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Nature : Cap sur l’île-aux-Aigrettes

19 avril 2015, 00:53

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Nature : Cap sur l’île-aux-Aigrettes

L’île corallienne de 26 hectares située dans la baie de Mahébourg, au sud-est de Maurice, renferme une riche biodiversité restaurée et préservée par la Mauritian Wildlife Foundation depuis 1985.

 

Rétablir sur une île corallienne classée réserve naturelle en 1965 non seulement la flore qui recouvrait autrefois les côtes mauriciennes mais également la faune qui y vivait – dans la mesure du possible –, tel est le pari que la Mauritian Wildlife Foundation (MWF) a entrepris de relever à partir de 1985. Trente ans plus tard, une visite de l’île-aux-Aigrettes, située dans la baie de Mahébourg, à 850 m de Maurice, permet d’apprécier l’immense travail accompli par l’organisation non gouvernementale.

 

Peu après notre arrivée sur l’île, au terme d’une courte traversée en bateau, nous sommes accueillis par le responsable de la pépinière depuis mai 2014, Abdullah Nuckcheddy. L’horticulteur attire d’emblée notre attention sur la relation entre la faune et la flore dans la réserve en nous montrant une branche basse de veloutier vert (Scaevola taccada) complètement dépouillée de ses feuilles. Il nous apprend que c’est là l’oeuvre d’une des 21 tortues d’Aldabra introduites sur l’île pour remplacer dans l’écosystème les tortues géantes mauriciennes disparues depuis longtemps. Ces reptiles, laissés en liberté, jouent un rôle primordial dans la propagation des espèces telles que le bois d’ébène de l’île-aux-Aigrettes(Diospyros egrettarum). Après en avoir mangé les fruits, ils en disséminent de fait les graines au moyen de leurs crottes.

 

Méthodes de défense

 

La flore endémique a par ailleurs adopté des méthodes de défense pour survivre à l’appétit des tortues. Ainsi, plusieurs espèces, à l’instar du bois de rat (Coptosperma borbonicum), sont hétérophylles, fait ressortir notre interlocuteur. C’est-à-dire que les feuilles juvéniles comportent une nervure centrale rouge, une couleur associée à la toxicité qui tient les tortues à distance. Une fois que la plante hétérophylle a atteint «environ 1 m 30», ses feuilles perdent leurs couleurs vives. Les plantules endémiques sont en outre très flexibles et donc résistantes au poids des tortues.

 

La végétation de l’île sert d’abri et de nourriture – par le nectar et les fruits – à trois autres reptiles : le scinque de Telfair, le gecko diurne orné ou gecko vert et le gecko de Günther, endémiques de Maurice. Le premier, introduit de l’île Ronde, s’est bien adapté et aide à contrôler la population de musaraignes, d’escargots géants d’Afrique, d’agames et de couleuvres asiatiques. Le gecko vert est quant à lui très attaché au vacoa (Pandanus vandermeeschii) qui le protège de ses feuilles à bords piquants. Il y trouve des insectes à manger et y pond même ses oeufs, explique l’horticulteur.

 

Visiter l’île-aux-Aigrettes, c’est aussi découvrir des oiseaux endémiques sauvés de l’extinction : le pigeon des Mares, l’oiseau à lunettes et le cardinal de Maurice. Réintroduits sur l’île, ils font l’objet  d’un suivi rigoureux. L’un des arbustes préférés des deux passereaux, nous indique Abdullah Nuckcheddy, est le bois de quivi (Turraea thouarsiana). Ils en assurent la pollinisation en se nourrissant du nectar de ses fleurs. S’agissant du pigeon des Mares, son alimentation consiste en des fruits tels ceux de l’affouche à petites feuilles (Ficus reflexa) et le bois de pipe (Hilsenbergia petiolaris).

 

[En images]

À l’île-aux-Aigrettes, la faune endémique trouve auprès des espèces végétales abri et nourriture :

 

La tortue géante d’Aldabra est friande des fruits de l’ébénier de l’île-aux-Aigrettes.

 

Un gecko vert sur l’inflorescence du vacoa (Pandanus vandermeeschii).

 

Le scinque de Telfair, peu capable de grimper, mange des fruits tombés à terre.

 

Le pigeon des Mares se nourrit des fruits et des feuilles de l’affouche

à petites feuilles (Ficus reflexa), entre autres.

 

 

La forêt d’ébéniers de l’île-aux-Aigrettes est illustrative des forêts

qui recouvraient autrefois les côtes mauriciennes.

 

 L’aloe tormentorii (mazambron de l’île Ronde).

 

La couleur de l’Hibiscus tiliaceus, jaune au départ,évolue en cours de journée.

 

Jeune bois mapou (Cyphostemma mappia), à la pépinière. 

 

Le Barleria observatrix près de la pépinière.

 

Le bois de fer (Sideroxylon boutonianum).

 

Le bois à poudre (Maytenus pyria).

 

Le bois puant (Foetidia mauritiana).

 

Le bois de quivi (Turraea thouarsiana).

 

Jeune bois de rat (Coptosperma borbonicum).

 

Le bois de poupart (Poupartia borbonica) 

 

L’orchidée Oeoniella polystachys sur le tronc du bois d’ébène (Diospyros egrettarum).

 

Un gecko diurne orné (Phelsuma ornata) a pris la pose sur le bronze du scinque géant (Leiolopisma (Disdosaurus) mauritiana), désormais disparu.

 

Le cardinal de Maurice (Foudia rubra).

 

 

La pépinière

 

Élément clé de la préservation de la flore indigène et endémique de Maurice et de ses îles, la pépinière de l’île-aux-Aigrettes compte quelque «3 000 plants pour une trentaine d’espèces», nous confie Abdullah Nuckcheddy. À pied d’oeuvre dès sept heures, il procède à l’arrosage des jeunes plants puis vérifie s’ils ne sont pas attaqués par des parasites. Auquel cas, il les traite avec de l’eau savonneuse (les pesticides sont exclus) ou enlève la partie affectée. L’horticulteur assure aussi la collecte de graines, boutures et plantules sur l’île et identifie les emplacements où il pourra faire de nouvelles plantations. Parmi les espèces les plus rares de la pépinière, il nous montre un bois jaune (Ochrosia borbonica) (photo 1) semé en 2011. Des graines étonnantes sont en outre exposées dont celle du latanier bleu portant chacune un motif unique, en forme d’arbre (photo 2).

(Photo 1)

 

(Photo 1)

 

Abdullah Nuckcheddy, responsable de la pépinière, inspectant les jeunes

plants à la recherche d’éventuels parasites.

 

 

Infos pratiques

 

Pour visiter l’île-aux-Aigrettes en compagnie d’un guide de la MWF, il suffit de monter à bord du bateau de la fondation, à Pointe-Jérôme après avoir fait les réservations nécessaires. Les heures de départ sont de 9 : 30 à 14 : 00 du lundi au samedi et de 9 : 30 et 10 heures les dimanches. Des visites organisées sont aussi prévues pour les écoles et collèges dans le cadre du «Learning with Nature Programme». Toutes les contributions aident aux travaux de conservation de la MWF sur l’île.