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Analyse: Trou ou pas trou ?

13 septembre 2015, 09:38

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Analyse: Trou ou pas trou ?

La déclaration du ministre Bhadain au Parlement, mardi, sur l’affaire BAI, ne peut laisser indifférent. Sa performance vendredi soir lors d’un débat contradictoire face à Reza Uteem, non plus. 

 

En effet, voilà un gouvernement qui, en avril, poussait, correctement, à la mise aux arrêts de la Bramer Bank et, dans le sillage de celle-ci, de la BAI et de ses subsidiaires et qui pendant des mois parlait de Ponzi et de «trou financier» de plus de Rs 10 milliards depuis 2010 (KPMG), largement aggravé depuis et qui le 8 septembre vient déclarer qu’après tout, les contribuables n’auront rien à payer ! Comment est-ce possible ? Et si c’est possible, est-ce que cela voudrait dire qu’il n’y avait pas de «trou» en fin de compte, avec tout ce que cela impliquerait en termes de la justesse de la décision initiale de fermeture en avril ?

 

Premier constat : Le ministre Bhadain confirme à la télé une des hypothèses proposées par l’express depuis avril, notamment que les passifs, affichés à Rs 33 milliards, incluaient les « liabilities » futurs et contractuels des divers dépôts, single premium et life policies. Notamment les intérêts notionnels. Il a évoqué verbalement un chiffre de  Rs 10 milliards. C’est ce qui permet, après l’élimination de «toxic management fees» , certains «toxic assets» et autres «toxic salaries» , la pirouette financière qui, en finalité, voudrait dire que les investisseurs, y compris ceux de SCBG et Bramer Assets Management (BAM), pouvaient être repayés ! Sans intérêt, il est vrai, et avec un escompte de 15 % ( ou 20 %) dans le cas de BAM. Il était temps de le dire de manière transparente. Cela aurait évité beaucoup de méprises et de spéculations ! Et clairement, il fallait arrêter la BAI (et donc ses obligations contractuelles sur SCBG et BAM) afin que ce soit faisable !  Bhadain a été jusqu’à dire que la réalisation des prêts toxiques laissés derrière dans la NCB va générer des surplus pour les actionnaires ! Dont Reza Uteem ! On comprend son sourire…

 

Deuxième constat : Plus évident était le fait qu’en payant, sans intérêt, les Rs 19,2 milliards SCBG et les Rs 3,1 milliards de BAM, étalées sur cinq ans, cela donnait le temps, au moins théoriquement, de générer de la plus-value dans NIC, NCB, Britam et le reste. Le ministre Bhadain dit, habilement, être «informé par le nouveau Special Administrator, M.Yacoob Ramtoola de BDO» que Rs 13,8 milliards seront ainsi recouvrables des actifs qui restent et notamment de la vente de NIC Life, NIC General Insurance, National Commercial Bank Ltd ainsi que de diverses propriétés immobilières (Bramer House, Bramer Property). Un cash-flow de réalisation a été soumis, même si pas rendu public.

 

On veut bien, comme M. Uteem, croire ces réalisations faisables, mais, pour cela, il aurait fallu, en toute transparence, une liste détaillée, quantifiée des réalisations attendues, ce qui n’est pas encore le cas. En l’absence de cette liste et dans le flou, il est impossible de dire si ces estimations sont réalistes ou pas ! On peut supposer, mais c’est tout. Et pour arriver à Rs 13,8 milliards, on peut supposer qu’il faut évaluer la NIC et la NCB ensemble à environ Rs 10 milliards, ce qui laisse songeur quand on regarde les capitalisations boursières actuelles ( voir tableau ci-dessous ) ET, encore plus pertinent, quand on connaît la réalisation effective des actifs déjà mis en vente (Iframac, Apollo, Courts), par rapport à leur valeur d’abord estimée. Comme dans tous les cas de compagnies en détresse, en liquidation ou en Receivership , d’ailleurs… À cet effet, notons que l’hypothèse de réalisation de l’immobilier d’Apollo a été affichée à  Rs 1,6 milliard ce vendredi à la télé, alors que les offres faites à PWC en juillet n’ont certainement pas volé aussi haut… Qu’est- ce qui va changer ?

 

Quand bien même la NIC et la NCB peuvent être évaluées en termes de potentiel, basé notamment sur le nombre de clients qu’ils ont sur leurs livres, quand bien même la NIC génère des primes d’assurance de Rs 100 millions par mois ; la valeur effective de ces opérations dépend de leur capacité à générer des profits tangibles et «libres» pour les actionnaires… plutôt que des profits potentiels. Quels sont donc ces profits tangibles après que les primes ont été investies (plutôt, espérons-le, que partiellement utilisées pour payer un dividende à de nouveaux investisseurs, comme suggéré au Parlement …) ?

Ce qui laisse rêveur aussi, c’est que cette évaluation non précisée de Rs 13,8 milliards est faite sur une base qui n’est pas sans rappeler celle qu’utilisait la BAI elle-même, en son temps, pour masquer les problèmes qui s’y accumulaient, c’est-à-dire une base spéculative de «fair value» . Je me trompe peut-être et les estimations de M. Yacoob Ramtoola sont peut-être plus fermes que celles qu’entérinait M. Dawood Rawat, mais nous ne le saurons vraiment qu’au moment où il y aura un «willing buyer and a willing seller» ou si l’on veut bien, être, entre-temps, transparents et nous expliquer. Ce que l’on a commencé à faire ce vendredi. Et nous comprendrions même que la priorité des derniers mois était ailleurs qu’à la communication, mais à bien y voir on a, lors de cette période, surtout communiqué sur les «trous», les détournements, les gros salaires, le Ponzi, c’est-à-dire l’horreur, plutôt que sur ce qui a été, enfin, plus mûrement, expliqué vendredi par un ministre indéniablement bien calé sur ses dossiers. Et qui, en plus, prenait le crédit, par ailleurs mérité, du premier débat politique contradictoire à la MBC, depuis plus de dix ans !

 

Cependant, gageons qu’il sera aussi nécessaire d’investir plus que quelques mois de patience et donc de frais, notamment légaux, bien au-delà des Rs 28 M chichement concédées à PWC et aux Rs 5,5 M négociées avec BDO, pour chatouiller toutes ces possibilités de recouvrement ? Surtout si on est amené à défendre des cas en Cour de justice (Dawood Rawat, Courts [Asia], PWC), à saisir des biens personnels à l’étranger et à chercher des compensations diverses auprès des directeurs et des pourvoyeurs de services professionnels, style KPMG. On va nous le dire aussi, cela ?  Un jour ? Ou un autre vendredi soir ?