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L'UE planche sur les limites du "droit à l'oubli" sur internet
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L'UE planche sur les limites du "droit à l'oubli" sur internet
Les régulateurs européens chargés de la protection des données personnelles, confrontés aux effets secondaires de l'application du "droit à l'oubli" sur internet, veulent définir des recommandations d'ici l'automne pour préciser ses modalités.
A la suite d'un arrêt rendu le 13 mai dernier par la Cour européenne de justice, les moteurs de recherche sont désormais contraints de répondre aux demandes de citoyens européens souhaitant que des informations les concernant disparaissent des résultats proposés, lorsqu'elles peuvent être considérées comme "inappropriées, hors de propos ou qui ne sont plus pertinentes", faute de quoi ils s'exposent à des amendes.
Le flux de requêtes enregistrées depuis a fait émerger des questions, notamment sur la champ d'application de la mesure et les régulateurs européens n'ont pas encore décidé s'ils doivent contraindre les moteurs de recherche comme Google ou Bing de Microsoft à effacer à l'échelle mondiale les informations tombant sous le coup du "droit à l'oubli" numérique dans l'Union européenne.
Isabelle Falque-Pierrotin - présidente de la Cnil française ainsi que du G29, qui regroupe l'ensemble des Cnil européennes - a indiqué lors d'une interview vendredi, au lendemain d'une réunion des différents acteurs concernés à Bruxelles, que les régulateurs européens n'étaient pas encore parvenu à un consensus sur cette question complexe.
Pour l'instant, Google, qui centralise près de 90% des recherches effectuées sur internet dans l'Union européenne, a choisi de supprimer les liens concernés uniquement sur les versions européennes de son moteur de recherche, ce qui signifie qu'ils apparaissent encore en réponse à des recherches effectuées sur google.com par exemple.
Mais étant donné la facilité avec laquelle l'internaute peut passer d'une déclinaison à l'autre du moteur de recherche, il a été reproché à cette approche de saper l'efficacité du "droit à l'oubli".
"Si vous délistez uniquement sur google.fr, par exemple, le droit à l'oubli est nettement affaibli", estime Isabelle Falque-Pierrotin.
Contacté vendredi, un porte-parole de Google n'a pas souhaité faire de commentaire. Microsoft et Yahoo n'ont pas encore indiqué l'approche qu'ils souhaitaient adopter à ce sujet.
Boîte de Pandore
Pour appliquer cet arrêt, les géants de l'internet se retrouvent en position d'arbitre et doivent trancher sur des cas individuels, en mettant en balance l'intérêt individuel de protection de la vie privée et l'intérêt collectif de protection de la liberté d'expression et de la libre disponibilité de l'information.
L'application de ce "droit à l'oubli" s'est ainsi retournée contre Google, le Guardian et la BBC ayant par exemple dénoncé au début du mois une forme de censure destinée à effacer le passé, après avoir été prévenus par le moteur de recherche de la suppression de certains de leurs articles.
Google estime que "de telles notifications s'imposent dans l'intérêt de la transparence", a indiqué Isabelle Falque-Pierrotin. Mais selon la présidente de la Cnil, elles génèrent une grande confusion et, dans une certaine mesure, sapent l'impact de la requête elle-même en remettant en avant le nom des personnes concernées.
Les régulateurs européens devront donc aussi se déterminer sur ce point dans leurs recommandations.
Pour Isabelle Falque-Pierrotin, "l'arrêt de la cour a ouvert une boîte de Pandore". Tous les acteurs impliqués doivent déterminer comment gérer ces requêtes d'une manière qui soit réalisable en pratique et défendable sur le plan du droit, a-t-elle expliqué
Le référentiel défini par le G29 visera également à fournir un cadre pour homogénéiser le traitement des demandes à travers l'UE car les citoyens européens dont la requête a été rejetée par un moteur de recherche peuvent se tourner vers le régulateur national dont ils dépendent. A ce jour, 50 demandes de ce type ont jusqu'ici été recensées à travers l'Europe.
Au total, Google a reçu plus de 90.000 requêtes entre le 30 mai et le 18 juillet, dont plus de la moitié ont été jugées recevables.
Selon une source proche du dossier, les citoyens français sont ceux qui ont soumis le plus de demandes (17.500), devant les Allemands (16.500), les Britanniques (12.000), les Espagnols (8.000), les Italiens (7.500) et les Néerlandais (5.500).
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