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Langue créole: quand le discours officiel ne colle pas à la réalité
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Langue créole: quand le discours officiel ne colle pas à la réalité
Le thème fait tiquer. Celui de la conférence qui ouvre, aujourd’hui, la 11e édition du Festival International Kreol. Elle réunit divers intervenants autour de l’intitulé : Lang kreol : siman la nasion.
Arnaud Carpooran, universitaire et président de la Kreol Speaking Union, figure parmi ceux qui ont pris la parole, ce jeudi 17 novembre. Sa communication a pour titre Lang kreol : langaz enn pei, langaz enn pep. Le linguiste explique que c’est «exprès» qu’il n’a pas inclus le mot «nasion». Car il distingue le «peuple» – réalité concrète d’un groupe vivant dans un territoire – de la «nation» – projet abstrait d’un vouloir vivre ensemble. «Il ne suffit pas d’inscrire le créole dans un texte de loi. La question fondamentale est de savoir si nous sommes une nation.»
Dev Virahsawmy est plus explicite. «Le hic : est-ce que Maurice est une nation ou un pays indépendant ? Je pense que nous ne sommes pas encore une nation.» Maurice célébrera les 50 ans de l’accession à l’indépendance en 2018.
Pour être une nation, explique Dev Virahsawmy, il faut des éléments en commun. Parmi ceux-ci : une histoire partagée. «Nous sommes tous des immigrants. Nous avons donc une histoire commune. Mais est-ce que nous le reconnaissons ?» Il ne manque pas de souligner que «nous continuons à parler en termes de nou bann et de bann-la»
L’auteur prolifique de théâtre et de poésie en morisien estime qu’il faut créer d’autres symboles pour renforcer l’identité nationale. «Nous avons trop tendance à nous identifier à la culture ancestrale, trop souvent, on oublie ou on méprise la culture nationale.» Avec l’ironie qui le caractérise, Dev Virahsawmy lance : «Le festival ne doit pas être celui des Créoles mais celui de tous les habitants de Maurice.»
Pour sa part, Alain Ah-Vee de Ledikasyon Pu Travayer cite le recensement 2011. «84 % des Mauriciens disent que la langue utilisée à la maison est le créole. C’est devenu la langue nationale.» Sauf que, selon lui, la langue nationale est «sousutilisée par l’État, qui a une politique qui ignore et freine le développement de cette langue». Exemple : les résistances qui empêchent son entrée à l’Assemblée nationale.
Opposition exprimée notamment par le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth. «Quand les séances parlementaires seront retransmises en direct, les téléspectateurs auront besoin de comprendre ce qui se décide en leur nom. C’est un manque de respect de la langue au niveau de l’État.» Selon Alain Ah-Vee, la langue créole est bien un ciment, «mais l’État ne lui donne pas la place qu’elle mérite».
Qu’en est-il de son entrée à l’école ? Le créole est une matière optionnelle qui s’apprête à arriver en Standard VI. Alain Ah-Vee note que bien que la langue créole dans le cadre scolaire amène l’égalité entre les élèves, «elle est juste une langue optionnelle, au même titre que le hindi, l’ourdou et d’autres langues étrangères».
Il maintient qu’une langue nationale doit avoir une large place à l’école. «Léta donn li enn plas kasiet, kouma dir li onté.»
Des artistes dénoncent le mode de sélection pour le concert
<p>Un groupe d’artistes locaux s’insurge contre la lenteur des organisateurs du concert qui clôturera le Festival International Kreol le 26 novembre aux Salines. Menés par Joyce Veerasamy, ces artistes décrient qu’à quelques jours de ce concert, aucune affiche n’est encore connue. Ce groupe dit craindre aussi un manque de créativité et de nouveauté sur la scène locale.</p>
<p>Pour Jean-Alain Résidu, un des contestataires, le comité organisateur du concert aurait dû agir dans la transparence. <em>«On nous a demandé de nous inscrire par internet, avec comme condition que la sélection sera établie en prenant en considération les artistes qui ont été dans le top 20 des radios de janvier à octobre 2016. Plusieurs jeunes ont été dans ce cas, comme Benita Nabab ou Double K. Toutefois, ils ne savent pas s’ils seront sur scène. Je suis certain qu’on retrouve les mêmes têtes sur scène.»</em></p>
<p>Un avis partagé par tous ceux qui ont décidé de dénoncer cet état de chose. Joyce Veerasamy dénonce aussi la cacophonie qu’il y aurait autour de l’organisation de ce concert. <em>«Les organisateurs doivent savoir que ceux qui joueront doivent avoir du temps pour se préparer et pour les ré- pétitions. Or, plusieurs d’entre eux sont toujours dans le flou. C’est un manque de respect envers les artistes.»</em></p>
<p>Il estime que la condition imposée par les organisateurs pour le concert ne tient pas debout. <em>«Je pense qu’il existe des mesures, autres que la radio, pour jauger de la popularité de nos artistes locaux. Vous n’avez qu’à aller sur YouTube pour constater combien de nos jeunes artistes sont appréciés. Le but de ce festival est d’encourager les artistes en herbe et les jeunes talents.»</em></p>
<p>Le président du comité d’organisation du festival, le député bleu Thierry Henry, préfère garder le silence sur la question. Interrogé au téléphone par l’express, il a demandé de rappeler plus tard. Sauf que nos nombreux appels sont, depuis, restés sans réponse.</p>
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