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Touria Prayag: «Des vies humaines brisées par l’abus d’une loi archaïque»
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Touria Prayag: «Des vies humaines brisées par l’abus d’une loi archaïque»
Dans votre prologue, vous dites que c’est un entretien avec Hassenjee Ruhomally qui vous a poussée à écrire le livre «Provisional Charges». Pourquoi ?
J’ai été très touchée par son histoire. C’est un homme qui n’a jamais eu de démêlés avec la justice. Le seul crime qu’il a commis c’est d’avoir publié un post sur Facebook.
Ce qui lui est arrivé par la suite est cauchemardesque. Il s’est fait arrêter deux fois, une avec sa femme. Sa maison a été fouillée de fond en comble. Sa famille a été traumatisée.
Qui plus est, il a continué à mener une lutte à la suite de sa sortie de prison, car il ne voulait pas que ce genre de traitement devienne la norme pour tout citoyen qui ose exprimer une opinion différente de celle des personnes au pouvoir.
Les recherches que vous avec menées en rédigeant le livre semblent vous avoir frappée ?
Oui. Je ne m’attendais vraiment pas à ce que les arrestations basées sur des accusations sans fondement soient si communes. Mais ce qui m’a le plus choquée, ce sont la façon de faire de la police et l’humiliation que les personnes interpellées subissent.
Toutes ces ressources déployées pour arrêter et humilier des citoyens qui n’ont jamais eu de problème avec la justice. Des gens à qui on demande de se mettre nus pour regarder dans leurs parties intimes, leur refuser une serviette pour se protéger contre la crasse des matelas des centres de détention, leur passer des menottes… Ça rime à quoi au juste ce délire ?
À voir les moyens auxquels les policiers ont recours pour arrêter et intimider les innocents, on se demande ce qu’il leur reste comme temps et ressources pour s’attaquer au grand banditisme et à la vraie criminalité ! Et après toute cette humiliation, tyrannie même, n’ayons pas peur des mots, il n’y a pas eu une seule condamnation ! Les lecteurs ont été choqués par le résumé en photos à la fin du livre qui fait état de tout ça.
Dans votre livre, vous avez également mentionné l’indifférence. Vous ciblez qui en particulier ?
Nous, en tant que société. Car tant que cela ne nous touche pas de près, nous n’accordons pas d’importance à ces cas d’injustice, d’humiliation, d’intimidation et de manque de respect envers les droits humains.
N’importe qui, qui lit le livre ne peut rester indifférent au courage et à la grâce de ces hommes et femmes qui ont accepté d’en parler, même s’ils reviennent sur une expérience traumatisante qui ressemble, en fait, à un viol.
Quelle est la solution?
La balle est désormais dans le camp de la profession légale, de ceux qui ont la possibilité de changer des choses. Car on ne parle pas de statistiques, mais de vies humaines qui sont brisées par un abus d’une loi archaïque.
Tout ce que le journaliste peut faire, c’est alerter le public. Et c’est ce que je pense avoir fait à travers les histoires racontées dans ce livre. J’espère que la lecture aidera aussi les victimes à se reconstruire.
Vous êtes satisfaite de l’accueil qui a été réservé à votre livre ?
Mon éditeur est plus que satisfait. La plupart des librairies sont en rupture de stock. Sur le plan humain, c’est un livre que j’aurais souhaité ne jamais avoir à écrire. Une publication qu’aucun Mauricien ne devrait avoir à écrire.
A lire aussi : Lancement du livre «Provisional Charges»: Touria Prayag s’intéresse aux drames humains
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