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Éducation
Vinod Seegum : «Support Teachers : la victoire d’un long bras de fer syndical»
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Éducation
Vinod Seegum : «Support Teachers : la victoire d’un long bras de fer syndical»

Vinod Seegum, négociateur de la Government Teachers’ Union (GTU)
Le diplôme pour les «Support Teachers», mesure agréée par l’ancien gouvernement et dont l’entrée en vigueur a été reportée une fois par le régime en place, devrait devenir réalité ce mois-ci. En tout cas, Vinod Seegum, négociateur de la Government Teachers’ Union, y croit. C’est ce qu’il indique dans cet entretien.
🔵 Quelles sont les principales difficultés rencontrées lors de la mise en place du diplôme pour les «Support Teachers» et comment ont-elles été surmontées ?
Il faut d’abord comprendre le rôle essentiel des Support Teachers (ST) dans le primaire. À l’époque du Certificate of Primary Education, puis avec le Primary School Achievement Certificate, le taux d’échec élevé faisait débat. Trop d’enfants terminaient leur cycle primaire sans savoir lire ni écrire. Il fallait des solutions concrètes. La GTU a alors proposé la création du poste deST, que j’appelais Remedial Teacher, pour accompagner les élèves en difficulté, qu’il s’agisse d’apprentissage, de troubles du comportement ou de handicaps légers. C’était un pas important vers une éducation plus inclusive. Nous avons bataillé pour faire exister ce poste malgré les contraintes budgétaires. Mais une injustice a vite émergé : ces enseignants ne recevaient qu’un Certificate alors que les autres grades obtenaient un diplôme. Il en résultait des frustrations, des disparités de statut et des écarts salariaux. La GTU s’est mobilisée dès le début pour corriger cette anomalie. Réunions, courriers, pressions continues…
Chaque Teachers’ Day, on nous promettait que le diplôme allait enfin voir le jour. Mais le dossier tournait en rond entre le ministère de l’Éducation, le Service Civil et les Finances. Le vrai blocage était administratif. J’ai alors sollicité une rencontre avec l’ancien Senior Personnel Specialist et demandé une réunion avec tous les acteurs concernés. Elle s’est tenue en juillet 2024. J’ai mis les choses au clair, allant jusqu’à menacer de faire une manifestation avec les 500 ST. Ce fut le déclic. L’annonce officielle du lancement du diplôme est intervenue le 23 septembre 2024 lors d’une cérémonie au Mahatma Gandhi Institute, en présence de tous les concernés. Il restait alors à débloquer les fonds, à faire valider le programme par la Higher Education Commission et à obtenir l’accord du Pay Research Bureau. Mais ma détermination n’a jamais diminué. Je considère lesST comme mes enfants. Et pour eux, je n’ai reculé devant aucun obstacle.
🔵 Pourquoi le poste de ST a-t-il suscité autant de critiques et d’opposition, malgré son importance dans le système éducatif ?
Le poste de ST est encore mal compris, et même dans les milieux scolaires. Beaucoup ignorent leur rôle véritable. Pourtant, leur mission est fondamentale : ils prennent en charge lesslow learners, ces élèves qui peinent à suivre le rythme en classe. Ils les accompagnent dans une salle dédiée, avec une pédagogie adaptée et un suivi personnalisé. Une fois que l’élève progresse et maîtrise les bases, il est réintégré dans sa classe, sous l’œil attentif du ST. Ce soutien ciblé est un levier majeur contre l’échec scolaire. Mais malheureusement, leur travail est souvent banalisé.
Dans plusieurs écoles, les Head Masters les détournent de leur mission pour remplacer les enseignants absents comme s’ils étaient de simples bouche-trous. Cela arrive dans presque toutes les écoles. Pire encore, certains les dénigrent, affirmant qu’ils ne sont «que certifiés», incapables de gérer une classe ou qu’ils ne sont pas de «vrais enseignants». Et l’inspectorat ? Très peu prennent leur défense. Ils ferment les yeux face aux dérives des chefs d’établissement. Face à cette injustice, j’ai alerté le ministère de l’Éducation et proposé la création d’une unité spéciale, dédiée aux ST, afin de traiter leurs doléances. Aujourd’hui, ils sont laissés-pour-compte. Mais le lancement du Diploma changera la donne. Il rehaussera leur statut, favorisera la reconnaissance de leur travail, et enfin, leur apportera le respect qu’ils méritent.
🔵 Pourquoi certaines personnes dans le secteur public semblent vouloir abolir le poste de ST, et quelles conséquences cela pourrait-il avoir sur leur intégration dans le système éducatif ?
La création du poste de ST a dérangé, notamment parce qu’elle émane d’une proposition syndicale. Certains décideurs, éloignés du monde éducatif, n’ont même pas cherché à comprendre l’utilité de cette fonction. Pire : certains tentent, encore aujourd’hui, de faire disparaître ce poste. Ce serait une catastrophe. En tant qu’enseignant de terrain, je peux affirmer qu’il n’existe aucune alternative aussi efficace. Ce n’est pas une vision théorique venue d’une tour d’ivoire. Dans les pays nordiques, deux enseignants par classe sont déjà la norme. La GTU aspire à ce modèle sur le long terme, tout en étant consciente des réalités locales. Pour Maurice, les ST représentent une planche de salut pour une éducation réellement inclusive et équitable. À condition, bien sûr, de renforcer leur formation et d’éliminer les frustrations qu’ils subissent encore trop souvent.
