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Claude Wong So: «Il faut remplacer les ouvriers philippins par des Chagossiens»
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Claude Wong So: «Il faut remplacer les ouvriers philippins par des Chagossiens»
Le Chief Executive Officer de la State Land Development Company Ltd, Claude Wong So, a travaillé à Diego Garcia au début des années 80 comme Senior Cost Manager. Alors que le Premier ministre a plaidé aux Nations unies, il y a quelques jours, pour les droits de Maurice sur les Chagos, l’ingénieur revient sur son séjour sur cet atoll de l’archipel.
Dans quelles circonstances êtes-vous parti à Diego Garcia ?
C’était en 1982. La récession battait son plein dans le secteur de la construction. La compagnie américaine Hans Com Associate, qui avait décroché un contrat de 300 millions de dollars pour des travaux pour le compte de l’US Navy, recrutait des professionnels. J’ai postulé. Nous étions trois cadres mauriciens ainsi que quelque 300 ouvriers à avoir été embauchés par le consortium américano-britannique. J’ai été envoyé à Diego Garcia pour la construction d’entrepôts et de résidences. Les infrastructures militaires étaient déjà là mais rien de nucléaire.
Comment était l’atoll à votre arrivée ?
Mari zil sa. Tou zoli ! C’est un paradis. Le seul souci, c’était l’eau potable. Il y avait des fruits de mer en abondance. Ou swaziré ki pwason ou anvi manzé. De toutes les îles, Diego Garcia est la plus belle. Elle a la forme d’un fer à cheval. À l’époque, l’Ouest était occupé par les Américains et l’Est par les Anglais. Un portail les séparait. Il y avait East-Point, c’était le village des Chagossiens. C’était là qu’il y avait une boutique, une église, des maisons et le centre administratif.
Qu’avez-vous découvert à East-Point ?
J’y ai débarqué 15 ans après les expulsions. C’était un désert. Le sega disait vrai. Il n’y avait que quelques bourriques qui marchaient entre les ruines. C’était triste. C’était la seule trace des Chagossiens dans l’île. J’ai eu mal en voyant ce village en état d’abandon. J’ai eu encore plus mal en découvrant dans quel état de délabrement était le cimetière, un lieu de mémoire pour les Chagossiens. Ni les Américains ni les Anglais n’ont jugé utile d’entretenir ce lieu.
Est-ce que les Chagos sont habitables ?
Évidemment ; il faut juste qu’il y ait des personnes qui souhaitent ce type de vie. Je pense que ce sera difficile pour les jeunes, mais si on y met des facilités, pourquoi pas. Le seul problème, c’est l’eau car il n’y a pas de rivière. Mais c’est gérable. Même si pour des raisons militaires, on ne peut pas résider sur Diego Garcia, je pense que c’est possible sur Peros Banhos. D’ailleurs, beaucoup de propriétaires de voiliers squattaient là à l’insu des militaires.
Vous pensez que le gouvernement pourra aménager les infrastructures nécessaires pour y vivre ?
Cela coûtera énormément vu la distance. Le plus important, c’est notre souveraineté sur ce territoire. Maurice pourra profiter des eaux territoriales autour des Chagos.
Comment font les Américains pour vivre sur Diego Garcia alors ?
Au début des années 80, il y avait environ 4 000 militaires et 3 000 civils qui vivaient à Splendid Ville. C’était une petite ville avec des restaurants, des salles de cinéma, des boîtes de nuit et même une bowling alley. Bien sûr, il y avait des résidences pour les militaires et les civils. Ce sont des Philippins qui travaillaient dans ces lieux. Ils y sont toujours en grand nombre. Je soutiens la demande d’Olivier Bancoult. Il faut remplacer les ouvriers philippins par des Chagossiens qui y travailleront sous contrat.
Pour quelle raison les Mauriciens ne sont-ils plus recrutés en nombre ?
Je ne sais pas. Après les élections de 82 ou 83, les Américains ont demandé aux 300 ouvriers de rentrer à Maurice. Je ne sais pas pour quelle raison. Moi, j’ai pu rester un peu plus longtemps avec mes deux amis professionnels.
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