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Derek Wong Wan Po: «Diversifier l’offre dans le secteur des assurances tout en restant vigilant»
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Derek Wong Wan Po: «Diversifier l’offre dans le secteur des assurances tout en restant vigilant»
Dans quel état se trouve le secteur des assurances au moment où vous prenez vos fonctions de nouveau président ?
Le secteur des assurances a été sous le feu des projecteurs dans le sillage de l’affaire BAI. Depuis, on a constaté qu’au niveau du régulateur, des autorités et des différents acteurs de l’industrie, il y a une nouvelle prise de conscience. Des procédures ont été initiées dans le but de consolider les assises du secteur. Celui-ci se porte relativement bien, quoique sa croissance reste modeste.
Quels sont les secteurs d’activités économiques les plus réticents à souscrire à une police d’assurance ?
Le marché se décline en deux segments : celui des grandes sociétés et celui traitant des individus. La culture de souscrire à une police d’assurance est bien établie chez les sociétés. Ce n’est pas toujours le cas chez les individus. Pour ces derniers, cela se limite souvent à des assurances obligatoires comme celle qui s’applique aux véhicules. Il est difficile pour les sociétés d’assurance de pénétrer ce segment.
Quel est l’impact de la venue éventuelle de sociétés spécialisées dans les assurances captives sur les opérations des assurances traditionnelles ?
C’est en décembre 2015 que la loi a été votée. Elle se décline en deux possibilités. Premièrement, une société peut s’auto-assurer en créant une structure captive pour ses propres besoins en matière d’assurances. C’est ce qu’on appelle une pure captive. Deuxièmement, il y a le third party captive, qui préconise que la société puisse avoir recours aux services d’une structure qui est gérée par un tiers. Le third party captive est en discussion et n’est pas encore opérationnelle sous le Captive Act. D’une manière générale, ce sont plutôt les grosses sociétés, locales ou internationales, qui porteront un intérêt pour les captives. Pour être compétitif au niveau international, Maurice doit impérativement compléter l’offre avec la mise en opération des third party captives au plus vite.
Qu’est-ce que Maurice devrait faire pour attirer des sociétés étrangères ?
Le projet du gouvernement vise la venue des sociétés étrangères à Maurice. Pour cela, il faut que les parties concernées vendent Maurice comme une destination sérieuse pour les sociétés engagées dans les assurances captives.
Le pays dispose déjà d’un important atout de par sa juridiction, qui est bien établie. Cependant, pour convaincre les sociétés étrangères d’opter pour notre destination plutôt que d’une autre, il faut que Maurice soit en mesure d’offrir des avantages et des facilités qui n’existent pas chez les concurrents.
En quoi consiste cette crainte à l’égard des sociétés étrangères engagées dans l’assurance captive et qui sont susceptibles de constituer un handicap pour les opérateurs locaux ?
Je ne crois pas qu’on puisse parler de crainte. L’arrivée des captives viendra élargir l’offre de Maurice pour des produits et des services financiers que le pays peut offrir aux clients internationaux. Les opérateurs locaux peuvent en tirer profit si jamais Maurice devient une destination connue et respectée pour les captives.
Par contre, tout en faisant le maximum pour attirer les clients étrangers, il faut aussi prendre les mesures appropriées afin que le marché local et traditionnel ne soit pas mis en péril. Le risque peut se traduire en une réduction des employés dans le secteur ou un rétrécissement de la compétence au niveau local si on n’arrive pas à attirer les talents dans le secteur. Cela, car il n’est pas vu comme un métier porteur par les jeunes. Donc, tout en soutenant la démarche des autorités pour que le secteur se diversifie, la posture devrait plutôt s’orienter sur le positionnement du pays pour attirer les clients potentiels. L’idée de développer une filière dédiée à l’assurance captive consiste à inciter les sociétés étrangères à utiliser Maurice comme base d’opération avec l’appui de leurs propres compétences et clientèle. Il faut avoir des garde-fous pour veiller à ce que les sociétés étrangères disposent de leur clientèle et ne privent pas les sociétés locales de la leur. Les professionnels locaux pourront aussi en sortir grandis s’ils sont exposés aux clients étrangers. Si c’est bien fait, on peut voir une opportunité pour que le secteur monte en puissance.
Voyons cette problématique sous un autre angle. Qu’est-ce qui empêche les opérateurs locaux de se lancer dans les assurances captives ?
Pour y parvenir, il faut pouvoir attirer les clients étrangers. Comment les attirer dans la juridiction mauricienne si Maurice n’offre pas des avantages et des facilités inexistantes chez les marchés concurrents ? Loin de nous l’idée de contester le recours à une telle perspective de diversification des activités du secteur des assurances. C’est au niveau de la façon de procéder qu’il faut être vigilant.
Si on entre dans cette filière et, qu’en retour, on ne dispose part d’une part de gâteau sur le marché international, cela ne vaut pas le coup. Il faut diversifier l’offre, certes, mais aussi adopter une approche très concertée avec les autorités pour que de telles initiatives ne soient pas néfastes pour les opérateurs locaux.
2016 a été témoin de l’introduction d’une législation sur l’établissement d’un «Risk Management Framework», une structure d’encadrement en gestion de risques. En quoi ce mécanisme aiderat- il les assureurs à opérer dans de meilleures conditions au niveau de la gestion de risques ?
Nous accueillons cette initiative avec sérénité. Personnellement, je pense que cela ne peut faire que du bien à l’industrie. Il y a deux façons de saisir le sens de cette structure d’encadrement en gestion de risques. D’abord, comme une corvée. Si tel est le cas, il est peu probable qu’un assureur ayant adopté une telle posture puisse réaliser de la valeur ajoutée.
Par contre, si elle est perçue comme une opportunité pour une société d’assurance de mieux gérer les risques, elle constitue un plus dans la démarche des assureurs à exploiter les possibilités de créer de la valeur. Si un assureur adhère scrupuleusement aux différentes étapes de l’encadrement de gestion de risques, tout le monde devrait sortir gagnant. Cela renforcera le niveau de confiance dans le secteur des assurances en général. Toutes les parties prenantes auront alors la conviction que les sociétés d’assurance sont bien gérées. Cette structure constitue également un plus pour le conseil d’administration d’une société d’assurance.
Cette dernière disposera d’un garde-fou qui va permettre à la direction de s’assurer qu’il n’y ait pas de prise de risques mal calculée, pouvant porter atteinte à la pérennité de l’entreprise. Au final, c’est une bonne chose. Cependant, tout dépend de la façon dont la problématique qui y est associée est abordée.
Comment un assureur devra-til s’y prendre pour être en conformité avec les exigences du «Risk Management Framework» ?
Il faut nommer un cadre chargé de la gestion des risques. Le titulaire doit être complètement indépendant des opérations commerciales. Il doit posséder un très haut niveau de discernement qui lui permettra d’assumer pleinement les conséquences de ses décisions. Il doit avoir un accès direct au conseil d’administration. Les sociétés devront ensuite élaborer leur encadrement de gestion de risques, selon leur spécificité. L’installation d’une telle structure peut se faire avec les compétences internes ou en ayant recours à un prestataire externe.
À qui revient la responsabilité pour la mise en place des recommandations de l’encadrement de gestion de risques ?
Le conseil d’administration est chargé de l’exécution et de la remise à niveau de l’encadrement, une structure dynamique qui est appelée à évoluer avec le temps. Cela, selon les phases d’évolution commerciale de l’entreprise.
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