconque réunion de consultation à laquelle assister concernant le projet de Palmar (...)».

Question parlementaire ce mardi

Au Parlement, mardi, la question d’Osman Mahomed, adressée au ministre des Finances, Renganaden Padayachy, sera axée sur le nombre de demandes de manifestation d’intérêt reçues à l’EDB et si le projet a fait l’objet d’une Strategic Environment Assessment avant d’être finalisé. Cette dernière, explique le député, a pour but «d’évaluer l’impact cumulé des activités déjà existantes sur le lieu avant la planification d’un projet. Nous parlons ici de 238 arpents, un terrain de 10 perches. Il s’agit d’un des plus grands master plans (...) Dans le cas d’Anse-la-Raie, les réunions de consultation avec les habitants et les élus locaux n’ont pas eu lieu, ce qui nous permet de déduire d’ores et déjà qu’une Strategic Environmental Assessment n’aurait pas été réalisée».

Le rôle de l’EDB est également en cause, avance Osman Mahomed. Dans le cas d’Anse-la-Raie, le 17 octobre, Deepak Balgobin, répondant pour le ministre du Tourisme et du Logement et des terres, absent du pays, avait informé que 22 personnes et entités ont fait la demande depuis 2015 pour bénéficier de ce terrain. Le 24 octobre, face à la question d’Osman Mahomed, Steven Obeegadoo, revenu à Maurice, devait reconnaître que Luxury Suites d’Avinash Gopee avait déjà reçu sa letter of reservation pour ce terrain. Bien qu’étant une entité fondée en 2018, celle-ci ne possède que Rs 10 000 comme actif et n’a aucune expérience dans le secteur hôtelier.

«Si l’EDB procède de la même façon (pour le cas de Palmar) qu’elle l’a fait dans le cas d’Anse-la-Raie, en donnant à un promoteur sans expérience dans l’hôtellerie et 10 000 roupies actives dans son compte, c’est extrêmement grave, soutient l’élu travailliste. J’attends que le ministre des Finances donne des détails sur qui ont fait la demande et qui obtiendra le terrain. J’espère que ce ne sera pas des petits copains. Le ministre aura quatre jours pour préparer sa réponse et je m’attends à ce qu’il en donne effectivement une. Si une Strategic Environment Assessment a été réalisée, elle doit être rendue publique.»

Par ailleurs, dans un article de l’express daté du 7 novembre, lors d’une due diligence pour vérifier la capacité financière d’un promoteur pour un projet d’investissement, il est évoqué que le comité technique de l’EDB ne se fonde pas sur les actifs de l’entreprise mais surtout sur le «profil» du promoteur. Ainsi, dans le cas d’Anse-la-Raie, non sur les actifs de Luxury Suites Ltd (Rs 10 000 seulement selon le Registrar of Companies), mais sur tout le groupe d’Avinash Gopee, également président de la Tourism Authority, pour lui accorder la financial clearance. Nous avons tenté de contacter Ken Poonoosamy, le Chief Executive Officer de l’EDB, mais il n’est pas au pays.

Rappelons aussi que le 21 novembre, soit mardi dernier, Osman Mahomed avait voulu poser une question au ministre Kavy Ramano sur la Strategic Environment Assessment pour le projet hôtelier à Anse-la-Raie. Mais le speaker lui a opposé un non catégorique et répétitif, l’empêchant même de terminer la question qu’il souhaitait poser. «J’espère qu’il n’y aura pas de delaying tactics cette fois-ci. Nos plages sont une propriété publique et il s’agit d’une question d’intérêt national», affirme Osman Mahomed.