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Economic Mission Statement: la barre placée trop haut ?
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Economic Mission Statement: la barre placée trop haut ?
Un an après la présentation de la Vision 2030 du gouvernement Lepep, les opérateurs ne voient pas de progrès tangibles qui pourraient mener au second miracle économique. Mais au gouvernement, on soutient que c’est un travail sur les court, moyen et long termes.
Flashback. Samedi 22 août 2015. Devant un parterre d’invités, incluant le gratin du secteur privé, le Premier ministre présente la vision économique 2015- 2030 du gouvernement. Depuis, un an s’est écoulé. Et force est de constater que les initiatives du gouvernement en vue de réaliser le second miracle économique n’ont rien donné de concret jusqu’ici.
Du côté des opérateurs et autres spécialistes financiers, on s’interroge. «La vision d’un chef d’État, qu’elle soit économique, sociale ou politique, reste une vision. De ce fait, elle ne peut être assortie d’estimations de croissance ou encore d’obligations de résultats par rapport à la performance des secteurs économiques», fait ressortir Azad Jeetun, économiste et ex-directeur de la défunte Mauritius Employers Federation. Selon lui, l’équipe qui a travaillé sur la Vision 2030 a placé la barre trop haut. Il cite la croissance économique estimée à 5,5 % en 2017. «Nous sommes à quatre mois de 2017. Il sera difficile, voire impossible, de porter la croissance à 5,5 %, contre son taux de 3,4 % actuellement.»
Idem pour les investissements qui seront mobilisés par les opérateurs financiers durant cette période. «À un moment où le taux d’investissement est en chute libre à 17 % du PIB et que la partie relevant du privé est en régression d’une année à l’autre, comment peut-on s’attendre à attirer des investissements de Rs 185 milliards?» s’interroge Azad Jeetun.
Appel à la patience
Une opinion partagée par John Chung, Managing Partner chez KMPG. Il pousse la réflexion plus loin. «Où sont les mesures pour développer le secteur manufacturier ou encore sa vision pour positionner Port-Louis comme le port de la région ?» se demande-t-il.
D’autres spécialistes citent, eux, notamment, l’ambition du gouvernement de créer 100 000 emplois à l’horizon 2019. Comment, à deux ans de cette échéance, peut-on réaliser cet objectif, alors que, lâchent-ils, «on n’a pas pu créer 10 000 emplois en une année».
Toutefois, Sudesh Lallchand, conseiller du ministre des Infrastructures publiques et du transport intérieur, qui a été étroitement associé à la préparation de la Vision 2030 du gouvernement, lance un appel à la patience. D’emblée, il précise que ce document est une feuille de route étalée sur une période de 15 ans et que les projets annoncés sont réalisables sur les court, moyen et long termes. De souligner, dans la foulée, que le Budget 2016-17 présenté par Pravind Jugnauth, le 29 juillet, contient des mesures annoncées lors du discours de sir Anerood Jugnauth, l’année dernière. Mesures qui portent l’empreinte, avance Sudesh Lallchand, des membres du National Advisory Committee. Instance suprême mise en place pour assurer le suivi des mesures phares annoncées dans la Vision 2030.
Parmi celles-ci, on retrouve l’ouverture de l’accès aérien. Un dossier sur lequel, souligne Sudesh Lallchand, le gouvernement a beaucoup progressé. D’ailleurs, un comité a été institué pour faire le suivi sur les projets. «Aujourd’hui, avec l’ouverture du couloir Asie- Maurice-Afrique, la libéralisation de l’accès aérien est devenue une réalité, clame Sudesh Lallchand. C’est le fruit de longues discussions entre les membres du gouvernement et ceux du privé autour de ce projet qui a longtemps fait débat. Il est faux de dire que rien n’a été fait.»
Autre dossier qui a avancé: la lutte contre le chômage. Le Budget 2016-17 fait la part belle à plusieurs mesures en vue de venir à bout de ce problème social, fait valoir le conseiller du ministre Nando Bodha. Mesures qui portent visiblement l’empreinte du comité sur l’emploi qu’il préside personnellement.
