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Appel d’offres : «Love me... tender»
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Appel d’offres : «Love me... tender»
Non, il ne s’agit pas de la célèbre chanson d’Elvis Presley, ni de l’épithète en anglais, mais du mot anglais «tender», mot magique pour certaines oreilles, mais malchanceux pour d’autres. Quant au citoyen lambda, il aura du mal à… tendre vers l’impossible. En matière d’appel d’offres, beaucoup de gens ignorent la situation, faute d’avoir su en… tendre. Pourtant, récemment encore, le Central Procurement Board (CPB) est venu expliquer à nouveau les normes à respecter en cas d’appel d’offres pour garantir une nécessaire concurrence. Un cadre législatif pour assurer la transparence et réduire les risques de corruption. Oh le vilain mot ! Alors qu’on a simplement besoin de… tendresse.
Le doute subsiste
Le rôle du CPB consiste à vérifier les documents soumis par ceux qui ont répondu à un appel d’offres, fixer les dates de clôture pour la réception et d’ouverture des soumissions, faire le constat de la situation, et finalement prendre des décisions. L’exercice semble clair mais alors, pourquoi le doute subsiste encore et taraude les esprits après l’ouverture des enveloppes cachetées ? Phrase entendue dans les couloirs : «Mo ti koné X ti pou gagn sa bid la» ou encore «pa lapenn soumet enn lof gagnan finn fini sonn pétar».
D’ailleurs dans son rapport de 2021-22, le CPB note que les procédures d’appel d’offres des organismes publics manquent de professionnalisme. D’où le bide ? Beaucoup de projets auraient été arrêtés, à la suite de soumission de chiffres irréalistes. Le CPB tient donc des réunions avec des institutions publiques pour vérifier ces documents soumis à la suite d’appels d’offres. Tout serait donc effectué «to enhance integrity and transparency».
Des rumeurs, pour ne pas dire de la méfiance, s’exercent surtout quand il s’agit d’Emergency Procurement. Rappelons que ce constat ne date pas d’aujourd’hui et que Maurice n’est pas une exception. En 2016, sir Anerood Jugnauth avait ordonné que des enquêtes soient menées autour de certains agissements dans le cadre de la Procurement Act. Concernant les pratiques en cas d’Emergency Procurement, beaucoup de pays, tels l’Irlande, le Japon, la Nouvelle Zélande, la Colombie, le Portugal et l’Ukraine, les ont remises en question et révisées. L’objectif est de combattre tout ce qui serait opaque, non-transparent. Mission impossible ?
Les produits médicaux
Durant la pandémie de Covid-19, la State Trading Corporation (STC) a dû avoir recours à ces Emergency Procurements (88 fois ?) pour importer des produits médicaux répondant à l’urgence. La perception du public est méfiante parce que ce sont dans de telles situations que les risques de corruption s’accroissent. Avant d’être approvisionné, on a déjà opéré par avance une sélection (taillée sur mesure ?) parmi les compagnies, ce qui n’est pas normal si on veut suivre la procédure. Cette dernière implique la compétitivité. Pour Transparency International, en ce qui concerne la santé, spécialement pendant la pandémie, on a constaté de par le monde une corruption élevée. Il y aurait eu «increased discussion of public officials in the award of these contracts».
En termes clairs, on peut fixer des spécifications qui conviennent a une firme précise. Cette dernière emporte alors le morceau sans coup férir. Dans d’autres cas, on restreint volontairement le nombre de «bids» pour favoriser certains (d’où le bide?). Comment alors ne pas douter que des directives du monde politique pour influencer le choix final ne manquent pas ? Cette corruption débouche parfois sur des fake products alors qu’il s’agit de santé publique. Ou alors l’approvisionnement arrive, mais il est de qualité médiocre. De l’argent jeté par les fenêtres ? Où sont les livraisons de Pack & Blister ? Pankor lev… paké?
Toujours dans le domaine des Emergency Procurements, on constate dans les coulisses un pouvoir discret, mais accru. Des abus ont été constatés (des lobbies ?). On abuserait de ce pouvoir pour remplir les poches d’alliés politiques ou d’amis proches. Ça ouvre la porte à des bribes de… corruption en argent liquide. C’est là que les lanceurs d’alerte doivent intervenir pour que ces magouilles cessent.
Des cas existent
Ces dernières semaines, l’express a fait état d’appels d’offres – pas un, mais plusieurs – traités à la va-vite sans les contrôles nécessaires au ministère de la Culture. On y cherche et peste contre ceux qui auraient vendu la mèche. Un cas précis où la presse aura joué son rôle. Le public est en droit de connaître le fond de cette affaire qui ressemble à une gabegie, maintenant étalée au grand jour.
La saga des millions de tonnes de câble en cuivre provenant de Mauritius Telecom et cédées à Tradeway international traîne désespérément en longueur. Autre cas similaire. L’affaire du gaz à FortGeorge saisie par le Procurement Board a mis le CEB au pied du mur. Nous ne savons pas tout mais des zones d’ombre subsistent, causées par un trafic d’influence. L’ICAC a fini par sévir dans un autre cas en arrêtant le directeur de la STC.
Dans le contrat alloué à la firme danoise BWSC, il n’y aurait même pas eu d’Emergency Procurement. Autre énigme encore non résolue. La STC, le CEB, certains ministères, l’ICAC… Tant de services publics ou parapublics concernés. Il n’est pas question ici de remettre en cause le personnel ou les organismes cités mais le grand public est souvent non-averti de toutes ces péripéties et dédales, sauf quand la presse fait son devoir. Est-ce seulement le sommet de l’iceberg (attention les pôles sont en train de fondre). Ne faudrait-il pas envisager des mesures à la hauteur de ces enjeux et cesser de patauger ?
Comme déjà souligné au début, des procédures pourtant claires ont été établies, expliquées et certainement respectées dans de nombreux cas. Mais ces cas relevés dans la presse mettent la puce à l’oreille. Des brèches ou contournements existent bel et bien. Certains n’hésitent pas à s’y engouffrer dès qu’il s’agit d’argent, le nerf de cette… guéguerre rampante.
Nous avions commencé avec Elvis, pourquoi ne pas s’extirper de ce magma et se procurer cette fois la chanson La tendresse de Daniel Guichard. L’occasion fait parfois le larron… planqué.
Dilo lor bred sonz?
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