🔵 Comment le syndicat a-t-il joué un rôle crucial dans l’obtention du diplôme pour les ST et quelles actions concrètes ont été menées pour y parvenir ?
La GTU a exploré toutes les pistes possibles pour concrétiser le Diplôme desST. Pendant longtemps, personne ne voulait écouter, tant leur rôle restait incompris. Pourtant, nous avons tenu des dizaines de réunions avec les différents ministères concernés. J’ai également organisé plusieurs sessions de mobilisation avec les ST eux-mêmes. Le véritable tournant a été mon intervention déterminante, de près de deux heures, face aux hauts cadres des ministères du Service civil et de l’Éducation. C’est à ce moment-là que les choses ont commencé à bouger. Mais il a encore fallu insister pour que l’officialisation suive. Lors de la cérémonie d’annonce au MGI, en présence de l’ex-ministre de l’Éducation et de tous les responsables concernés, j’ai été invité à m’adresser aux 500 ST présents. Lancement prévu en janvier 2025, repoussé ensuite à juillet. Je reste aux aguets… Cette fois, je suis convaincu que ce sera fait.
🔵 Quelles démarches spécifiques ont été entreprises pour assurer l’approbation du ministère et garantir que le programme de diplôme démarre comme prévu ce mois-ci ?
Il fallait absolument corriger une injustice criante : tous les autres grades d’enseignants ont droit à un Diploma, sauf les ST. Pire encore, les Holistic Educators, postes créés en même temps dans le cadre de la réforme Nine Year Schooling, ont obtenu le diplôme dès le départ, avec un meilleur salaire. J’ai clairement averti que, sans avancée, j’irais en Cour et je gagnerai. Avant cela, j’étais prêt à organiser une manifestation monstre, comme je l’ai déjà fait dans le passé. Ces menaces ont fait bouger les lignes, malgré la lenteur administrative. J’ai aussi discuté avec le Mauritius Institute of Education :juillet doit être juillet. On m’a assuré que les lecturers seraient disponibles à cette période. J’ai exigé quetous les ST soient pris d’un seul coup afin d’éviter des disparités futures. J’ai aussi plaidé pour l’inclusion des nouveaux ST récemment certifiés, ainsi que des ST de Rodrigues, une demande acceptée positivement. Les listes définitives ont été soumises par le ministère de l’Éducation au MIE, qui agit comme prestataire de formation sous sa supervision. Sauf imprévu majeur, le diplôme démarrera officiellement le28 juillet.
Vers de meilleures conditions pour les ST : le ministre rassure
Le ministre de l’Éducation, Mahend Gungapersad, a exprimé sa reconnaissance envers les ST qui ont assuré la continuité pédagogique en l’absence d’enseignants titulaires. C’était mardi au Parlement alors qu’il répondait à une question de Babita Thannoo. Il a rappelé que ces enseignants, aussi bien dans le primaire que le secondaire, sont essentiels pour combler les absences temporaires dues à des congés ou lors de l’introduction de nouvelles matières dans le cadre des réformes éducatives. Conscient des inégalités entre les ST et enseignants permanents, notamment en matière de rémunération et d’avantages, le ministre a affirmé que des consultations ont eu lieu avec le ministère de la Fonction publique. Celles-ci ont abouti à l’élaboration d’un ensemble de propositions visant à améliorer les conditions de travail de ces enseignants précaires. Ces recommandations ont été transmises au Pay Research Bureau pour étude dans son prochain rapport. Dans l’attente de ces conclusions, le ministre Gungapersad s’est engagé à intégrer cette problématique dans la réflexion en cours sur la réforme éducative, notamment à travers les ateliers de validation qui suivront les Assises de l’Éducation. Objectif : une progression de carrière renforcée et un enseignement de qualité à long terme.
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Le ministère recrute des suppléants pour 2025
Le ministère de l’Éducation lance un appel à candidatures aux diplômés qualifiés, n’étant pas déjà au service du gouvernement, pour devenir enseignants suppléants dans les collèges d’État durant l’année académique 2025. Ce recrutement, sur base temporaire, vise à combler les besoins ponctuels en personnel enseignant dans treize disciplines clés, allant de l’anglais, du français et des mathématiques à des matières plus techniques comme le design & communication, la comptabilité, la biologie ou encore le kreol morisien. Ces enseignants suppléants seront appelés à intervenir en cas de pénurie, assurant la continuité des cours jusqu’en octobre 2025. Cette démarche s’inscrit dans une volonté de pallier les absences d’enseignants et de maintenir un enseignement de qualité dans les écoles secondaires. Critère d’âge : les candidats doivent avoir moins de 70 ans à la date limite de soumission des dossiers. Toutefois, les jeunes diplômés seront privilégiés. En cas de besoin dans certaines matières en pénurie, les services de candidats jusqu’à 70 ans seront également considérés. Une opportunité à saisir pour ceux qui souhaitent contribuer activement à l’éducation nationale.
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