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À Montréal: Claudio Veeraragoo fait vibrer le public mauricien
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À Montréal: Claudio Veeraragoo fait vibrer le public mauricien
Partager la musique au-delà des frontières: tel était l’objectif du ségatier Claudio Veeraragoo. Un pari réussi lors du spectacle organisé à l’intention de la communauté mauricienne au Canada, samedi dernier. Compte-rendu d’une soirée très chaude.
Dans la grande salle de l’hôtel de ville du Mont-Royal, à Montréal, plus de 350 Mauriciens trépignent d’impatience. Chanteurs, musiciens et choristes du groupe Molamizik entonnent des succès contemporains tels que I’m yours de Jason Mraz, Uptown Funk de Bruno Mars, ainsi que les tubes de Carlos Santana, entre autres. Après 45 minutes, le groupe cède la place à un DJ, qui propose, lui, du séga mauricien.
C’est vers 22 heures qu’apparaît Claudio Veeraragoo, ovationné par le public. Plusieurs tiennent fièrement le drapeau mauricien. Salutations, embrassades et cris de joie: les Mauriciens du Canada accueillent chaleureusement leur compatriote artiste. Avec ses danseuses aux tenues flamboyantes, Claudio Veeraragoo, vêtu de rouge et blanc, démarre en trombe avec le titre Kass lerein.
«Mo envi fer zot rever zot dan Moris.»
Le public pousse la chansonnette. S’enchaînent des titres légendaires tels que Bonom chinois, Bhaï Aboo, Dhal ti pouri. Les enfants essaient de se frayer un chemin jusqu’au devant de la scène pour ne rien manquer du spectacle tandis que les jeunes, reprenant les mélodies à tue-tête, dansent en cercle en brandissant le quadricolore mauricien. «Depuis que je suis enfant, je connais ses chansons. Claudio demeure une légende pour moi», soutient Jean, 26 ans, qui vit à Montréal. Avec ses amis, le jeune homme redemande du Bhaï Aboo ou encore le fameux Ambalaba. Tout comme les aînés qui savourent chaque instant: «Vous n’avez pas idée de la joie que je ressens de voir un tel artiste se produire en live ici au Canada. C’est inespéré», indique Meera, 65 ans.
Dans cette atmosphère intimiste et tamisée, Claudio Veeraragoo confie son émotion de retrouver ses compatriotes à l’étranger et de partager avec eux une quinzaine de titres de son répertoire étalé sur 52 années de carrière. «L’enthousiasme du public me donne une très grande joie. Ce sont des spectateurs formidables de toutes générations confondues. Même les jeunes sont vraiment très à jour. Je suis ému. Je vous remercie. Mo envi fer zot rever zot dan Moris», confie le chanteur. Le but de cette prestation musicale est de partager sa passion pour la musique. A noter que sa première représentation au Canada avait eu lieu en 1992. En effet, c’est lors d’une visite à son frère, Naden Veeraragoo, que le chanteur a découvert la région de Montréal en 1990. Il est impressionné par le nombre de Mauriciens qui y sont installés.
Deux ans plus tard, c’est dans le cadre d’une promotion touristique à Montréal et Toronto que l’artiste a donné des concerts. Puis, il a poursuivi ses activités en Europe, en Asie et en Australie, entre autres, pendant une dizaine d’années. Entre-temps, il a vu plusieurs de ses amis partir, ce qui l’a rendu nostalgique: «Moi, j’aime et je suis profondément attaché à mon pays. Ces départs aux airs définitifs ont provoqué une grande tristesse en moi. Mwa mo mort pou mo pays! Kan mo pran avion mo pays byen mank mwa.»
