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Brenda Jhuboolall, le goût du large

8 décembre 2016, 17:18

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Brenda Jhuboolall, le goût du large

De son amour pour la mer, est née sa plus belle profession. Brenda Jhuboolall, originaire d’Albion à Maurice, prend désormais fièrement les commandes pour mener les visiteurs… en bateau… de croisière ! Elle est une des premières femmes mauriciennes à exercer le métier de capitaine sur la Seine, un des lieux magiques et incontournables de la France. 

Passant son adolescence au Lycée Labourdonnais à Maurice puis en partie à l’île de la Réunion, Brenda Jhuboolall grandit au sein d’une famille de quatre enfants élevée par le papa, Dooshiunt, ancien maire de Vacoas- Phoenix dans les années 1970, aussi radiologue en Angleterre et décédé depuis 2008 et la maman, Celianthe, coiffeuse retraitée, qui vit en France désormais. 

Vers l’âge de 16-17 ans, la Mauricienne part vivre à l’île sœur et y poursuit sa scolarité. Elle fréquente alors le collège Juliette Dodu à St Denis. Une fois cette étape complétée, Brenda Jhuboolall s’installe en France en vue d’entreprendre un BAC. «Je me cherchais comme beaucoup de jeunes. Je vouais une passion pour l’eau, j’aimais ce contact avec l’eau mais je ne savais quel métier exercer», confie la jeune femme. En attendant que ses interrogations trouvent réponse, elle poursuit un BTS en tourisme d’une durée de deux ans. 

Les yeux du capitaine

Ce domaine l’attire puisqu’il favorise le contact à l’international ainsi que l’échange de culture. Cette formation lui donne également l’opportunité de travailler dans un musée. Puis, portée par son attrait pour l’eau, Brenda Jhuboolall entend une annonce qui l’intrigue. On recherche des matelots pour travailler sur des «batobus». Il s’agit de bateaux de 25 mètres qui sont utilisés pour effectuer des visites touristiques. Et le BTS en Tourisme serait un avantage. La Mauricienne tente sa chance. S’enchaîne alors une grosse formation. 

«Durant les premiers jours, il y avait toute la partie théorique comme comprendre les bateaux, notamment ceux destinés au commerce et qui assurent le transport des marchandises sur le fleuve. Puis, il y a les bateaux passagers. La formation nous permet de savoir comment réagir en situation d’urgence. Le matelot est les yeux du capitaine», explique notre interlocutrice. 

Elle y découvre aussi de nombreuses techniques : le maniement des cordes, la réalisation des nœuds marins, la responsabilité des passagers à bord entre autres, les premiers secours. Sa formation l’enchante d’autant qu’elle découvre également le métier de femme-capitaine. 

«Je me suis dit pourquoi pas moi ?» se rappelle la jeune femme. Déterminée à se consacrer aux activités fluviales et à épouser cette profession, la Mauricienne décide de persévérer. Arrive alors une opportunité de formation de capitaine sur une autre embarcation – le Mistinguett. Celle-ci fait 41 mètres de long. Mais avec sa formation, notre interlocutrice peut travailler sur des bateaux allant jusqu’à 60 mètres. Ceci rejoint d’ailleurs ses aspirations à découvrir de plus gros bateaux. D’autant que cette embarcation est dotée d’une capacité d’accueil de 248 passagers. 

Voilà donc qui enchante la mauricienne. De plus, le propriétaire y proposait une formation avancée et donc plus difficile. Brenda Jhuboolall se jette à l’eau et met le cap sur cette profession. Selon elle, il fallait alors s’adapter de par les paramètres du navire. Aussi, la jeune femme gardait le cap sur l’objectif qui lui trottait dans la tête : devenir capitaine. Elle complète une formation d’une année et valide aussi ses 100 jours de navigation en mer. 

En 2015, elle doit passer des épreuves théoriques pour obtenir son permis, c’est-à-dire une certification de capacité pour les bateaux de commerce de 60 mètres. Et elle réussit du premier coup ! «J’étais complètement novice. Il fallait tout connaître : l’infrastructure du bateau, les calculs mathématiques etc.» 

Alphabet militaire

Passée la théorie, Brenda Jhuboolall doit s’atteler à une autre certification : celle de l’utilisation de la radio en navigation. Et là, c’est la maîtrise de l’alphabet militaire qui l’attend. Il lui fallait pouvoir s’exprimer selon ces codes et émettre des signaux sonores. Par la suite, un examen final – d’ordre pratique – devait compléter sa formation. Celui-ci s’est déroulé sur 3 heures. L’épreuve constituait à une évaluation lors d’une mise en situation avec un jury composé de trois spécialistes, soit un professionnel et deux administrateurs. 

La Mauricienne a eu ainsi droit à de nombreuses questions ainsi qu’à des examens en salle des machines et du matériel de détection de fumée entre autres. Et ce n’était que la première phase de son examen! La seconde partie consistait à réaliser une navigation en pratique et à accoster le bateau. Comme pour rajouter son grain de sel, la nature s’est avérée très capricieuse ce jour-là avec de multiples vents, courants ainsi qu’une petite tempête, indique notre interlocutrice. Néanmoins, la jeune femme réussit ses épreuves. Poursuivant avec des formations, elle devient capitaine en second et exerce donc sous supervision. 

Après quelques temps, et ce, depuis le mois de juin 2016, elle navigue seule aux commandes des bateaux et devient capitaine. Elle possède maintenant un permis pour naviguer sur les bateaux de 60 mètres. Elle le fait essentiellement sur Paris pour des croisières de deux heures sur la Seine. «Ce n’est pas évident comme domaine car c’est très masculin voire macho. Il y a des difficultés. On m’a mis des bâtons dans les roues. Cela n’a pas été facile mais j’ai eu un bon soutien d’un autre capitaine mauricien qui m’a donné des astuces pour m’aider. Mais c’est une filière qui me correspond. Je suis très heureuse et épanouie», avoue la femme-capitaine.

Actuellement, la jeune femme a entamé une nouvelle formation à bord d’un bateau de 60 mètres. Elle rêve parallèlement d’avoir son propre bateau un jour et de continuer sur sa traversée pour obtenir des permis d’opération pour des plus gros bateaux, notamment ceux de 110 à 120 mètres. Elle entend aussi avoir des certifications pour la navigation en mer en sus de la version fluviale.