«L’idée de mettre en place une agence nationale de l’emploi est une proposition de ce comité qui a été constitué pour apporter des mesures durables à la problématique de l’emploi.» Sudesh Lallchand cite également des mesures spécifiques en faveur des ingénieurs chômeurs. Il est d’avis que grâce à celles-ci, Pravind Jugnauth a permis à ces jeunes professionnels d’être embauchés dans des institutions parapubliques, comme la Central Water Authority, Mauritius Telecom, la Compagnie nationale de transport ou encore le Central Electricity Board.
Tout cela fait dire à Sudesh Lallchand qu’à terme, le pays passera à un autre palier de son développement, en sortant d’une économie à revenu intermédiaire pour passer à celle d’un pays à revenu élevé. D’ici 2030.
Vision 2015-2030 : quelques mesures phares
Création de 100 000 emplois dans le secteur privé
Selon l’Economic Mission Statement du Premier ministre, une quarantaine de projets d’envergure ont été lancés dans le secteur privé. Ils devaient générer 100 000 emplois d’ici 2019 et nécessiter des investissements de Rs 183 milliards. Les 100 000 postes devaient être répartis comme suit : secteur financier (15 000), informatique (15 000), économie bleue (25 000), santé et biotechnologie (2 000), éducation (3 000), tourisme (8 000), secteur manufacturier (5 000), construction (15 000), logistique (3 000) et PME (9 000).
Rs 15 Mds pour les chantiers routiers
Le programme de décongestion routière devait nécessiter des investissements de l’ordre de Rs 15 milliards jusqu’en 2019. Les principaux projets : la route St-Patrick, en passant par St-Jean, Belle-Rose, Beau-Bassin, Coromandel jusqu’à la gare Victoria à Port-Louis.
- Une route de l’aéroport à Roche-Bois en passant par Nouvelle- France et Port-Louis.
- Ring Road connectée à la M2 (Roche-Bois jusqu’à l’autoroute du Nord)
- Échangeur à la M2, à l’entrée du port et des échangeurs dans la région de Phoenix.
Croissance de 5,5 % en 2017
L’ambition de Maurice est de passer du statut de pays à faible revenu à celui du pays à revenu élevé. Pour ce faire, le gouvernement vise un taux de croissance annuel de 5,5 % en 2017.
Libéralisation de l’accès aérien
Le gouvernement a voulu libéraliser l’accès aérien en espérant ainsi doper le tourisme. Cela pourrait également encourager l’émergence d’un Education Hub et d’un Medical Hub. Le gouvernement caresse aussi l’idée de créer une société aérienne dont l’objectif sera de desservir des destinations africaines.
Réactions
Radhakrishna Sadien, syndicaliste: «Un pas a été fait, mais…»
«Un pas a été fait au niveau de la création d’emplois dans le secteur public. Toutefois, je maintiens que tant que la Public Service Commission n’aura pas été réformée et qu’on n’aura pas changé le mécanisme de recrutement, on ne pourra pas réaliser ce grand rêve qu’est la création d’autant d’emplois. L’entrée en opération du Civil Service College est une bonne chose, mais j’estime que chaque ministère aurait dû avoir une personne ou une équipe responsable de la formation. Je cite en exemple les médecins et infirmiers qui reçoivent des formations. Mais quid des employés du secteur paramédical ?»
Raouf Gulbul, membre du National Advisory Council: «Des progrès tangibles»
C’est un travail de longue haleine, déclare Raouf Gulbul. Il précise, cependant, que sur le dossier de l’ouverture de l’accès aérien, les progrès sont tangibles. Déjà, l’accès aérien a été libéralisé vers l’Afrique et des démarches sont entreprises afin que Maurice devienne une passerelle entre l’Afrique et l’Asie. Au niveau de l’emploi, il avance qu’en un an, beaucoup de jobs ont été créés dans le secteur public. Il affirme que suivant les mesures annoncées dans le Budget 2016-17, des centaines d’emplois seront créées.
Reza Uteem, député du MMM : «C’est du bluff»
«Le Premier ministre, quand il avait présenté cet Economic Mission Statement avait parlé du second miracle économique. Un an après, c’est un fiasco. L’Economic Mission Statement évoquait 5 % de croissance. Or il y a deux semaines, le ministre des Finances a parlé d’une croissance de 4,1 %. Le Premier ministre avait parlé de la création de 100 000 emplois mais dans le dernier Budget, nous n’avons noté que la formation à l’intention des jeunes.»
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