«Concept de haute qualité»
C’est alors qu’il décide de créer un spectacle pour la communauté mauricienne au Canada. D’où les négociations en vue de la prestation à Montréal et Toronto en décembre 2015. «Naden, le frère de Claudio, nous a contacté. Nous avons alors décidé d’organiser l’événement. Mais nous voulions surtout que cela soit un concept de haute qualité. Aussi, nous avons travaillé avec Audiotech pour la sonorisation et avons assuré une représentation en direct. Bien souvent, les artistes qui se produisent ici, le font en playback. Nous voulions une touche originale », déclare Steve Juganaden, l’organisateur.
Travaillant sur la conception depuis le mois de mai en collaboration avec Naden et Michael Veeraragoo, ce dernier a sollicité le groupe Molamizik, qui compte dix ans d’existence, pour accompagner le chanteur. «Nous étions stressés car nous n’avions jamais accompagné l’artiste. Nous avons beaucoup répété ses partitions. Puis à son arrivée, nous avons organisé des répétitions et tout s’est bien passé », souligne Norbert Vielleuse, chanteur et guitariste du groupe qui a aussi accommodé Michael, le fils de Claudio Veeraragoo, à la batterie.
Le concert s’est poursuivi avec les autres titres phares du ségatier et ce, jusuq’à minuit sous le regard emballé du public. «Cela ravive de beaux souvenirs de notre pays», confie Sheila, 56 ans.
Une animation musicale a clôturé l’événement qui a eu lieu en présence du consul honoraire de Maurice au Canada, Richard Gervais.
Questions à... Claudio Veeraragoo
D’où vient votre passion pour le séga mauricien ?
Durant mon enfance, j’étais timide. Je ne chantais pas à l’époque. Par contre, je jouais au football et je rentrais souvent avec des foulures. Ce qui exaspérait un peu ma maman. Quand je suis entré en Form I au collège Trinity, elle m’a fait apprendre le solfège. À ce moment-là, l’éducation était payante. C’est ainsi que j’ai découvert la théorie de la musique. J’adorais ça. Au début, j’avais surtout un attrait pour les chansons françaises telles que ‘La poupée qui fait non’, ‘Aline’ entre autres, ainsi que les tubes anglais. Puis, lorsque je me suis mis à chanter avec un orchestre, c’est là qu’est venu le séga. Et par hasard, moi qui voulais voyager, j’ai eu cette opportunité en écrivant ‘Ambalaba’. Le titre a été remarqué par un producteur réunionnais et nous l’avons enregistré à l’Ile soeur. Avec le succès qu’on lui connaît.
En 52 ans de carrière, vous avez évolué artistiquement avec la fondation du groupe Satanik, un studio d’enregistrement ainsi que des centaines de compositions, dont une bande originale reprise par le chanteur Shaan, et des tournées internationales. Quels sont vos projets à présent?
Je me suis exclusivement consacré à la musique. Le studio est quant à lui pris en charge par mon fils, Michael. Et aujourd’hui après 52 ans, les projets ne manquent pas. Ceci fait suite notamment aux expériences à l’international, à l’instar des promotions touristiques et des tournées musicales. L’un de mes gros projets comprend un long-métrage intitulé Zaira que j’ai écrit et que je voudrais concrétiser aussitôt que nous aurons le financement. J’ai composé les morceaux de la bande originale en créole et en français depuis quatre ans. Il s’agit d’une histoire d’amour qui illustre parallèlement la façon de vivre de deux communautés différentes, ainsi que le lien familial et proximal. Pour le reste, je continuerai à chanter tant que Dieu me le permettra.
Quels sont les défis auxquels vous devez faire face en tant qu’artiste?
Comme vous le savez, la vente d’albums et de DVD des artistes locaux a largement dégringolé. Aujourd’hui, nous sommes comme un arbre dépourvu de feuilles. Lorsque vous essayez de démarrer un projet artistique, de multiples difficultés subsistent. Les institutions financières vont considérer l’âge des artistes et c’est pour eux un obstacle considérable. Et c’est franchement décourageant. Il faudrait agir à ce niveau pour permettre de nourrir des projets artistiques mauriciens.
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