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Jawaharlall Lallchand: «S’il fallait licencier ceux qui sont sous-qualifiés, 75 % des employés de la MSC seraient à la porte»

23 novembre 2015, 20:00

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Jawaharlall Lallchand: «S’il fallait licencier ceux qui sont sous-qualifiés, 75 % des employés de la MSC seraient à la porte»
Son but : faire de la MSC un modèle en matière de gestion mais aussi éviter qu’elle ne se retrouve en eaux troubles une nouvelle fois.
 
Comment est-ce que la Mauritius Shipping Corporation (MSC) en est arrivée là ?
Quand je suis arrivé à la tête de la MSC en février, elle était dans un état de désolation. Rs 260 millions de pertes sur les cinq dernières années, ce n’est pas rien. Le gouvernement a décidé de couper les finances de la MSC, vu les prêts et les pertes antérieurs.
 
Au même moment, nous devions débourser Rs 40 millions pour MV Anna pour six mois, mais les caisses étaient plus que vides. Or, un bateau est primordial pour nos îles extérieures. Nous avons donc conclu un deal qui consistait en la prise en charge des coûts du MV Anna par le gouvernement sous réserve que la MSC soit restructurée.
 
Je me concentrerai davantage sur ceux qui intégreront la compagnie à partir de maintenant, plutôt que sur le passé.
 
Cette restructuration est loin de plaire à tout le monde…
Une restructuration ne plaît jamais à tout le monde. Ceci dit, nous avons essayé d’être le plus humain possible et il faudrait que le syndicat prenne ses responsabilités. Ce sont eux qui ont écrit au ministre pour dénoncer la situation actuelle. Ils ont parlé de l’ingérence politique en citant des noms. Des nominations outrancières qui ont été faites à tous les niveaux… C’est pour ces raisons que la MSC est en eaux troubles.
 
Quant aux licenciements, pour arriver à cette liste, nous nous sommes basés sur le principe de «last in first». Cette tâche n’a pas été simple. Cela fait un certain temps déjà que les syndicats ont, entre les mains, la liste des 30 employés, mais ils n’ont pas pris la peine de les contacter pour leur faire part de nos propositions.
 
Quelles étaient ces propositions ?
Nous avons 30 employés en plus. Ce fait est établi. Il faut que le syndicat se rende compte que, pendant des années, ces personnes ont occupé des postes qui ne leur étaient pas destinés. C’est de l’injustice. Mais nous sommes ouverts à la discussion. 
 
Prenons le cas des managers de plus de 50 ans. Nous les encourageons à partir pour laisser la place à
du sang neuf. Nous sommes disposés à leur donner plus que ce qui est légalement prévu et considérer leurs propositions au cas par cas s’ils désirent un VRS. Malheureusement, le syndicat ne semble pas avoir transmis ces informations aux employés.
 
Qu’en est-il de la restructuration ?
C’est une étape évidente en raison de cette mauvaise gestion. 75 % des employés ne sont pas qualifiés ou sont surpayés, d’où la performance déplorable de la MSC. C’est la base même qui est pourrie. Il faut la consolider avant de parler de remettre la compagnie sur les rails.
 
Pour cela, il faut injecter de la compétence. Ensuite, il faudra avoir un business model viable car la MSC n’est plus compétitive. Les dix départements existants seront ramenés à six. D’où la liste des 30 employés redondants.
 
Si le board de la MSC devait licencier tous ceux qui étaient sousqualifiés, 75 % des employés seraient à la porte. Il est impossible de prendre une telle mesure. Nous avons trouvé l’équilibre. Mon but est de faire de la MSC un modèle profitable en matière de gestion de corps parapublics.
 
J’ai aussi prévu de mettre en place un système démocratique, où les employés auront leur bonus par rapport à une évaluation du directeur à la fin de l’année. Évidemment, les employés devront aussi noter le responsable. Le but est d’instaurer un système transparent et humain.
 
Le départ de 30 personnes suffit-il pour que la compagnie se refasse une santé ?
Bien sûr que non. Cela se fera à travers toute une série de mesures. Il y a, par exemple, le gouffre des allocations qui sera simplement supprimé. Les employés auront une part des profits réalisés sur l’année et selon leur performance. De plus, aucune augmentation ne sera accordée avant que la compagnie ne réalise des profits sur deux années consécutives. C’est prévu dans le plan. La profitabilité de la compagnie passe obligatoirement par le bien-être et la motivation des employés.
 
Nous pensons aussi mettre en place un système où ils changeront de département tous les deux ans. Le moral des employés sera au centre de la nouvelle MSC.
 
Vous avez été «Risk Structuring Leader» dans le privé pendant longtemps. Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées dans le secteur public et que vous n’avez pas retrouvées ailleurs ?
Le gros problème est la politique. Tout le monde connaît quelqu’un qui connaît un politicien. Personne n’avouera qu’il a occupé une position pour laquelle il n’a pas les compétences requises pendant des années. Dans le privé, le mécanisme et le processus de restructuration sont très bien compris. Dans le public, les policymakers n’en comprennent pas toujours la nécessité. Il faut venir avec une campagne d’éducation au préalable. C’est une culture différente qui reste à être instaurée.