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Sunil Bholah: «Une véritable percée pour les entrepreneurs»

27 mars 2015, 13:13

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Sunil Bholah: «Une véritable percée pour les entrepreneurs»

Comment le gouvernement compte-t-il s’y prendre pour bâtir une nation d’entrepreneurs ?

Nous avons constaté qu’ils sont nombreux à avoir des idées. Mais celles-ci ne restent qu’au stade embryonnaire. On souhaite déverrouiller l’esprit créatif. Nuance toutefois, une nation d’entrepreneurs ne veut pas nécessairement dire que tout le monde sera entrepreneur. Nous voulons identifier ceux qui font preuve de créativité, tout en les laissant s’épanouir, de la conception jusqu’à la réalisation.

Il est du devoir du gouvernement de mettre à leur disposition les outils leur permettant de réussir. Et ce n’est pas du jour au lendemain qu’on y parviendra. Tout ce qu’on souhaite faire, c’est bâtir une plateforme et la laisser grandir. Les bénéfices ne seront pas visibles à court terme, mais ils évolueront.

Depuis l’indépendance, on est passé d’une économie agricole, puis manufacturière, à une économie de service. À l’époque, certains pessimistes voyaient mal comment passer de l’agricole au manufacturier. Ils étaient même inquiets quand on parlait de knowledge economies. C’est chose faite aujourd’hui.

 

Comment utiliser judicieusement ces Rs 10 milliards destinées aux entrepreneurs ?

Ces Rs 10 milliards sont à la disposition des entrepreneurs sur une période de cinq ans. C’est la SME Bank qui sera en charge de cette enveloppe. Il faut cependant faire ressortir que cette somme augmentera puisque d’autres banques commerciales participeront à l’initiative.

Il y a une série de mesures, d’institutions, de facilités et de moyens de financement mis à la disposition des entrepreneurs. Ils bénéficient de facilités sans garanties, en fonction de leurs projets et de la somme requise. C’est une véritable percée pour les entrepreneurs. On ne mesure pas encore la portée de cette décision, mais on le fera en temps et lieu.

 

Ce ne sera pas une autre source d’argent pour les petits copains ?

Non. C’est une grosse somme d’argent. Tous les projets seront passés à la loupe. On veillera à ce qu’ils soient innovants et à ce que des emplois soient créés.

 

Est-ce la mort de la Development Bank of Mauritius (DBM) ?

L’existence de l’une n’exclut pas celle de l’autre. La nouvelle SME Bank s’occupera des PME, alors que la Banque de développement, qui aura un rôle plus élargi, continuera à exister. La DBM devrait démontrer que son existence est «garantie». D’ailleurs, son conseil d’administration devrait la remettre sur une base saine.

 

La tâche d’aider les PME revient à la Small & Medium Enterprise Development Authority (SMEDA). Qu’adviendra-t- il de cette institution?

La SMEDA dispose d’un mandat étendu. Elle aura sous son égide une onestop shop chargée d’octroyer des permis aux entreprises. Une restructuration totale de la SMEDA aura lieu. Je suis confiant qu’elle sera à la hauteur des tâches qui lui seront confiées. D’ailleurs, on a déjà mis sur pied un comité afin de créer cette one-stop shop qui doit soumettre régulièrement un rapport au ministre des Finances.

La SMEDA Act sera amendée pour qu’elle joue pleinement son rôle. Il devrait aussi définir les catégories d’entreprises. Nous parlons de paramètres légaux, de l’aspect administratif et des ressources humaines. On ne réalise pas le travail effectué en ce moment. Nous passons à l’acte car «words without action are meaningless, but actions without words are confusing».

 

C’est bien de donner de l’argent. Quid du suivi ?

C’est la SMEDA qui fera le suivi. Le Mauritius Business Growth de la DBM passe aussi sous tutelle de la SMEDA. On tiendra les entrepreneurs par la main pour les aider. Ils obtiendront la formation nécessaire.

 

Une PME, c’est aussi de l’artisanat. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas de produits artisanaux mauriciens ?

