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Azim Currimjee: «Le taux de croissance de 2016 est le plus élevé depuis 2010»
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Azim Currimjee: «Le taux de croissance de 2016 est le plus élevé depuis 2010»
Pour franchir un nouveau palier de développement, dit le président de la MCCI, Maurice devrait avoir une capacité de production permettant un taux de croissance supérieur à 5 %.
Comment évaluez-vous l’évolution de l’économie mauricienne en 2016, avec un taux de croissance de moins de 4 % ?
Nous constatons une amélioration sensible de la performance économique avec un taux de croissance de 3,7 % en progression de 0,7 % par rapport au taux de 2015.
Mais le taux est toujours inférieur à 4 % ?
Ce qui est important, c’est le trend. Le taux de 2016 est le taux le plus élevé depuis 2010, l’année où il y a eu un rebond instantané dans de nombreux pays, y compris Maurice, après la crise de 2009. Nous devons et nous pouvons aller encore plus loin pour confirmer cette reprise en 2017, avec un taux de croissance dépassant le seuil de 4 %.
Statistics Mauritius prévoit une croissance de 3,8 % (prix de base) pour 2017. Estimez-vous que c’est un objectif de croissance suffisant pour enrayer le chômage ?
Entre 2013 et 2016, le taux de croissance était inférieur à 3,8 %. Or, sur cette période, le taux de chômage a baissé de 8 % à 7,4 %, selon Statistics Mauritius. Si nous réussissons à maintenir cette dynamique de reprise avec une hausse du taux de croissance, nous pouvons espérer une nouvelle baisse du taux de chômage.
La MCCI prône une relance de la croissance par le biais de la consommation. Une hausse de 1 point de pourcentage de la consommation augmente- rait, selon vos recherches, le taux de croissance de 0,56 point de pourcentage. D’autres économistes estiment qu’une relance par la consommation ne marche pas et qu’une telle politique aggraverait la balance commerciale déjà fortement déficitaire. Que répondez-vous à cet argument ?
L’analyse de la MCCI se base sur les faits et la recherche économique. Je vous rappelle une donnée simple la production découle de la consommation. S’il n’y a pas de consommation, il n’y a pas de production.
Les estimations économétriques de la MCCI projettent l’effet net d’une hausse de 1 point de pourcentage de la consommation sur le taux de croissance économique. La hausse des imports est comprise dans cette estimation.
Le taux de croissance économique mesure la hausse de la richesse effectivement mise à̀ la disposition de l’économie par le système productif. Et à la MCCI, nous pensons que nous pouvons dépasser les 4 % dès 2017, avec la mise en place de certaines mesures.
Quelles sont ces mesures ?
Le Fonds monétaire international propose une approche en trois volets la poursuite d’une politique monétaire expansionniste, des mesures de relance budgétaire et des réformes structurelles.
Dans une perspective de court terme, la croissance économique dépend essentiellement des facteurs de demande que sont l’environnement international pour la demande externe et la politique budgétaire pour la demande interne. Et ce, à travers des dispositifs de répartition de richesses et les évolutions salariales.
Au vu de la faiblesse de la demande externe qui devrait se poursuivre dans les années à venir, nous devons nous recentrer sur notre demande interne. Ainsi, les propositions de la MCCI pour relancer la demande se focalisent sur deux niveaux.
D’une part, rehausser le revenu disponible pour les personnes ayant la plus forte propension marginale à consommer. Et d’autre part, élargir la base du nombre de consommateurs à Maurice. De plus, avec l’affaiblissement de notre capacité de production, nous devons accompagner la politique de relance de la demande par des mesures pour améliorer notre offre.
Comment améliorer notre offre ?
Une économie en transition, comme la nôtre, devrait envisager une capacité de production qui permette un taux de croissance potentiel supérieur à 5 % pour pouvoir franchir un nouveau palier de développement. La hausse à court et moyen terme de la production potentielle est conditionnée par la mise en place des mesures pour améliorer notre offre, relative à la conduite des affaires.
Ainsi, nous devons prioritairement améliorer la compétitivité de nos exports de biens, la mesure principale étant de diminuer drastiquement les coûts portuaires pour l’export. Nous devons aussi avoir une politique fiscale incitative qui favorise l’investissement productif et l’innovation. Certains pays, comme Chypre, l’Irlande ou encore l’Angleterre, ont mis en place le système de l’innovation box pour attirer les entreprises innovantes et améliorer leurs performances économiques.
Cette mesure se définit comme un régime fiscal spécial utilisé par ces pays pour encourager la recherche et le développement en taxant les revenus tirés des brevets et franchises différemment des autres revenus. À la MCCI, nous avons proposé d’offrir une taxe à zéro pour cent sur la totalité des revenus issus de la commercialisation des actifs de la propriété intellectuelle. Cette mesure est primordiale pour développer de nouveaux secteurs productifs, dont l’industrie pharmaceutique.
La MCCI propose des mesures pour améliorer l’offre et la demande. Pourquoi ?
Parce que toutes ces mesures entraîneront une hausse de la demande des biens d’investissement. Ce qui par conséquent incitera les fournisseurs de ces biens à améliorer leurs offres et ainsi à augmenter, à leur tour, leurs investissements pour répondre à cette demande supplémentaire. Par effet boule de neige, cela dynamisera l’activité économique, relancera les embauches, les revenus distribués ainsi que la consommation. Ce qui entraînera de nouveau une hausse des investissements.
Nous avons récemment vu le Brexit et l’élection de Donald Trump aux États-Unis. Assiste-t-on à un début de la déglobalisation?
Jean-Baptiste Say, économiste libéral, affirmait dans son livre Traité d’Économie Politique, publié en 1803, «qu’un impôt exagéré détruit la base sur laquelle il porte». Arthur Laffer, à la fin des années 1970, à l’aide de la courbe qui porte son nom, démontre que l’excès d’impôt tue l’impôt. Je pense qu’on pourrait utiliser le même argument pour le libre-échange, c’est-à-dire, qu’un excès de libre-échange pourrait tuer le libre-échange.
La croissance mondiale arrive difficilement à dépasser la barre de 3 %. Quels enseignements en tirez-vous ?
De 2000 à 2011, nous avons connu une période de croissance mondiale exceptionnelle avec une moyenne du taux de croissance de 4,1 %, soutenue principalement par l’émergence rapide d’un nouveau poids lourd de l’économie mondiale, à savoir la Chine.
Toutefois, depuis 2012, nous retrouvons un schéma plus classique de l’évolution de l’économie globale. En effet, depuis cette date, le taux de croissance mondiale est proche de 3 %, comparé à la période 1980 à 1999, où il était de 3,1 %.
Notre pays, avec des politiques économiques favorables, a connu une croissance dynamique de 1980 à 1999 avec un taux de croissance économique moyenne proche de 5 %. Au vu de notre passé, je suis assez optimiste quant à l’évolution future de notre pays.
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