Une situation qui risque de dégénérer si rien n’est fait pour la contrer. L’île soeur qui enregistre déjà trois morts tire la sonnette d’alarme. Il s’agit de la circulation d’une substance «500 fois plus puissante que l’héroïne» sur le territoire, comme l’a rapporté Réunion 1ère dans un reportage lundi dernier et d’autres médias réunionnais...

Quelle est cette drogue qui est «500 fois plus puissante que l’héroïne» et qui a déjà fait trois morts à La Réunion ? C’est en tout cas au début de ce mois de septembre que la nouvelle a été confirmée à l’île sœur, selon ses médias locaux. Ainsi le chef du service addictologie du Centre hospitalier universitaire de St-Denis, le docteur David Mété, a expliqué qu’il s’agit très certainement de «dérivés d’opium d’une puissance considérable», d’une «famille d’opioïdes synthétiques» qui n’a jamais été vue jusqu’à présent à La Réunion. La psychose commence à gagner le pays, un reportage au JT de Réunion 1ère conseillant même aux fumeurs de faire attention et de ne pas accepter de cigarettes d’étrangers.

D’où provient cette nouvelle substance hautement dangereuse ? La question reste complexe, souligne Réunion 1ère. Mais les regards se tournent notamment vers les pays de la zone, à savoir l’île Maurice et les Seychelles. Le Dr David Mété a cependant souligné «qu’il faut envisager toutes les hypothèses tant qu’on n’a pas de certitude, mais nous avons pris contact avec nos correspondants mauriciens et ils n’ont pas de cas avérés comme ici à La Réunion». À Maurice justement, l’Anti Drug & Smuggling Unit (ADSU) est dans le flou. Nous avons parlé à plusieurs sources qui confient que l’unité anti-drogue travaille depuis quelque temps à l’aveugle avec l’avènement de plusieurs nouvelles drogues sur le marché. «Nous n’avons jamais eu de formation à proprement dit sur les nouvelles drogues qui font surface. Avec le marché actuel et la demande qui augmente, plusieurs types de drogue se retrouvent sur le sol mauricien sans que nous ne sachions grand-chose sur le sujet.»

Par exemple, explique un de nos interlocuteurs, la méthamphétamine et le Crystal Meth font depuis un moment un énorme ravage dans plusieurs régions à travers le pays. «Même les usagers de drogue qui ont sombré dans cet enfer depuis des années, ne peuvent pas supporter ces drogues. Imaginez-vous ce que cela fera chez les jeunes qui commenceront à y toucher ?» Il explique que l’unité anti-drogue ne peut pas travailler en amont sur l’arrivée de nouvelles drogues sur le marché. «Ce n’est qu’une fois que ceci fait des ravages ou des victimes que nous pouvons agir. Mais il est déjà trop tard à ce moment-là.»

À titre d’exemple, le «simik papyé» (NdlR, aussi appelé «simik konfeti» est une drogue synthétique sous la forme d’une feuille de papier qui est ensuite découpée et fumée dans une cigarette) est sur le marché depuis un certain temps. Pourtant, ce n’est que récemment que l’ADSU a découvert cette méthode bien rodée des trafiquants et procède à des saisies. «Aujourd’hui, nous parlons d’une drogue 500 fois plus puissante, mais nous ne savons pas concrètement de quoi il s’agit. Est-ce sous forme de drogue dure ? Est-ce que cela se fume ? D’où les trafiquants se procurent-ils cette drogue ? Tant de questions qui resteront sans réponse», précise-t-on, jusqu’à qu’elle ait effectivement fait son apparition au pays. «Comment contrer cette situation car la drogue, on le sait tous, continue à rentrer. Si la réunion inn rési rentré, bé li posib ki li rentré ici osi...»

De son coté, Ally Lazer, travailleur social de longue date, se dit très inquiet de la situation après avoir été en discussion avec des collègues Réunionnais. «Nous avons échangé des informations et je peux vous dire que cela fait vraiment peur. Jusqu’ici, fort heureusement, je n’ai personnellement pas eu de cas.» Mais, précise le travailleur social, c’est justement la proximité Maurice-Réunion qui pose problème. «Nous sommes une véritable passoire avec la quantité de drogue qui arrive sur notre sol. On sait tous qu’il y a des horsbords qui font le va-et-vient entre les deux îles pour transporter la drogue. De ce fait, tôt ou tard, il est fort probable que cette drogue soit d’actualité également ici.»

Dans un monde où les choses progressent rapidement, explique nos sources de l’ADSU, les trafiquants non seulement innovent, mais ils sont aussi très compétitifs. «Ils sont toujours en quête de sensations encore plus fortes pour attirer un plus grand nombre de ‘clients’. On sait tous que quand vous êtes usager de drogue, vous êtes toujours à l’affût de nouvelles sensations jusqu’à ce que ce soit fatal...» Ally Lazer, pour sa part, soutient que rien ne pourra empêcher que ces nouvelles drogues fassent des victimes dans le pays si ce n’est que de travailler sur la réduction de la demande sur le marché. Pour cela, il faut, dit-il, miser sur la prévention, la prise en charge et la réinsertion des usagers de drogue.

Fentanyl, drogue «zombi»/«momi»

Selon les informations disponibles, cette drogue qui est qualifiée comme étant 500 fois plus puissante que l’héroïne serait le fentanyl, aussi connu comme la drogue «zombi» ou «momi». À titre d’information, la fentanyl fait des ravages depuis l’année dernière aux ÉtatsUnis. Ainsi selon des médias internationaux, aux ÉtatsUnis, toutes les sept minutes en moyenne, une personne meurt des effets du fentanyl. Cette drogue de synthèse peu onéreuse, créée à l’origine pour soulager les patients atteints d’un cancer, est cinquante fois plus mortelle que l’héroïne et cent fois plus que la morphine. Elle se diffuse sous toutes les formes : liquide, en poudre et en comprimés. Depuis 2022, la police antidrogue américaine, la Drug Enforcement Administration (DEA), a alerté au sujet de sa commercialisation sous une déclinaison multicolore pour séduire un public plus jeune et naïf. L’an dernier, la DEA a saisi près de 379 millions de doses de fentanyl, un record absolu. Les principaux importateurs sont deux réseaux criminels mexicains rivaux, le cartel de Sinaloa et le cartel de Jalisco nouvelle génération, l’une des cinq organisations les plus dangereuses au monde, selon le ministère de la Justice américain.

Que sait-on des victimes de La Réunion ?

Réunion 1ère parle de deux hommes âgés de 27 et 30 ans, issus du quartier de Terrain Fayard, qui ont été pris en charge par les secours à leurs domiciles respectifs dans la nuit du dimanche 9 juillet, avant finalement de succomber à un arrêt cardiaque. Les deux victimes se connaissaient et avaient passé la soirée ensemble avant de rentrer chez elles. Avant cela, le 27 juin, cette nouvelle drogue avait fait sa première victime ; un détenu de 22 ans avait été retrouvé inanimé dans sa cellule, située au troisième étage du bâtiment F du centre pénitentiaire de Domenjod, à St-Denis (D’ailleurs, c’est là où est incarcéré Jérémy Désiré Décidé, alias Nono, en attendant son procès pour trafic de drogue). Les autorités locales parlent aussi de plus d’une dizaine d’intoxications recensées, toujours suspectées d’être survenues des suites de la prise de cette drogue...