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Richard Lesage: Rémy Ollier et mes aïeuls méconnus
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Richard Lesage: Rémy Ollier et mes aïeuls méconnus
En marge du bicentenaire de la naissance de Rémy Ollier, le jeudi 6 octobre, l’un de ses descendants aborde un volet méconnu de l’histoire : les enfants esclaves.
«J’ai beaucoup d’admiration pour Rémy Ollier.» De Boston, où Richard Lesage travaille comme bibliothécaire à la Harvard College Library, il nous parle de l’un de ses illustres ancêtres : Rémy Ollier. Un témoignage qui éclaire celui qui a donné son nom à tant de rues. Mais aussi la question cruciale des gens de couleur à Maurice.
Né le 6 octobre 1816, c’est le bicentenaire de sa naissance dans trois jours. Rémy Ollier est décédé le 28 janvier 1845. Un décès qui reste flou. «Si cela se passait aux États-Unis, on aurait essayé de retrouver ses restes au cimetière de l’Ouest et on aurait fait une analyse médico-légale pour voir s’il a vraiment été empoisonné. Mais c’est la légende. Car à l’époque, Rémy Ollier s’opposait à l’oligarchie blanche et luttait pour l’égalité des droits de la population de couleur.»
Richard Lesage précise : «Je ne soutiens pas cette thèse. Je ne veux pas commencer une polémique. Je dis seulement que cela aurait été intéressant de savoir de quoi il est mort, une fois pour toutes. Cela dit, le message de Rémy Ollier est plus important que le reste. C’est un message d’égalité, de respect pour tous les Mauriciens.»
De Boston, il nous raconte sa généalogie. «Je suis un descendant de la demi-sœur de Rémy Ollier, Eulalie. Il y a d’autres familles à Maurice qui descendent des sœurs de Rémy Ollier.» Le père de Rémy, Benoît Ollier est un capitaine d’artillerie qui s’établit à Beau-Vallon. «Selon Gaëtan Raynal, dans le Dictionnaire de biographie mauricienne, Benoît Ollier faisait aussi de la traite d’esclave», explique Richard Lesage.
La première épouse de Benoît Ollier, «donc mon ancêtre», poursuit Richard Lesage, était originaire du Bengale. «Dans la famille, on sait qu’à l’époque française, il y a des femmes d’origine indienne. Pour moi, la question reste entière. Qui sont ces femmes indiennes ? D’où venaient-elles ? Quels étaient leurs sacrifices ? C’est ce que j’ai commencé à explorer. Et je me suis rendu compte qu’elles étaient toutes esclaves.»
Citant l’historien spécialiste de l’histoire de l’esclavage dans l’océan Indien, Richard Allen, le descendant d’Ollier est d’avis que ces femmes «étaient des enfants esclaves (child slaves), qui étaient assimilés dans la famille. Elles devenaient les épouses des Français et étaient émancipées, de sorte que leurs enfants naissent libres. Dans ma famille, on dit toujours qu’on était libre, mais cela ne veut pas dire qu’administrativement et techniquement, il n’y a pas eu d’esclaves dans la famille».
Richard Lesage fait aussi le lien avec Babet Dioré, une autre de ses ancêtres, «qui était tamoule. C’était une femme riche qui avait des arpents de terres dans le nord de l’île. Son mari était boulanger». Babet Dioré, selon lui, est morte à un âge très avancé et son fils Jean-François Dioré, un grand négociant, a fait construire une stèle à sa mémoire au cimetière de l’Ouest. «Il y a simplement fait inscrire : A B. Dioré, la mère. Quand on va au cimetière de l’Ouest et qu’on voit ces tombes magnifiques, on peut penser que c’était des Français. Babet Dioré était une esclave, qui a été affranchie et prise pour épouse, entre guillemets, par un Français. Il est temps de ressusciter ces femmes exclues et de parler de leur rôle dans la création de la société mauricienne.»
Le descendant d’Ollier va plus loin. «S’ils font un test ADN, les Mauriciens verront ce qui coule dans leurs veines. Beaucoup d’entre eux seraient surpris des résultats. Peut-être que cela aiderait à ne plus voir les différences mais ce qui nous unit.» Richard Lesage confie qu’il a lui-même fait ce test ADN récemment, pour «prouver l’hypothèse des origines franco-indiennes du côté Ollier».
Mais des éléments inconnus subsistent toujours. Notamment au sujet de la seconde épouse de Benoît Ollier, donc la mère de Rémy. «Je ne sais pas quelles sont ses origines», constate Richard Lesage. «C’était certainement une mulâtresse, étant la fille et l’esclave du docteur Guillemeau. Quand mon aïeule, la première femme de Benoît Ollier meurt en 1805, il se met sur le tard avec cette jeune fille de 16 ans, Julie Guillemeau.»
À cause du Code Noir et des lois en vigueur à l’époque, il faut faire attention à la notion de mariage. Les unions entre Européens et personnes d’autres origines ne sont pas permises. «Ce qui mettait les gens de couleur dans des situations extrêmement difficiles d’exclusion de la société. Je crois que cela n’a pas été suffisamment étudié. On se penche beaucoup sur les traumatismes de l’esclavage. Mais on n’a pas vraiment étudié cet esclavage des enfants qui sont assimilés dans des familles.»
Gens de couleur, les recherches continuent
<p>La semaine dernière, l’université de Maurice a abrité pendant trois jours une conférence internationale ayant pour thème, <em>«Les gens de couleur in insular societies»</em>. Cela coïncidait avec le bicentenaire de la naissance de Rémy Ollier. Par la même occasion, le centre Nelson Mandela pour la culture africaine a fait paraître le livre Rémy Ollier (1816-1845) Une vie, Un combat. Ce fascicule reprend les écrits de Jean Georges Prosper sur Rémy Ollier.</p>
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