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Pratique publique - privée des médecins: patients et société civile se mobilisent

16 janvier 2017, 09:00

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Pratique publique - privée des médecins: patients et société civile se mobilisent

C’est derrière la plateforme Rise for Health qu’une centaine de membres du public se sont réunis. Ce, pour lutter contre l’élimination de la pratique privée des spécialistes de la santé publique. «Pa tous nou drwa pou swazir nou dokter spésialis.» C’est ce que disent les banderoles installées par Rise for Health un peu partout à travers le pays. Banderoles qui ont, depuis, été enlevées.

«Si j’ai besoin d’un spécialiste après 16 heures ? Si je veux pouvoir choisir quel spécialiste je veux voir ? Est-ce que le ministre de la Santé peut m’enlever ce choix ?» se demande Rajesnarain Guttea, porte-parole de la plateforme Rise for Health. «Si je vais à l’hôpital, je dois passer par les urgences avant de consulter. Même là, j’aurai un spécialiste de garde.» Cela serait, selon Rise for Health, surtout grave quand il s’agit d’accouchements. En effet, affirme leur porte-parole, si le médecin qui a fait le suivi n’est pas là à l’heure de l’accouchement, que se passera-t-il ?

En sus de cela, Rise for Health craint que les honoraires augmentent si le privilège de cette double pratique est enlevé aux médecins. «Si les médecins restent dans le public, il y aura moins de docteurs dans le service privé. Si une consultation privée en ce moment est à Rs 500, quand les spécialistes du privé seront embauchés par les cliniques celle-ci pourra coûter Rs 2 000. Puisqu’il faudra aussi payer les cliniques», soutient Rajesnarain Guttea.

L’association prévoit une action juridique si la pratique publique-privée est abolie. D'autre part, Rise for Health a déjà envoyé une lettre au ministre de la Santé pour lui faire part des préoccupations de ses membres.

Le public ne se sent pas le bienvenu

<p>À 16 h 30, à Ébène, ce lundi 16 janvier, aura lieu la séance de travail autour de la pratique privée&nbsp;-publique. Pourtant, les membres de la société civile ne se sentent pas les bienvenus à ce<em> &laquo;workshop&raquo;.</em> En effet, bien que l&rsquo;invitation ait été lancée, on craint&nbsp;une éventuelle partialité du débat. Du moins, c&rsquo;est l&rsquo;avis du président de la <em>Federation of Civil Service and other Unions</em>, Narendranath Gopee.&nbsp;</p>

 

Pour lui, le ministre de la Santé, Anil Gayan, serait en train de déclarer une guerre ouverte entre la population et le corps médical. De plus, les représentants de la société civile seraient les invités personnels du ministre de la Santé. «Les débats ne seront pas balancés. Mais on ne va pas se laisser faire. On condamne l’attitude autoritaire du ministre. Ce dernier est en train d’agir contre l’intérêt du monde médical», affirme Narendranath Gopee. D’ajouter qu’«on n’en serait pas arrivé là si le ministère n’avait pas fait la sourde oreille face à leurs multiples requêtes en vue d’avoir une rencontre pour discuter de cette situation.»

Dr Dawood Oaris: «Nous sommes d’accord qu’il faut mettre de l’ordre»

Quelle est la position adoptée par les cliniques privées dans ce bras de fer opposant les médecins spécialistes au ministère de la Santé ?

Nous avons organisé deux rencontres cette semaine (NdlR, la semaine dernière). L’une a eu lieu mardi avec tous les directeurs des cliniques privées, et l’autre mercredi, avec le ministre de la Santé. Toutes les cliniques sont sur la même longueur d’onde. Nous sommes d’accord qu’il faut mettre de l’ordre dans le système mais nous avons déjà un système qui fonctionne. Peut-être pas à 100 % mais ce serait dommage de le changer. Le ministre dit qu’il y a plusieurs cas d’abus, dans de telles situations il faut prendre des sanctions ! Toutes les cliniques collaboreront pleinement avec le ministère.

Le ministère a cité trois cas de figure. Quelles seraient les implications pour les patients si les médecins spécialistes sont appelés à choisir entre le privé et le public ?

Le patient a le droit de choisir son médecin. Ce serait l’en priver en lui imposant un choix. Nous en avons parlé au ministre. Il y a aussi plusieurs secteurs, tels que la neurochirurgie, où on risque d’avoir un manque de spécialistes dans le privé s’ils choisissent de rester dans le public. Il faut maintenir le système actuel, l’améliorer et mettre de l’ordre. Plus de 98 % des spécialistes font bien leur travail.

Les médecins spécialistes et les cliniques privées créeront-ils un front commun afin de mener à bien les négociations ?

À ce stade, rien n’a encore été décidé.

Votre clinique fait elle-même l’objet d’une enquête du ministère de la Santé…

Oui, effectivement, des inspecteurs sont venus à ma clinique et m’ont demandé de remettre les registres qui couvrent toute l’année dernière. Ils ont vu que trois médecins spécialistes travaillant pour l’État étaient présents à la clinique le matin alors qu’ils devaient être à l’hôpital. Ces médecins sont passés à 8 heures pour vérifier l’état de santé des patients. Ils sont ensuite partis à l’hôpital. Des vérifications ont été faites là-bas et il se trouve que les médecins sont arrivés à l’heure. Les inspecteurs ont également remarqué le nom d’un pédiatre inscrit dans le registre pendant la journée. Son nom a été écrit à côté du gynécologue qui devait faire l’accouchement. Il est arrivé après ses heures de travail à l’hôpital.

On a aussi mentionné le cas d’un médecin qui aurait travaillé dans votre clinique alors qu’il devait être en congé maladie…

Ce médecin était à la clinique tous les jours. Je suis au courant. Il m’a dit qu’il a fait sa demande de pré-retraite. Je ne remets pas en question ce que me dit un médecin. Je suis directeur de clinique et pas un time-keeper. Si le ministère a remarqué que le médecin n’est plus en poste, aucune action n’est prise ? S’il est tombé malade pendant les heures de travail, c’est normal qu’il bénéficie d’un certificat médical d’un médecin de la clinique. Mais comme je l’ai dit déjà, nous n’avons aucune crainte. Nous avons remis tous les documents demandés par le ministère. Nous ne sommes pas une mafia et encore moins des récalcitrants.

Les cliniques ont gros à perdre

Les cliniques privées auront gros à perdre si le ministère de la Santé décide d’éliminer la pratique privée pour les spécialistes de la santé publique. Cependant, elles n’ont pas encore pris de décision autour d’un éventuel front commun face à ce contentieux. Cela, en marge de l’atelier de travail sur la double pratique.

Selon les directeurs de cliniques, exercer dans le privé pendant les heures de travail dans le service public serait une pratique courante. Pendant la réunion avec Anil Gayan, mardi dernier, ils lui ont proposé de l’aider dans cette lutte. «Les cliniques n’emploient que très peu de spécialistes à plein-temps.» Et ce, parce que cela coûte trop cher. Elles emploient, donc, des spécialistes à temps partiel, qui travaillent, après les heures, dans le public. Soit après 16 heures.

Ces spécialistes ont le droit de travailler avec plusieurs cliniques, voire d’avoir leur propre cabinet de consultation. Ainsi, si le ministère de la Santé devait éliminer la pratique publique-privée, les cliniques devront, alors, employer des spécialistes à plein-temps.