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Arif Havas Oegroseno
Deputy Coordinating Minister of Maritime Sovereignty Indonesia – Chair de la IORA Blue Economy Conference : «Les échanges commerciaux dans l’océan Indien n’ont pas encore atteint leur plein potentiel
Maintenant que la conférence sur l’économie bleue est terminée, quelles sont vos attentes ?
Et bien déjà, c’est l’application. Ce que nous ne voulons surtout pas, c’est que le mécanisme que nous venons de créer reste sur papier. Ce que nous voulons, ce sont des projets concrets afin que la Mauritius Declaration devienne réalité. Car, au final, le plus grand test pour nous sera de voir si la conférence aura apporté quelque chose aux populations qui vivent dans l’océan Indien, notamment ceux qui vivent dans les régions côtières, les petits États insulaires ainsi que les pays en voie de développement.
Mais cela fait plusieurs années déjà que l’on entend parler d’économie bleue…
En effet, l’économie bleue est à l’agenda depuis un moment déjà. Mais il faut savoir que l’on n’a jamais eu une réelle discussion sur le sujet. Cette conférence est une première. Ce qu’il faut retenir c’est que les Nations unies s’apprêtent à adopter les Sustainable Development Goals (SDG) et il y en aura 17. Le 14e objectif de la charte concerne la gestion durable des océans. Ce qui fait que la conférence tombe à point nommé.
En parlant des SDG, comment les États membres comptent-ils s’y prendre pour protéger l’environnement marin tout en faisant de l’exploration marine pour la recherche de minéraux et d’hydrocarbure ? Et quel pourrait être l’apport de l’Indonésie ?
Je pense que la réglementation a un grand rôle à jouer dans ce cas car l’exploitation minière sous-marine requiert une expertise pointue. Les pays membres de l’IORA qui n’ont pas encore cette connaissance et qui n’ont pas encore de cadre légal peuvent apprendre des autres. Par exemple, l’Indonésie a un cadre légal dans ce domaine. De plus, l’Indonésie et l’Australie peuvent travailler sur le renforcement des capacités pour les pays qui n’ont pas encore eu une extension de leur plateau continental. Maurice et les Seychelles travaillent ensemble làdessus mais d’autres pays ne sont toujours pas dans le pipeline.
Toujours est-il qu’un cadre régulateur demeure indispensable. En Indonésie, nous avons l’infrastructure et l’expertise dans ce domaine. Nous sommes disposés à offrir des formations et partager notre expérience à d’autres pays membres. Nous pouvons créer tout un réseau avec des officiels de la gestion des ressources. Bien que les connaissances ne soient pas uniformes parmi les pays membres, une bonne coopération avec les différents ministères des pays de l’IORA pourrait définitivement augmenter les connaissances des uns et des autres.
Le développement des technologies a également été l’un des points évoqués durant la conférence. De quel genre de technologie parle-t-on ?
Vous savez, le fait est que l’océan Indien est d’une profondeur assez impressionnante, au moins 7 000 mètres à certains endroits. La technologie pour explorer les fonds marins dans cette partie du monde coûte cher. Mais je ne pense pas que cela empêcherait les pays d’en utiliser. Dans ce cas, l’International Seabed Authority pourrait être d’une grande aide. Donc il y a définitivement des avenues de développement.
Quel est le potentiel économique de l’océan Indien ?
Il est énorme ! Il n’y a qu’à voir les différents aspects des économies de la région. Il y a les ressources naturelles ou encore la pêche mais pas que. En Indonésie, plusieurs entreprises ont investi dans la plantation de coraux. Mais je n’ai pas vu de grande ferme de corail ici. Pourtant, cette industrie est une véritable valeur ajoutée. Le potentiel est si grand qu’il reste difficile à quantifier pour l’heure. Par exemple, l’économie maritime australienne pèse 40 millions de dollars.
D’autres possibilités de développement seraient l’énergie océanique, qui reste sous-exploitée dans l’océan Indien. Et c’est sans compter les ressources non-biologiques. Là je parle des services, comme le service portuaire et la gestion de bateaux. Tout cela a un réel potentiel économique.
Quelle pourrait être la contribution de Maurice au développement de l’économie bleue ?
Tout d’abord, Maurice abrite le siège de l’IORA et elle dispose d’une économie développée. Vos infrastructures sont avancées. Vous avez un aéroport moderne, des routes en bon état, un secteur touristique développé. Vous pouvez définitivement devenir un modèle pour les autres pays.
Je songe actuellement à inviter certains gouverneurs en Indonésie, qui gèrent de petites îles, à visiter Maurice. Nous avons 17 000 îles en Indonésie et plusieurs d’entre elles peuvent suivre l’exemple de Maurice. Tout comme vous, nous avons de très belles plages et Maurice est un bon modèle pour nous et pour d’autres pays.
Mais quels sont les défis que nous devrons relever afin de concrétiser la création d’une véritable industrie de l’économie bleue ?
Déjà, il y a les différents niveaux de développement économique de chaque pays. La connectivité est aussi très lente. Les activités portuaires dans la région sont relativement minimes. Et une coopération entre les différentes douanes n’existe pas encore. Or, si cela devait se faire, le problème des tarifs serait réduit. De plus, le volume des échanges commerciaux dans la région océan Indien n’a pas encore atteint son plein potentiel. Je pense que dans le futur, un bon cadre régulateur dans les secteurs susmentionnés pourrait définitivement débloquer le potentiel économique des pays de l’IORA.
Quid des différences entre les pays membres ?
Je pense que c’est faisable. Si l’on regarde l’Asian Pacific Economic Cooperation (APEC), il y a trois non-state members, Taiwan, Hong Kong et Macao. Ce ne sont même pas des pays à proprement parler, mais plutôt des économies. Dans l’APEC, nous avons un grand pays comme la Chine mais aussi de petits États comme Brunei, qui n’a que du pétrole et du gaz, aucune industrie manufacturière avec une population de 200 000 habitants. Nous y voyons presque la même configuration. Donc je pense que le mécanisme de l’APEC peut être répliqué dans ce cas précis. Il ne faut pas non plus oublier qu’il y a une longue histoire de peuplement entre l’Afrique et l’Asie et nous devons tirer parti de cela.
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