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Dev Luchmun: «L’unité syndicale n’existe plus»

1 avril 2017, 14:30

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Dev Luchmun: «L’unité syndicale n’existe plus»

Il est un de ces rares conseillers à avoir travaillé avec quatre ministres du Travail : Vasant Bunwaree, JeanFrançois Chaumière, Shakeel Mohamed et Soodesh Callichurn. Deo Anand Luchmun, ou Dev pour les intimes, a pris sa retraite en 2016 à 65 ans. Aujourd’hui, il assume le rôle de consultant en relations industrielles pour des entreprises locales et étrangères. 

Cet habitant de morcellement Cooperative, Bonne-Terre, Vacoas, s’est séparé de l’arène gouvernementale avec le sentiment du devoir accompli. Étroitement associé à divers projets gouvernementaux, dont l’introduction de l’Employment Relations Act en 2008, des amendements aux lois du travail en 2013, de nouveaux règlements dans le Health and Safety Act, le programme de l’Organisation internationale du travail (OIT) pour le travail décent ou encore les propositions pour un salaire minimal, Dev Luchmun compte plus de 35 ans d’expérience dans la formation des travailleurs. Il a aussi été conférencier pour l’OIT au Kenya, Botswana, Zimbabwe, Zambie, Congo et à Madagascar. 

En 1992, l’OIT l’a approché pour soumettre un rapport sur le syndicalisme dans la zone franche manufacturière à Maurice. Une ébauche de son rapport a été publiée en 1994 sous le titre Women in trade unions : Organisating the Unorganised. Diplômé en économie, il est aussi le fondateur de Labour Watch, une organisation non gouvernementale qui milite pour l’éducation des travailleurs.

Quel regard porte-t-il sur le mouvement syndical à Maurice ? Il trouve que les syndicats ont beaucoup œuvré pour l’émancipation de la classe laborieuse. Il dit constater qu’il existe à Maurice pas moins de 350 syndicats, «une situation qui pourrait bien être inscrite dans le livre Guinness des records». La classe laborieuse est constituée de 550 000 paires de mains et il n’y a que 110 000 à 115 000 travailleurs qui sont syndiqués et représentés par ces 350 syndicats. 

«En sus de cela, l’unité syndicale n’existe pas vraiment.» Dev Luchmun a profité de l’occasion pour parler un peu de ses expériences avec les quatre ministres précités. Il n’a pas eu vraiment de difficultés à travailler avec eux. Certains prenaient des décisions à la va-vite alors que d’autres laissaient le choix aux fonctionnaires de résoudre les problèmes entre patronat et syndicats.

«Les inspecteurs du ministère du Travail sont très à cheval sur la nécessité de faire respecter les droits des travailleurs. Ils arrivent chaque année à récupérer Rs 100 millions pour les travailleurs. Les employeurs récalcitrants sont souvent épinglés pour non-respect des conditions d’emploi en termes de salaire, de mauvais calcul des heures supplémentaires, etc.» Dev Luchmun pense toutefois qu’il faut continuer à améliorer les lois du travail et revoir l’Insolvency Act pour qu’en cas de fermeture d’une entreprise, les travailleurs soient inscrits en premier sur la liste de personnes à compenser. À ce jour, dit-il, les créanciers sont les premiers à être remboursés. 

Aussi, il trouve que le gouvernement devrait introduire le Portable Severance Allowance. Le Portable Severance Allowance Fund serait soutenu par tous les employeurs du privé pour leur personnel, pour qu’en cas de licenciement, les employés puissent en bénéficier le temps de trouver un autre emploi. Les employeurs placeraient, chaque mois, un jour du salaire mensuel de leurs employés dans un fonds, qui serait géré par l’État et générerait de l’argent. 

Dev Luchmun se dit en faveur de l’introduction d’un salaire minimal national. «Cela permettra aux travailleurs au bas de l’échelle d’avoir un salaire qui correspond aux réalités du pays. Cela va leur permettre d’amortir le coût de la vie. Mais il faut qu’un tel exercice ne dérange pas la relativité salariale dans la hiérarchie. Cela risque d’entraîner un réajustement salarial à divers niveaux.» Il faut un salaire minimum mais qui puisse permettre aux petites et moyennes entreprises de continuer à exister. 

Au point où vont les choses, le pays aura toujours besoin de travailleurs étrangers pour faire rouler les entreprises. Bon nombre de jeunes ne veulent plus travailler dans la zone franche manufacturière ou la construction. Ils veulent des boulots en col blanc. C’est pourquoi il faudra continuer à faire appel aux travailleurs étrangers. 

«Dans ce contexte, il faudrait instaurer un contrôle sur le mouvement des travailleurs. L’entreprise qui les emploie doit pouvoir émettre une carte d’identité en leur nom. Il faudra y indiquer la photo, le nom de l’entreprise, la durée du contrat, le sceau du ministère du Travail et des relations industrielles, etc. Avec cette carte,il sera facile pour les autorités de retrouver les travailleurs étrangers qui sont dans la nature après que leurs contrats de travail aient pris fin.» 

Coordinateur à la Confédération internationale des syndicats libres, Dev Luchmun a parcouru plusieurs pays africains, ce qui lui a permis de côtoyer plusieurs dirigeants syndicaux, dont Frederick Chiluba, devenu par la suite président de la Zambie, ou encore le syndicaliste Morgan Tsvangirai, Premier ministre du Zimbabwe de 2009 à 2013. 

Marié à Vimala, HR Manager dans un corps parapublic, Dev Luchmun est père d’une fille qui fait des études à l’étranger en ophtalmologie. Grand amateur de livres, de grandes civilisations et d’histoire, il aime visiter les lieux historiques du pays. «C’est une autre forme de sport.»

Son parcours

<p><strong>1978-1980 :</strong> Education Officer&nbsp;</p>

<p><strong>1980-2004 : </strong>Workers Education and Research Director</p>

<p><strong>1996-2004 :</strong> Coordinateur éducatif de l&rsquo;Organisation régionale africaine de la Confédération internationale des syndicats libres &ndash; Kenya</p>

<p><strong>2004 : </strong>Membre du board de l&rsquo;Export Processing Zone Labour Welfare Fund&nbsp;</p>

<p><strong>2006 : </strong>Président de Labour Watch&nbsp;</p>

<p><strong>2007-2016 : </strong>Conseiller au ministère du Travail</p>