En ma qualité de ministre, cette question m’interpelle tout autant que vous. Il y a une forme de concurrence déloyale. Ce qui se passe c’est que souvent les artisans mauriciens manquent de visibilité. Dans l’annexe du Budget, il est expliqué que les boutiques artisanales doivent accorder 20 % de leur espace aux produits mauriciens. La Tourism Authority Act sera amendée à cet effet.

 

On risque aussi d’y trouver des dodos fabriqués en Chine…

Il y a certes des produits venant de la Chine. Je trouve d’ailleurs écoeurant qu’il y ait, par exemple, des tubes de terres de sept couleurs fabriqués en Chine qui sont vendus ici. Nous prendrons les mesures nécessaires afin de mettre fin à cette pratique.

 

J’insiste. Comment créer l’artisanat mauricien ? Sera-t-il toujours question de la traditionnelle poupée de chiffon ?

Je suis d’accord que c’est limité. Il y a des gens qui fabriquent des choses merveilleuses comme des bijoux. Au centre d’exposition de la SMEDA, l’on retrouve déjà pas mal d’objets artisanaux. Cependant, ces produits ont peu de visibilité. Là au moins 20 % d’espace leur sera dédié dans les boutiques. Je reconnais qu’il faut davantage de créativité et permettre aux artisans d’affiner leurs produits.

 

Dans quel secteur les PME peuvent-elles investir ?

Un jour, j’ai assisté à un dîner avec le Premier ministre. Lors de son discours, il a déclaré que l’on importe trop d’articles qu’il est possible de produire à Maurice. À titre d’exemple, aux rayons frigorifiés de certains supermarchés, on trouve des légumes en sachets, comme des brocolis, des petits pois et des pommes de terre importés d’Europe, alors qu’on aurait très bien pu les produire nous-mêmes. 

Sous l’African Growth and Opportunity Act, il existe environ 7 000 items que l’on peut exploiter. Or, jusqu’à présent, on s’est concentré sur le textile. Il suffirait de choisir une dizaine de produits et de travailler dur, tout en mettant en place une stratégie de production. L’idéal serait aussi d’organiser des roadshows, comme cela se fait déjà pour le textile et le tourisme. Nous sommes sûrs de réussir si nous utilisons la bonne stratégie.

 

Vous parlez d’exportation. L’Europe et les États-Unis sont très stricts sur les normes…

Il va de soi que nous allons veiller à ce que nos produits aient les certifications nécessaires. Pour ce faire, il est important de respecter les normes d’hygiène. J’ai récemment visité une entreprise qui exporte des bananes frites vers l’Allemagne. J’ai été impressionné. L’emballage est attrayant. L’entreprise a même reçu des commandes du Bahreïn. Et le propriétaire est à la conquête d’autres marchés. Il souhaite augmenter son effectif qui compte 20 employés.

 

Les SME Parks, c’est aussi une idée de l’ancien gouvernement. Est-ce que cela marchera ?

L’un se trouve à Roche-Bois et l’autre à La Tour-Koenig. Ils sont déjà occupés. Et un troisième est prêt. Ces parcs sont équipés de toutes les facilités nécessaires. Vu qu’ils se situent loin des agglomérations, le problème de pollution sonore qui risquerait d’incommoder les habitants ne se posera pas. Les nouveaux SME Parks seront beaucoup plus grands.

 

N’estimez-vous pas paradoxal que le gouvernement parle de réduire les permis des PME ?

Non. Il faut comprendre la situation. L’entrepreneur est souvent découragé à force de courir dans tous les sens pour démarrer son business. La lourdeur administrative est éreintante. C’est dans ce sens que nous voulons qu’ils ne doivent se rendre que dans un seul lieu pour tout.

 

Le plafond pour l’enregistrement à la TVA passe de Rs 4 millions à Rs 6 millions. Qu’est-ce que cela signifie ?

Les entreprises avec un chiffre d’affaires de s 6 millions ne sont pas enregistrées à la Mauritius Revenue Authority pour la TVA.Cette mesure permettra d’éliminer des soucis administratifs. L’objectif : les aider à bien s’installer fi nancièrement.