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Philip Baker: «Maurice n’aurait pas dû être sur la liste des paradis fiscaux»
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Philip Baker: «Maurice n’aurait pas dû être sur la liste des paradis fiscaux»
Invité par la FSC pour un séminaire sur le «Base Erosion Profit Shifting», Philip Baker, QC, Field Court Tax Chambers, parle des nouvelles mesures proposées par l’OCDE contre l’évasion fiscale.
Nous entendons souvent parler de paradis fiscaux mais la définition demeure floue. Pouvez-vous nous en dire plus?
ll n’y a pas vraiment de définition. Certains classifieraient les États-Unis et le Royaume-Uni comme des paradis fiscaux, par exemple. L’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) procède depuis 20 ans déjà à l’identification de paradis fiscaux. Elle a développé plusieurs critères, dont le manque de transparence, c’est-à-dire qu’il est très difficile d’obtenir des informations sur les activités des résidents.
Il y a très peu de pays qui font preuve de manque de transparence aujourd’hui. Et Maurice fait partie des pays qui se conforment à toutes les réglementations ayant trait à l’échange d’informations et la transparence.
Dans ce cas, comment expliquer que Maurice fasse partie de la liste des paradis fiscaux publiée par l’Union européenne (EU), alors qu’il y a quelques jours, l’Espagne et le Portugal ont décidé d’enlever Maurice de leurs listes?
Honnêtement, la liste publiée par l’UE était une erreur. Et je ne pense pas que quelqu’un l’ait prise au sérieux, hormis les Mauriciens. Chaque pays de l’UE possède sa propre liste de pays qu’il qualifie de paradis fiscaux selon ses propres critères. Certains copient sur d’autres.
Et dans d’autres cas, la liste n’est pas régulièrement mise à jour. C’est en tenant compte de ces listes que l’UE a décidé de créer sa propre liste, en y incluant les pays qui se retrouvent sur la liste d’au moins dix pays.
Or, Maurice avait déjà été soit retiré soit éliminé de certaines listes au fil du temps. Du coup, Maurice n’aurait pas dû figurer sur cette liste. Et il y a un certain embarras au sein de la Commission de l’UE par rapport à cela. Le fait que l’Espagne et le Portugal aient décidé d’enlever Maurice de leur blacklist découle du fait que leurs listes n’étaient pas à jour et que Maurice coopère avec l’OCDE tout en étant conforme aux réglementations.
Pouvez-vous nous rappeler ce qu’est le BEPs ?
C’est un projet de l’OCDE qui a débuté il y a plus de deux ans. L’objectif était d’identifier les problèmes liés à la taxation des profits de grandes multinationales. Cette démarche a été motivée par le fait que plusieurs grandes multinationales se sont déplacées vers des juridictions à faible imposition tout en réduisant artificiellement leurs taxes dans les juridictions à fiscalité élevée.
Le projet n’affecte pas réellement Maurice, qui ne travaille pas directement avec de grandes multinationales. Ceux qui sont les plus concernés sont les États-Unis, la Suisse, les Pays-Bas et le Luxembourg. Mais lorsque les solutions ont une visée globale, comme le fait l’OCDE, cela peut avoir des implications pour d’autres pays.
Il est donc important pour Maurice de connaître les solutions qui sont proposées. Il y a quelques «dommages collatéraux» découlant du projet BEPs, qui peuvent affecter des juridictions comme celle de Maurice.
Et de quoi s’agit-il?
Par exemple, il a été proposé de changer les bilateral tax treaties afin de prévenir les abus. Mais la principale préoccupation demeure les abus des multinationales. Toutefois, si elles adoptent des principes généraux, cela peut aussi affecter les petites juridictions.
Cela sonne-t-il le glas des traités de non double imposition dans leur forme actuelle ? Sachant que Maurice est toujours en négociation avec l’Inde à ce propos…
Nous pensons qu’il y aura des amendements aux anciens traités fiscaux à travers le BEPs. Mais nous ne savons pas si Maurice appliquera ces changements au traité indo-mauricien. L’Inde pourrait soutenir certains des changements proposés. Mais il se pourrait qu’elle fasse une exception pour le traité fiscal avec Maurice.
Et comment Maurice devrait-il se positionner face à ces changements ?
Maurice devrait attendre et voir comment les autres pays vont réagir. Après la période de préparation à partir des propositions de l’OCDE et du G20, nous sommes maintenant en phase d’application. Et nous attendons de voir comment l’Inde ou les pays africains appliqueront les réglementations. Il n’y a pas vraiment de pression pour que Maurice agisse rapidement. En outre, il n’est pas certain que tous les pays adopteront les propositions du BEPs.
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