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Statistics Mauritius: compensation salariale en hausse, faible productivité

8 mai 2016, 15:05

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Statistics Mauritius: compensation salariale en hausse, faible productivité

 

Le rapport de Statistics Mauritius sur le niveau de la productivité du pays est éloquent. Dans ce document publié le jeudi 5 mai, nous apprenons que la moyenne annuelle des compensations salariales a augmenté de 6,6% entre 2005 et 2015. La productivité n’a, quant à elle, augmenté que de 2,7% pour tous les secteurs de l’économie. Qu’est-ce qui explique cet écart?

Ces chiffres sont loin d’étonner le chairman de la Mauritius Export Association (MEXA) Yogesh Singh. «Cela fait des années que nous faisons ressortir ce gap au gouvernement», explique-t-il. «Si la moyenne annuelle des compensations salariales a augmenté, cela n’assure en rien une meilleure productivité, car le secteur manufacturier mauricien demande une forte main-d’œuvre.» Raison pour laquelle, selon lui, il ne serait pas bon d’augmenter le salaire de base, comme l’envisageait le gouvernement. Car cela aurait pour effet d’augmenter les coûts de production, sans pour autant accroître la productivité.

«Lorsque les entreprises paient plus sans que la productivité augmente, cela réduit considérablement leur capacité à investir», déplore Yogesh Singh. Or, l’investissement privé, comme l’ont fait ressortir les associations du secteur privé, dont la Chambre de commerce et de l’industrie de Maurice à travers le business confidence indicator, demeure un des facteurs clés pour relancer la croissance.

Comment alors pallier ce problème ? «Il est impératif que nos industries migrent vers une production requérant d’importants capitaux.» Et d’ajouter que ce rapport est le signal qu’il est temps d’apporter ce changement, un point à aborder dans le Memorandum of Understanding (MoU) de la MEXA dans le cadre du Budget. Au niveau du secteur manufacturier, la moyenne annuelle de la compensation salariale a augmenté de 5,9% alors que la productivité n’a augmenté que de 2,7% entre 2007 et 2015.

Ce tableau indique les tendances des indices de productivité de 2007 à 2015. (Source : Statistics Mauritius)
Ce tableau indique les tendances des indices de productivité de 2007 à 2015. (Source : Statistics Mauritius)

Au niveau de Business Mauritius, l’organisme représentant le secteur privé, le Chief Operating Officer (COO), Pradeep Dursun, fait ressortir que cette tendance a été anticipée dans le MoU de l’organisme, préparé dans le cadre du Budget 2016-2017. «Les légers gains en productivité que nous avons observés ces dernières années sont principalement dus à des restructurations dans le management de certaines entreprises.»

Changer de mentalité

Mais le danger, selon lui, c’est que cette tendance à faible productivité se pérennise. «La transition vers une augmentation de la productivité va devoir passer par l’innovation, en changeant la façon de travailler et en minimisant les lourdeurs administratives.» Mais tout cela requiert un véritable changement de mentalité, ajoute-t-il.

«Cela ne veut pas forcément dire travailler plus. Il faudrait, au contraire, venir avec de nouvelles idées and challenge the status quo.» Cela devrait, entre autres, passer par l’apport technologique et l’investissement dans le capital humain. «Nous devons aller vers une innovation-driven economy, avec des gens formés, qualifiés», soutient le COO de Business Mauritius.

Qu’en est-il des employés ? Quels sont les facteurs qui expliqueraient cette faible progression de la productivité? Pour le président de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP), Reaz Chuttoo, il ne faudrait surtout pas interpréter ces données de façon simpliste. «Il faut savoir qu’entre 2005 et 2015, c’est un sentiment de morosité qui s’est installé dans l’économie, ce qui a affecté l’efficacité des travailleurs.» Et d’ajouter qu’il y a également eu une augmentation de la précarité à la suite de «décisions politiques qui découragent les travailleurs».

Ce que propose Reaz Chuttoo : amener une meilleure balance entre la main-d’œuvre et le capital. «Il faudrait que l’employé devienne une véritable partie prenante de la richesse qu’il est en train de créer, au lieu que les entreprises se contentent de payer des dividendes aux actionnaires.»